Entreprises

L’agriculture marnaise s’expose sur le SIA

Agriculture. Réunis sous la bannière de la Région Grand Est, plusieurs producteurs marnais ont exposé les savoir-faire locaux au Salon International de l’Agriculture où la Chambre d’agriculture de la Marne a aussi présenté l’initiative « Agriculture, cœur de nos territoires ».

Lecture 10 min
Photo du Salon International de l'Agriculture
Le Salon International de l’Agriculture rassemble chaque année Porte de Versailles agriculteurs, institutionnels et agro-industriels autour d’un événement économique, sociétal et grand public qui attire près de 600 000 visiteurs. (Crédit : BB)

Dans la Marne, l’agriculture représente 68% de la superficie départementale pour plus de 7 800 exploitations professionnelles et près de 66 000 hommes et femmes qui travaillent dans ce secteur d’activité. La Marne est aussi le premier département producteur de céréales, betterave, luzerne et escourgeon, qui compte également 500 élevages professionnels, toutes filières confondues. Quant à la viticulture, elle représente plus de 6 milliards de chiffre d’affaires sur l’AOC Champagne.

Une fois ce cadre posé, inutile donc d’insister davantage sur l’importance que revêt un événement comme le Salon International de l’Agriculture, avec ses dizaines d’événements, de conférences et de rencontres professionnelles en tous genres, mais aussi ses quelque 600 000 visiteurs attendus, pour la filière marnaise. Pour toucher le grand public, les agriculteurs et les producteurs se muent en ambassadeurs de toute leurs filières.

L’Asinerie séduit les visiteurs

L’Asinerie de Pes Vitis (qui signifie « au pied des vignes » en latin, NDLR) est l’une des 7 entreprises marnaises à être présente sous la bannière du Grand Est, l’une des dernières entreprises régionales à s’être inscrite pour le SIA à la suite d’un désistement. Une bonne surprise pour cette jeune société spécialisée dans la fabrication de savons et de produits à base de lait d’ânesse.

Photo de Flora Mathis
(Crédit : BB)

« J’élève des ânes de la race du Grand noir du Berry, que je fais naître, élève et éduque. Et avec le lait d’ânesse, j’ai développé une gamme de cosmétiques : savons, shampoing solide, crème pour le corps, sérum visage, crème pour le corps et pour les mains », explique Flora Mathis, qui a créé l’entreprise en 2020.

Passionnée par les ânes, la jeune femme s’est lancée dans cette aventure pour préserver cette race très spécifique et a décidé de faire bénéficier au grand public des vertus du lait d’ânesse, « très hydratant, qui soulage la peau notamment en cas d’eczema ou de psoriasis ».

Le SIA est donc une occasion rêvée pour l’entreprise de toucher le plus grand nombre de clients potentiels. « Il s’agit d’une belle opportunité pour nous faire connaître et pour vendre nos produits 100% naturels. Le premier week-end s’est très bien passé et les gens qui passent devant notre stand sont très réceptifs », explique la jeune femme qui a même parfumé certaines de ses crèmes au ratafia pour leur conférer une touche champenoise.

Labellisée Made in Marne, l’Asinerie de Pes Vitis et sa vingtaine d’ânes organisera d’ailleurs une journée portes ouvertes sur son site de Prouilly le dimanche 2 avril prochain.

Guy Chambron en habitué

Pour sa troisième édition au cœur du SIA, Guy Chambron a vu les choses en grand. En 2022, après avoir écoulé 650 kg de miel en une dizaine de jours, il n’avait plus aucun pot à vendre le dernier dimanche du salon. Pour ne pas être pris au dépourvu cette année, il a emporté 100 kg de plus dans ses valises pour satisfaire une clientèle toujours plus nombreuse.

Photo de Guy Chambron
(Crédit : BB)

Miel, bonbons, nougats, pâte à tartiner, hydromel, cosmétique… l’apiculteur de Givry en Argonne (Marne) décline la production de ses abeilles sous de multiples formes. « Le salon de l’agriculture nous permet de représenter notre territoire. C’est aussi une belle vitrine pour notre entreprise et pour montrer ce que nous sommes capables de faire », explique celui qui possède 300 ruches de production et 600 ruches en élevage.

Au-delà du grand public, en recherche de produits authentiques, Guy Chambron noue aussi des contacts avec des boutiques spécialisées, des petites épiceries, elles aussi friandes de miel artisanal.

De quoi représenter de 1,5 à 2 mois d’activités pour l’entreprise rien que sur le SIA, pour l’apiculteur qui dispose d’une boutique sur site mais aussi de plateformes dédiées au e-commerce.

Habitué à produire entre 8 et 10 tonnes de miel par an, il espère que l’année 2023 sera favorable après une année 2022 « correcte ». « Il nous faudrait un peu plus de pluie pour avoir du nectar. Nous avons utilisé tous nos stocks en 2021, il nous faut maintenant reconstituer nos réserves ».

La Foire en ligne de mire

« Le SIA n’est que l’échauffement. Le véritable événement se déroulera dans quelques mois à Châlons ».

Le trait d’humour permet à Hervé Sanchez, le président de la Chambre d’agriculture de la Marne, de rappeler que s’il est inévitable d’être présent sur le SIA, vitrine XXL de l’agriculture française, le rendez-vous le plus proche du territoire avec le public local se fera à la Foire de Châlons.

Photo d'Hervé Sanchez
Hervé Sanchez, président de la Chambre d’agriculture de la Marne. (Crédit : BB)

C’est donc en parfaite complémentarité avec le grand barnum international que les 14 partenaires de la démarche ont choisi de présenter sur le SIA leur initiative commune : « Agriculture, cœur de nos territoires » lors de la Foire châlonnaise de septembre 2023.

Regrettant au passage une trop faible visibilité marnaise Porte de Versailles, Hervé Sanchez rappelle « le rôle pédagogique » indispensable joué par les institutions partenaires auprès du grand public : « Il s’agit de présenter toutes les facettes de nos métiers, de montrer que nous avons un beau métier qui change avec les nouvelles technologies. C’est aussi un métier qui a de l’avenir, notamment en raison des nombreux départs à la retraite prévus : aujourd’hui, la moitié des agriculteurs a plus de 50 ans, cela veut dire qu’il faudra les renouveler dans les 10 à 15 années qui viennent. Or c’est un milieu qui attire de moins en moins les jeunes, c’est pourquoi nous devons communiquer sur nos atouts très en amont ».


>LIRE AUSSI : TCM affirme son identité rurale


Pour Hervé Sanchez, les agriculteurs ont déjà prouvé qu’ils étaient largement capables de se remettre en question et attendent surtout des gouvernements respectifs « du bon sens » afin notamment d’éviter des crises pourtant évitables, à l’image de celle qui secoue le monde betteravier avec l’interdiction des néonicotinoïdes (voir PAMB 8006), interdits sans qu’une alternative n’ait été trouvée : « Avant de sortir un texte de loi, on aimerait être consulté. On ne comprend pas pourquoi une même directive européenne n’est pas appliquée de la même manière en France en Allemagne ou en Espagne. Il était possible d’attendre 2024, ce qui nous aurait donné une année supplémentaire pour trouver une solution ».

Source de solutions

Habitué des allées du SIA, Bruno Forget, le Commissaire général de la Foire de Châlons insiste : « L’agriculture nourrit. Mais l’agriculture est aussi une réponse à tout ce qui se passe sur le plan géopolitique avec les enjeux d’autonomie alimentaire. L’agriculture performante est aussi génératrice d’emploi. Elle est enfin la réponse aux enjeux environnementaux ».

Par les valeurs qu’elle véhicule depuis longtemps déjà, poursuit-il, la 2e foire agricole de France qu’il dirige est donc idéalement placée pour accueillir la démarche « Agriculture, cœur de nos territoires » : « Ce n’est pas un concept, c’est une véritable stratégie de développement pour nos territoires ».

Un avis partagé également par Hervé Lapie, président de la FDSEA de la Marne et secrétaire général de la FNSEA.

« Enormément de solutions vont être portées par les agriculteurs dans nos exploitations. Nous sommes là pour apporter à l’intérêt général un bien commun, celui de l’alimentation. Il faut aussi que le citoyen consommateur se rende compte que l’agriculture est source de solutions face à tous les enjeux qui sont devant nous. En effet chaque mètre carré agricole aujourd’hui est un puits de carbone, une capacité à piéger des gaz à effets de serre, une capacité à développer de l’énergie renouvelable et à produire de l’alimentation ».