Collectivités

La sobriété sans renier les fêtes de Noël

Énergie. Face à l’augmentation des coûts de l’énergie mais aussi aux exigences environnementales, les collectivités de la région ont, pour l’immense majorité, mis en place un plan d’action de sobriété énergétique juste avant l’hiver.

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La sobriété sans renier les fêtes de Noël
À Reims, choix a été fait de diminuer les plages d’illumination des éclairages de Noël sans renoncer à l’esprit de fête. (Crédit : N. Desanti)

Alors que les discours alarmistes se succèdent concernant les coupures d’électricité au mois de janvier (par plage de deux heures par jour, essentiellement entre 8 et 13 heures et 18 et 20 heures), les collectivités, poussées par les recommandations gouvernementales, ont mis en place un plan d’action d’urgence de sobriété énergétique. Ce dernier, bien que prenant des mesures souvent momentanées, dues à la forte augmentation des coûts de l’énergie pour cause de guerre en Ukraine, fait souvent suite à un plan plus global, établi quant à lui, après la COP 26 de 2021, à Glasgow, et dont le principal objectif est l’atteinte de la neutralité carbone à horizon 2050. Alors concrètement, comment s’y sont pris les collectivités et quels moyens ont-elles mis en œuvre ?

Des baisses de consommation de chauffage et d’éclairage public

À Epernay par exemple, depuis plusieurs années, de nombreuses actions ont déjà été menées en termes d’isolation des bâtiments, de modernisation des chaufferies ou d’éclairage public. « Entre 2011 et 2021, la consommation relative au chauffage des bâtiments communaux a baissé de 31 %. Quant à la consommation électrique de l’éclairage public, elle a baissé de 20 % sur la même période », explique-t-on à la mairie. « Pour autant, la Ville et l’Agglo, dans le contexte, doivent encore renforcer leurs efforts en mettant en place un Plan de sobriété énergétique. » Les nouvelles mesures ont pris effet à partir de novembre 2022 et concernent notamment l’éclairage public, le chauffage, les différents sites communaux et communautaires mais aussi le renforcement de la mise en place d’éco-gestes au sein des services.

1 M€ d’économie à l’échelle du territoire sparnacien en 2023

Ces mesures doivent permettre à la Ville d’Epernay d’économiser plus de 700 000 euros et à l’Agglo plus de 300 000 euros, soit un montant d’un million d’euros à l’échelle du territoire, en 2023. Ainsi, dans le détail, l’abaissement de l’éclairage de 50 % pendant toute la durée d’éclairage représente à lui seul une économie de 20 500 euros. Surtout, il a été décidé de couper purement et simplement, depuis le mois de décembre, l’éclairage entre minuit et 4h30 sauf sur des axes majeurs. Une mesure radicale pour une économie estimée à 142 000 euros. Concernant le chauffage, la température a été baissée d’un degré dans les sites administratifs, éducatifs, culturels, associatifs et sociaux sauf les crèches et certains Ehpad. Quant aux animations de Noël, pas question de gâcher la fête. Si des mesures ont été prises (patinoire en décembre pendant un mois au lieu de six semaines habituellement avec une épaisseur moindre de glace, en accord avec les Vitrines d’Epernay ; réduction de la durée des illuminations de six semaines à un mois et limitation de leur durée journalière de 17 à 22 heures en semaine et de 16 à 23 heures les vendredis et samedis, les animations ont été conservées.


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À Reims aussi, des mesures concrètes ont été prises depuis plusieurs années concernant la sobriété énergétique, avec par exemple, la transformation de la chaufferie urbaine alimentant 17 000 foyers en eau chaude, hier au fuel et au gaz, aujourd’hui fonctionnant à partir de biomasse. Accélérer la transition énergétique est un des axes majeurs de la politique de la Ville et du Grand Reims. Toutefois, un plan de sobriété ponctuel a été présenté le 30 septembre dernier. Depuis, il est déployé. Si certaines mesures ont pu être mises en place immédiatement, d’autres ont nécessité un temps de concertation, notamment concernant les piscines ou les gymnases. Pour l’éclairage public dans les communes, c’est en cours de déploiement selon le choix des maires. En effet, certaines installations électriques doivent être adaptées. Ainsi, concernant les décorations de Noël, « elles sont depuis maintenant plusieurs années en LED, louées à une société d’illuminations, cela fait partie du cahier des charges du marché », précise Arnaud Robinet.

Comme ce marché de location est très régulièrement renouvelé, la collectivité bénéficie à chaque fois du matériel le plus moderne et performant. De manière spécifique cette année, la Ville a décidé « de garder le même déploiement pour ne pas donner un effet chétif aux décorations prévues dans la ville. Pour autant, nous avons décidé de réduire les plages horaires. Auparavant, elles étaient allumées le matin. Ce n’est plus le cas et les plages horaires ont été réduites à 21 heures en semaine et 22 heures le week-end. » C’est en concertation avec les commerçants rémois et les Vitrines de Reims que la Ville a détaillé son Plan durant la période des fêtes. « Nous avons écrit à l’ensemble des commerçants afin de les inciter à mettre en œuvre quelques comportements vertueux, et surtout, nous avons échangé avec les Vitrines sur l’enjeu majeur que nous avons avec eux à savoir : le marché de Noël. Nous avons collectivement souhaité avoir un marché responsable sans pour autant supprimer la magie de Noël », souligne le maire de Reims.

Baisse de consommation électrique de 21%

En plus des fêtes de fin d’année, les efforts se sont également concentrés sur des éléments comme la température des piscines et des locaux publics. A aussi été décidé par exemple, la réduction de l’éclairage des monuments historiques avec une coupure une heure plus tôt, soit 22 heures en semaine et minuit le week-end, ce qui représente 25 % d’économies. Ou encore la suppression de l’éclairage public sur les zones d’activité économique, sauf dans les emprises où il reste indispensable. L’ensemble des efforts prévus dans le cadre de ce plan de sobriété équivalent à une baisse cumulée de la consommation de l’électricité de 21,1 % et de 7,8 % pour le gaz.

« Si nous voulons surmonter cette crise, il va falloir changer d’échelle et apprendre à questionner chacune de nos habitudes sous l’angle de l’écoresponsabilité »

À Charleville-Mézières, le maire de la ville, Boris Ravignon a récemment fait le point sur la situation énergétique en dressant un catalogue de projets pour réduire la consommation et développer les énergies renouvelables. L’objectif ? Revoir les usages et améliorer partout l’efficacité énergétique. D’autant que Charleville-Mézières a déjà accusé de lourdes pertes à cause de la flambée des prix du gaz et de l’électricité. En effet, la consommation toutes énergies confondues « a atteint 26,2 GWh, soit + 45 % pour la seule électricité sur le budget 2022 ». Avec notamment un gros impact sur l’éclairage public (6,1 gigawatts-heures). S’agissant de l’électricité, le Parc des Expositions et la mairie sont les équipements les plus énergivores tout comme le Musée de l’Ardenne pour le gaz. Alors que les 29 écoles carolomacériennes représentent 34 % des consommations énergétiques.

9 000 points lumineux modernisés

L’élu a rappelé les différentes actions pourtant déjà menées par les deux collectivités dont il a la charge. À savoir : le développement de pistes cyclables, le renforcement de l’offre de transports en commun, le déploiement de 149 bornes de recharge électrique ou encore le covoiturage domicile-travail organisé avec Klaxi. Boris Ravignon a également mis l’accent sur les opérations afin d’améliorer la performance énergétique : le changement du groupe froid de la patinoire et la rénovation thermique des centres aquatiques et de la Maison communautaire. Avant d’annoncer un investissement de 15 millions d’euros sur quatre ans à Charleville-Mézières pour le remplacement de 9 000 points lumineux en LED, ce qui débouchera sur 75 % d’économies. « Mais ces efforts ne suffiront pas. Si nous voulons surmonter cette crise, il va falloir changer d’échelle et apprendre à questionner chacune de nos habitudes sous l’angle de l’écoresponsabilité », insiste-t-il.

C’est aussi le moment d’investir dans la transition énergétique via un programme territorial photovoltaïque visant à installer des panneaux sur le toit terrasse de la médiathèque « Voyelles », sur le flanc de la salle ARENA, sur le parc de stationnement du centre aquatique Bernard Albin ou sur les toitures des établissements scolaires. D’autres parcs photovoltaïques sont aussi prévus sur les zones d’activités de Bazeilles et Lumes ou sur les friches industrielles de Villers-Semeuse et Nouzonville. La méthanisation et la géothermie vont aussi être encouragées. Enfin, la création d’un pôle de formation aux métiers de la transition énergétique et écologique est envisagée sur le campus Sup’Ardenne afin d’accompagner toutes ces transformations. Il est aussi question d’étendre le réseau de chaleur urbaine vers le quartier carolomacérien de La Houillère. 30 millions d’euros pourraient y être dégagés pour 11 000 équivalents logements.