Jean-Marc Jancovici : "Nous allons devoir décarboner de gré ou de force"
Energie. Invité par Neoma Business School pour parler des crises climatique et énergétique, Jean-Marc Jancovici a rappelé que si le réchauffement climatique est inarrêtable, il faut agir pour décarboner le monde.
On ne présente plus Jean-Marc Jancovici, membre du Haut Conseil pour le climat, créateur du ‘bilan carbone’, et l’un des experts les plus reconnus sur l’enjeu énergie/climat. Il était l’invité, jeudi dernier, de l’Agence d’Urbanisme de la région de Reims et de l’association étudiante NEORATEUR de NEOMA dans le cadre d’une conférence intitulée « Crises climatique et énergétique, peut-on respecter l’accord de Paris sans tout réinventer ? ». Et à cette question posée, Jean-Marc Jancovici répond sans ambages : « Non ».
A ce titre, il rappelle que pour savoir où l’on va, il faut savoir d’où l’on vient. En l’occurrence, d’un monde « renouvelable » il y a encore quelques siècles, tandis que celui dans lequel nous vivons n’est possible qu’avec l’abondance de l’énergie fossile et serait impensable sans celle-ci. Il souligne d’ailleurs combien les écoles de commerce sont les héritières de ce monde, en ce sens qu’elles accueillent et forment des jeunes gens qui partiront travailler dans des multinationales - qui n’existaient évidemment pas jadis…
>LIRE AUSSI : Dream Energy anticipe l’électromobilité de demain
Jean-Marc Jancovici regrette que les canaux d’accès à l’information (l’Education nationale par le biais de la formation initiale, la formation continue, la presse) ne contribuent pas assez à la compréhension des défis qui se dressent devant nous : dépendance du monde moderne à l’énergie abondante, et limites physiques (climat, ressources) obligeant au changement. Or, selon lui, « cette compréhension est la première marche vers le branle-bas du combat général contre le réchauffement climatique. »
Il faut agir !
Pour Jean-Marc Jancovici, non seulement le réchauffement climatique est désormais inarrêtable (à défaut d’avoir réagi lorsqu’il en était encore temps), mais il va devenir pire. « Ce qui ne signifie pas qu’il n’y a rien à faire » tempère l’expert. Pour cela, il convient de modérer autant qu’il est possible de le faire, l’accroissement du problème, en réorganisant l’ensemble de nos structures, partout, en même temps. à ce titre, Jean-Marc Jancovici souligne les vertus de l’action collective pour tendre vers cet objectif commun. Il prend pour exemple les 150 participants de la Convention citoyenne pour le climat, qui ne se connaissaient pas, auxquels on a expliqué les données du problème et permis d’en discuter collectivement, et qui sont devenus après cela, bien plus audacieux qu’ils ne l’étaient avant.
Par ailleurs, à cause de l’épuisement des gisements, les 16 premiers fournisseurs de pétrole de l’Europe ne pourraient au mieux que produire 50% du niveau actuel d’ici 2050 (pour le gaz le pic mondial surviendrait vers 2030 au plus tard), avec des exportations vers l’Europe divisées par deux à dix. Jean-Marc Jancovici estime que - de gré ou de force -, il va falloir décarboner nos activités de manière très rapide, et qu’il n’est physiquement pas possible de refuser de s’engager dans cette voie. Quoi qu’il en soit, une chose est sûre : il faut agir en ce sens !