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TC de Troyes : les premiers signes d’une dégradation s’annoncent

Justice. Les liquidations judiciaires déjà en hausse au Tribunal de Commerce de Troyes depuis l’année dernière.

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Le Tribunal de Commerce de Troyes
Le Tribunal de Commerce de Troyes n’est pas encore au complet puisqu’un poste de juge consulaire reste vacant. (Crédit : LL)

« De plus en plus d’entreprises ont du mal à rembourser leur PGE et les trésoreries se dégradent », constate Julie Bernier, procureure de la République, à l’occasion de l’audience solennelle du Tribunal de Commerce de Troyes. La magistrate du Parquet a aussi pu constater que « les liquidations judiciaires ont été bien plus souvent prononcées que les redressements judiciaires » et observé à cette occasion que « certains gérants ont profité des PGE alors que la situation de l’entreprise était déjà obérée ». Le ministère public a d’ailleurs beaucoup saisi le tribunal de commerce avec 77 saisines d’office en 2022 contre 7 seulement en 2019. L’objectif étant d’empêcher que des entreprises en difficulté ne viennent entraîner dans leur chute d’autres entreprises.

D’autant que jusqu’ici, les habituels signaux d’alerte ne sont pas encore enclenchés. L’année dernière, les assignations des caisses sociales et fiscales n’ont pas repris leur rythme habituel avec seulement 23 assignations, soit deux fois moins qu’avant la crise sanitaire. Globalement, en matière de procédures collectives, si l’activité est en hausse de 52 % avec 178 ouvertures en 2022 cela ne fait que rattraper le niveau de 2019, avant la crise sanitaire.


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En revanche parmi les 178 entreprises concernées, le nombre de celles placées en liquidation judiciaire est en nette hausse. Autre fait notable, les dirigeants prennent les devants puisque dans près de deux cas sur trois, c’est une déclaration de cessation de paiement qui est à l’origine de la procédure. À noter également que 19 sanctions ont été prononcées en 2022, dont plus de la moitié de faillites personnelles ou patrimoniales, une proportion en forte progression par rapport aux années précédentes où les interdictions de gérer étaient majoritaires.

Prévention renforcée

La situation pourrait se dégrader et certains signes ne trompent pas. Ainsi, en 2022, les juges chargés de la prévention et le président ont tenu 186 rendez-vous de prévention contre 96 en 2021. « Nous allons renforcer la cellule de prévention et continuer de mettre en avant les procédures de conciliation et le mandat ad hoc », annonce Richard Thibault, président du Tribunal de Commerce de Troyes.

La juridiction s’attend à beaucoup de travail cette année qu’il faudra mener avec 16 juges seulement au lieu des 17 prévus. Même si le Tribunal de Commerce troyen accueille une nouvelle juge, Guylaine Mandron, les candidats manquent et le président serait partisan de l’ouverture aux cadres supérieurs d’entreprise pour étoffer les rangs. Surtout à l’heure où les projets de réforme visent à la création d’un « tribunal des affaires économiques » aux compétences élargies aux associations ou encore à l’agriculture.

« Les juges consulaires ne sont pas contre la réforme mais ils tiennent à conserver leur indépendance et la spécificité de la juridiction commerciale », ajoute Richard Thibault. Le président du Tribunal de Commerce a aussi tenu à faire un point sur le nouveau statut d’entrepreneur individuel entré en vigueur au printemps dernier. « À Troyes, nous avons été parmi les premiers à appliquer des jugements autour de ce statut qui est à revoir car il y a des trous béants dans les textes », conclut-il.