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Symbiose cherche de nouveaux partenaires pour protéger la biodiversité

Agriculture. Créée il y a dix ans sous l’impulsion de cinq membres fondateurs (la FDSEA 51, le Réseau biodiversité pour les abeilles, la FRSEA, la Chambre d’agriculture de Champagne Ardenne et la Fédération des chasseurs), l’association Symbiose développe toujours plus de projets, avec en tête celui d’Apiluz mais également d’autres programmes comme le déploiement de trames bleues et vertes.

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Photo de Benoît Collard, Hervé Lapie et Philippe Lecompte
Benoît Collard, Secrétaire général de Symbiose, Hervé Lapie, Président et Philippe Lecompte, apiculteur, président du réseau biodiversité pour les abeilles devant une des bandes enherbées. (Crédit : DR)

Plus que jamais, la biodiversité est au cœur des préoccupations. Un établissement public d’État lui est même dédié avec la création, en 2019, de l’Office Français de la Biodiversité. Mais comme souvent, entre les institutions et le terrain, il y a un schisme.

L’association Symbiose essaie de faire le pont entre les deux, d’autant qu’Hervé Lapie, son président, est également administrateur de l’OFB et un des deux seuls représentants de la profession agricole au sein de l’office.

Loin d’entrainer chez lui une schizophrénie, ce dernier utilise cette double casquette pour faire avancer les choses. « Agir pour le climat et la biodiversité ne peut se faire sans les agriculteurs », insiste-t-il.

« Les enjeux autour de l’alimentation, de l’énergie, de la sauvegarde de la biodiversité, tous ces sujets, les agriculteurs en sont partie prenante. Quand on parle de souveraineté alimentaire, ce sont les agriculteurs qui sont en première ligne. Au niveau de la décarbonation de l’énergie, la biomasse, les bio-ressources sont produites par eux. Quant à la sauvegarde des espèces, quand on sait que 45% des surfaces sont occupées par des terres agricoles, on ne peut que les associer aux démarches. »

Conscient que la politique du grand remembrement décrétée dans les années 60 pour « nourrir 500 millions d’Européens après la Seconde Guerre mondiale » est devenue totalement obsolète, celui qui est aussi à la tête d’une exploitation porcine à La Cheppe (51) et de 135 hectares de céréales milite pour réintroduire des haies, des arbres, des plantes mellifères favorisant l’équilibre des écosystème et des espèces. Ainsi, aujourd’hui, grâce à Apiluz, 2 400 agriculteurs ont aménagé leur récolte pour laisser 1 900 km de bandes non fauchées sur six départements (Marne, Aube, Ardennes, Aisne, Yonne et Seine-et-Marne).

« En 2022, grâce aux conditions favorables de météo, une plus grande diversité de pollinisateurs sauvages a été observée avec quatre à cinq espèces d’abeilles sauvages et au moins six espèces de bourdons identifiés », détaille Jeremy Miroir, écologue (photo ci-contre).

Trouver l’équilibre entre respect de la biodiversité et rendements

Symbiose mène ainsi tout au long de l’année des partenariats pour aménager les espaces. Et certains avec des entreprises pourtant peu réputées sur leur impact environnemental. Pourtant, Hervé Lapie l’explique : « Avec RTE, à moins que les pylônes ne disparaissent, le moins que l’on puisse faire est d’essayer de mener des aménagements à leurs pieds. Avant, ils étaient totalement désherbés, aujourd’hui, c’est l’inverse. Depuis 2018, ces aménagements constituent une base d’observation et d’analyse sur le développement grâce à un suivi écologique. »

Même chose avec les éoliennes : « Total est désormais un acteur qui souhaite se tourner vers les énergies renouvelables. Là encore, des compensations écologiques sont menées avec des fenêtres à alouettes ou des bandes enherbées. » Pas assez pour la LPO (Ligue de protection des oiseaux), membre fondateur originel de Symbiose qui s’est désengagé de l’association, réclamant 2 ha de jachères autour de chaque éolienne.

(Crédit : DR)

« Sachant qu’il y a environ 600 éoliennes sur le territoire, ça faisait 1 200 hectares de jachères. Impossible à imaginer », tranche Hervé Lapie, mettant cette fois, sa casquette de président de la FDSEA de la Marne. « L’agriculteur doit aussi recevoir les revenus de son labeur », fait-il valoir. Et justement, l’enjeu de demain est que la profession soit associée aux décisions portées par les décideurs aussi bien nationaux qu’européens.

Prenons l’exemple d’Apiluz. Le dispositif a démontré son efficacité. Tant en termes environnemental, avec le retour de plusieurs espèces d’insectes mais aussi la nidation d’oiseaux ou le refuge de faune comme les renards ou chevreuils qu’en termes de rendement, puisque l’association compense financièrement la perte de surface non cultivée.

Oui mais voilà, à partir du moment où un agriculteur décide de faire une haie dans son champ, règlementairement, ensuite, il ne peut plus y toucher. « Avec tous les bénéfices observés, beaucoup se lanceraient mais il faut lever les contraintes sur ces sujets », appelle de ses vœux Hervé Lapie.

« Beaucoup de décisions sont prises à Paris, loin des exigences du terrain », regrette l’assemblée présente lors de l’AG de l’association. Symbiose recherche aussi de nouveaux partenaires pour mener à bien ses projets. Vivescia est par exemple très présent dans ceux consistant à créer des trames vertes et bleues. Concernant Apiluz, le partenariat mené avec Lidl, qui apportait sur la table 150 000 euros sur trois ans est arrivé à son terme et l’enseigne discount ne souhaite pas renouveler l’opération.

L’association recherche ainsi des partenariats privés, et pourquoi pas avec des Maisons de champagne… Le secteur de la viticulture souhaitant lui-aussi amorcer sa transition, toutes les énergies et synergies sont bonnes à prendre…