Agriculture : des prix plus élevés mais des charges en forte hausse
Agriculture. Les résultats économiques de la moisson sont en progression dans les grandes cultures mais les exploitants doivent faire face à une hausse de leurs coûts de production et de leurs charges.
Habitué aux aléas climatiques qui pèsent sur les marchés, le monde agricole doit cette année plus que jamais tenir compte également du contexte géopolitique pour établir un prévisionnel de résultats. Une accumulation des points de vigilance qui, liés à une augmentation des charges, appelle à la prudence des agriculteurs. Première bonne nouvelle pour les agriculteurs marnais, les rendements sont au rendez-vous (voir ci-dessous). « Cette année, au niveau des rendements le blé est au-dessus de la moyenne, les escourgeons aussi. Sachant que nous ne sommes qu’en septembre et que tout n’est pas encore récolté. Mais cela donne le sens du vent », estime Olivier Josselin, Responsable relations extérieures, Filières et références, à la FDSEA de la Marne, qui chaque année étudie les bilans post-moissons et l’état du marché.
En 2022, le prévisionnel des grandes cultures est évalué à 680 euros par hectare dans la Marne. Un chiffre qui fluctue selon les secteurs, l’est du département (Argonne, Bocage…) étant évalué à 460 €/ha et l’ouest (Brie, Tardenois) à 500 €/ha, tandis que la Champagne crayeuse au centre du département s’élève à 720 euros/hectare. « Ces moyennes cachent des écarts importants, selon le temps très sec, l’adaptation des assolements, la réglementation ou les accidents de cultures localisés », précise le représentant de la FDSEA 51.
Surtout, cette progression de la valorisation ne doit pas faire oublier la réalité du terrain : « La disponibilité mondiale des productions agricoles étant fragile, les marchés réagissent à la hausse. La souveraineté alimentaire devient un enjeu primordial dans ce contexte géopolitique. Les prix ont connu un rebond significatif sur les marchés, la valorisation augmente, mais les charges aussi, ce qui donne des résultats sensiblement identiques », précise Olivier Josselin. En effet, le surcroît de résultat dégagé par la récolte ne s’est pas retrouvé disponible dans la trésorerie des exploitants qui ont dû financer le surcoût de la récolte 2022.
Des charges qui flambent
Par quand les charges étaient de l’ordre de 1600 à 1700 euros par hectare en 2021, elles sont passés à près de 2000 euros cette année. « On est en perte de repères », souligne le spécialiste des marchés. « En un an, le poste engrais passe de 582 euros par hectare à 796 euros et le coût de la mécanisation prend 100 euros ». La cotation des approvisionnement ayant augmenté de plus de 100% voire de 300%, les écarts entre exploitations se creusent entre celles qui ont acheté au début des augmentations et celles qui ont acheté au plus fort de la hausse. Les charges sociales ont quant à elles évolué de +17% en moyenne en 2022 car elles sont calculées selon le niveau de revenu des années précédentes.
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Avec cette explosion des charges, les exploitants agricoles se voient donc dans l’obligation de faire progresser leur chiffre d’affaire de manière significative (de l’ordre de +50% par rapport à 2021, estime la FDSEA 51) pour ne pas dégrader la rentabilité. D’autant que les coûts de production sont encore annoncés à la hausse pour 2023, explique Olivier Josselin : « Les coûts de production 2022 se sont construits avec une partie des charges qui ont pu être acquises à des niveaux d’avant inflation mais pour 2023, les charges qui seront engagées le seront à un coût bien supérieur à celui de 2021 ».
A titre d’exemple, le coût de production du blé 2023 devrait être supérieur de 15 à 20% de plus que celui de 2022. Ainsi en 2021 une tonne de blé coûtait 160 euros à produire, un montant qui s’est élevé à 200 euros en 2022 et qui pourrait atteindre 240 euros en 2023. Selon les calculs de la FDSEA, en 2021 le seuil de rentabilité était de 1471 euros/hectare, il est aujourd’hui de 2038 euros. Une situation complexe qui appelle à la vigilance des exploitants : « Il ne faut pas rester sur des repères historiques », prévient Olivier Josselin. « Aujourd’hui, il faut connaître ses coûts de production, connaître le retour sur investissement d’un appro acheté cher, par exemple. Il faut faire preuve de prudence au niveau des investissements et la défiscalisation ne doit pas guider les investissements ». Des conseils de prudence, en attendant 2023 et ses incertitudes qui augmentent au fil des jours.