La croissance décroche dans le Grand Est depuis une trentaine d’années
Industrie. Petite surprise pour les amateurs d’évidences, la surreprésentation de l’industrie et les nombreux travailleurs frontaliers ne font pas forcément la richesse de la région. L’industrie manque de valeur ajoutée et les frontaliers font la richesse de ceux qui les emploient.
Avec une hausse annuelle de moins de 1% entre 1990 et 2018, la progression du PIB, Produit Intérieur Brut, de la région est la deuxième plus faible de France métropolitaine, derrière celle de la Bourgogne-France-Comté. Dans sa dernière analyse sur le sujet (Février 2022), l’INSEE explique cette situation en plusieurs points. Les conséquences de la crise bancaire de 2008-2009 sont encore fortes et le Grand Est n’a pas retrouvé son niveau de 2007. La valeur ajoutée de la plupart des secteurs évolue de manière moins positive que dans le reste du pays.
Le nombre croissant de travailleurs frontaliers contribue plus à la croissance des régions voisines qu’au Grand Est. La valeur ajoutée de l’industrie, fortement présente dans la région, croit moins vite que le reste de l’économie. Sixième région française pour sa population (8,3% de la France), le Grand Est occupe la septième place pour son PIB (6,8% de production nationale), avec un total de près de 160 milliards d’euros, loin derrière les 726 Md€ de l’Ile-de-France ou les 272,6 Md€ d’Auvergne-Rhône-Alpes.
Troisième PIB industriel de France
La part de l’industrie dans l’ensemble de la valeur ajoutée régionale est plus forte qu’ailleurs. La valeur ajoutée du secteur (27 milliards d’euros) pèse 19% de l’économie régionale, soit trois points de plus que la moyenne nationale. Cette valeur est la troisième de France, derrière celle de l’Ile-de-France (56 Md€) et celle d’Auvergne-Rhône-Alpes (42 Md€).
Les grands secteurs de l’industrie régionale (fabrication d’équipements et machines, industrie agroalimentaire ou fabrication d’autres produits industriels) tiennent une place plus importante dans le Grand Est qu’en France de province. La tendance est cependant à la baisse. La part de l’industrie dans la valeur ajoutée était de 7,2% en 1990, contre 6,8% aujourd’hui.
Une croissance parmi les plus faibles
La part des services dans l’économie régionale (71%) est moindre qu’au niveau national (75%), avec une part des services marchands à quatre points au-dessous de la moyenne nationale. Cet écart est particulièrement important dans l’information et la communication, les services aux entreprises et l’hébergement restauration. Ces services marchands ont progressé de 3,3% dans le Grand Est et de 6,2% en France. La part des services non marchands (25%) est comparable à la moyenne nationale avec une hausse de 5,2% par rapport à 1990.
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Entre 1990 et 2018, la croissance du PIB du Grand Est (+0,9%) s’avère parmi les plus basses comparativement à la croissance nationale (+1,6%). Historiquement, entre 1990 et 1995, le rythme de croissance moyen du Grand Est (+1,3%) était comparable à celui du niveau national. Au final, le rythme de croissance du PIB régional est resté stable jusqu’en 2007 alors qu’il a progressé de 2,2% en France. En conséquence, le poids de la région a reculé de 8,4% à 7,5% entre 1990 et 2007. Ce n’est qu’en 2018 que le PIB s’approche de son niveau de 2007.
Le caractère plus industriel et moins tourné vers les services n’est pas la principale cause de la plus faible croissance du Grand Est depuis 1990. La principale cause s’explique avant tout par une moindre performance de l’économie en général. L’augmentation de la valeur ajoutée reste en effet plus faible qu’en France de province dans la plupart des secteurs d’activité.
Un PIB par habitant sous la moyenne nationale
Le renversement de situation est spectaculaire. En 1990, le PIB par habitant est supérieur de 700 euros à la moyenne nationale. En 2017, il est inférieur de 1 200 euros. Ce renversement a lieu en 1995 et depuis ce décrochage s’accentue. La première explication vient de la croissance des travailleurs frontaliers. Ils sont 143 000 en 1999 et 177 000 en 2017 et pèsent près de 8% des actifs de la région. A contrario, peu d’actifs résidant dans les régions et pays voisins travaillent dans le Grand Est. La conséquence de cette situation est claire : le taux de concentration de l’emploi (la part des habitants en emploi pouvant potentiellement travailler dans la région) décline en passant de 95 à 92%, entre 1990 et 2017. Ceci sans ignorer la consommation en région des travailleurs étrangers