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Artisanat : place aux reconversions

Artisanat. La Chambre de Métiers et de l’Artisanat Grand Est organise ce vendredi 13 mai, au sein même de ses établissements de la Marne, des Ardennes, de l‘Aube et de l’Aisne, les premiers rendez-vous de la reconversion, réunissant un ensemble de professionnels : des Compagnons du devoir aux organismes de formations en passant par Pôle Emploi.

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Les acteurs de l’artisanat se rassemblent Les acteurs de l’artisanat, la formation, le retour à l’emploi seront présents le 13 mai prochains dans les CMA du Grand Est. De bas en haut : Marie-Cécile Demolière, Dominique Hautem, Jonathan Wiedemann, Christophe Vanhoutte et Florian Mouchel. Nastasia Desanti

La crise du Covid, on le sait, a agi comme un révélateur dans de très nombreux secteurs, dont celui de l’artisanat. La particularité est que cela a conduit à une hémorragie des effectifs dans des métiers déjà très en tension. « On a un besoin de main d’œuvre démesuré », n’hésite pas à insister Dominique Hautem, président de la CMA de la Marne. « On paye une mauvaise image des métiers que l’on traine depuis longtemps, alors que le monde de l’artisanat s’est considérablement transformé ces vingt dernières années », souligne celui qui est aussi électricien. Pourtant, le monde de l’artisanat attire, mais surtout des personnes en volonté de reconversion. Selon un des baromètres BVA réalisé en 2021, 62% des 25-30 ans songent à la reconversion et 20% des nouvelles créations d’entreprise l’ont été suite à la crise sanitaire.

« Nous constatons une augmentation de la moyenne d’âge parmi nos compagnons », confirme Christophe Vanhoutte, Responsable commercial Grand Est des Compagnons du Devoir. « C’est l’un des effets positifs pour l’artisanat. Les métiers du bâtiment par exemple, retrouvent un peu d’engouement. Notre ADN est d’apprendre le geste, et un Compagnon qui a la motivation ainsi qu’un bagage de savoir-être en entreprise et des notions, dans les matières généralistes, pourra faire son apprentissage en une année au lieu de trois », relève-t-il.

Une année de transition pro sans perdre de droits

D’ailleurs, une année, c’est le temps donné par l’organisme « Transition professionnelle Grand Est » issue du Fongecif. « Il existe une association Transitions Pro dans chacune des 17 régions métropolitaines et d’outre-mer », indique Jonathan Wiedemann, Chargé de mission Transitions Collectives chez Transitions Pro Grand Est. « Nous proposons notamment un dispositif pour les démissions sans perdre de droits pour aller vers la création ou la reprise d’entreprises. » Et les besoins sont là. D’ici 10 ans, on estime à 300 000 le nombre d’entreprises à reprendre au niveau national. Certains secteurs s’en sortent mieux que d’autres comme les métiers de bouche. « Indiscutablement, les émissions comme Top Chef ou Le Meilleur Pâtissier ont contribué à redonner de l’attractivité à ces métiers », analyse Florian Mouchel, Directeur Développement, Marketing et Communication chez Alméa Formations. L’objectif de la journée dédiée à la reconversion est aussi de faire découvrir les métiers méconnus en tension.

« La clé, c’est l’envie. Si on a l’envie, l’apprentissage du geste viendra naturellement, et ensuite, une progression dans l’entreprise ou la création de sa propre structure »

« Nous avons de gros besoins en machinisme agricole par exemple. Et aujourd’hui, un tracteur, il a un ordinateur à bord », signale Christophe Vanhoutte. « Couvreur, technicien de maintenance, mécanicien, électromécanicien, tous ces métiers recherchent énormément de monde. » Aujourd’hui, ce sont même les entreprises qui viennent les voir avec des besoins définis. « Il y a deux mois, un grand groupe du secteur du bâtiment est venu nous voir pour que l’on forme une dizaine de salariés. » La Région Grand Est a établi de manière officielle six grands secteurs en tension : le BTP, l’industrie, le transport, l’hôtellerie-restauration et la santé. « À ces six secteurs, nous avons ajouté ceux de l’agri-viti et le machinisme agricole », annonce Marie-Cécile Demolière, directrice territoriale de la Marne de Pôle Emploi. « L’objectif est non seulement de faire découvrir des métiers souvent ignorés mais aussi de mettre en lien ceux qui cherchent à se reconvertir avec les professionnels. »

LES MÉTIERS DE L’ARTISANAT EN CONSTANTE ÉVOLUTION

L’arrivée sur ce marché de nouveaux profils tend aussi à faire sauter l’opposition souvent avancée des « cols blancs » et des « cols bleus ». « J’ai souvent tendance à raconter que mon grand-père qui était menuisier a appris avec les mêmes outils que ceux avec lesquels il a transmis son savoir. Aujourd’hui, un menuisier, il a un ordinateur et une machine à découpe 3D. Et dans 10 ans, nous utiliserons des outils que nous n’osons pas encore imaginer ! Mais pour cela, il faut la bonne formation », confie Dominique Hautem. « La clé, c’est l’envie. Si on a l’envie, l’apprentissage du geste viendra naturellement, et ensuite, une progression dans l’entreprise ou la création de sa propre structure. »

« Aujourd’hui des dispositifs existent pour réaliser une transition professionnelle en une année et sans perte de salaire », souligne Florian Mouchel. Rien que l’année dernière, les Compagnons du Devoir Grand Est ont traité « une trentaine de demandes de reconversion. » Et s’il était besoin de le rappeler, l’artisanat est un secteur où les salaires sont au-dessus de la moyenne. « Un électricien de 33 ans, avec véhicule, aux 35 heures, payé en heures supplémentaires, aujourd’hui c’est 2 500 euros nets par mois », tranche Dominique Hautem.