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La filière Champagne investit 70 M€ dans la préservation de son avenir

Champagne. Bien décidée à protéger sa production et son appellation, à assurer la durabilité de la filière et à préparer son avenir à long terme, l’interprofession champenoise va se doter d’un budget revu à la hausse, en augmentation de 10 millions d’euros par an. De quoi donner aux Champenois les moyens de leurs ambitions.

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David Chatillon et Maxime Toubart
David Chatillon, président de l’Union des Maisons de Champagne et co président du Comité Champagne et Maxime Toubart, président du Syndicat général des vignerons et co-président du Comité Champagne annoncent un renforcement des moyens alloués au Comité Champagne pour garantir une stratégie durable de la filière. (Crédit : BB)

Après avoir connu une année 2022 historique au sortir du Covid, avec 326 millions de bouteilles expédiées (+1,2% par rapport à 2021 et un chiffre d’affaires record à plus de 6 milliards d’euros), la filière Champagne s’engage dans la construction d’un avenir durable.

Pour ce faire, le Comité Champagne annonce se donner clairement les moyens de ses ambitions. Si, côté ambitions, il s’agit de protéger la production et l’appellation Champagne, d’assurer la durabilité de la filière et de préparer son avenir, côté moyens, l’interprofession se dote aussi d’un budget à la hauteur de ses projets, en augmentation de 70 millions d’euros sur cinq ans.

Pour présenter cette stratégie, David Chatillon et Maxime Toubart, les deux co-présidents du Comité Champagne, ont choisi de réunir la presse à l’occasion du salon Wine Paris. L’événement de la porte de Versailles, qui a cette année encore pris une nouvelle ampleur, était donc le lieu et le moment idéal pour s’adresser à la presse nationale et internationale. Pari gagnant, puisque la conférence de presse a réuni près d’une centaine de journalistes venus entendre les deux co-présidents annoncer leur plan d’action.

« Nous avons deux défis majeurs, celui de la production et celui de la désirabilité. » Maxime Toubart

En matière de production, la Champagne doit en effet se montrer particulièrement attentive aux maladies qui touche les vignes, plus précisément à la flavescence dorée, qui pourrait bien devenir « le phylloxéra du XXIe siècle » avance le co-président de l’interprofession en référence à la maladie qui a ravagé le vignoble français à la fin du XIXe siècle.

En matière de désirabilité, l’enjeu est de poursuivre les efforts engagés depuis plus de 20 ans sur le développement durable et la RSE, à tous les niveaux de la filière. « Le développement durable devient de plus en plus un critère d’achat pour le consommateur. Et pour nous, Vignerons et Maisons, c’est une priorité absolue, poursuit David Chatillon. Nous accompagnons chaque maison et chaque vigneron dans sa démarche individuelle de RSE. Mais au-delà des initiatives individuelles, nous faisons aussi de la RSF - la Responsabilité Sociétale de la Filière - et nous en faisons une priorité absolue. »

« Muscler notre jeu »

« Au cours des dix prochaines années nous allons muscler notre jeu et renforcer nos moyens avec deux objectifs en tête : que le champagne soit toujours disponible et qu’il soit toujours désirable », ajoute David Chatillon. En injectant 10 millions d’euros supplémentaires dans le budget annuel du Comité Champagne, passant de 20 M€ à 30 M€ (une hausse financée par les contributions des professionnels champenois), la filière fixe un cap bien défini des dépenses à engager en priorité.

« Un nouveau site de R&D redimensionné verra le jour en 2025 », souligne le président de l’UMC. « Ce nouveau site permettra d’augmenter la superficie du laboratoire de 40 % et accueillera des équipements de pointe comme une nouvelle cuverie expérimentale redimensionnée, une salle de dégustation deux fois plus grande ainsi qu’une nouvelle plate-forme expérimentale d’un hectare ».

La recherche doit aussi permettre de « préserver la typicité et l’excellence des vins de champagne dans un contexte climatique changeant ». Un changement climatique et une préservation de l’environnement que la filière ne découvre pas aujourd’hui, rappelle David Chatillon : « La Champagne a été pionnière en matière de développement durable. En 2003, nous avons été la première filière à faire un bilan carbone (avec Jean-Marc Jancovici) et nous avons réduit nos émissions de C02 de 20% par bouteille depuis plus de 15 ans. Par ailleurs 63% des surfaces viticoles champenoises sont aujourd’hui certifiées ».


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Forte de ce bilan auquel on pourrait ajouter le traitement à 100% des effluents vinicoles et de plus de 90% des déchets industriels, la filière accélère encore et annonce un plan carbone particulièrement ambitieux : « Nous visons le Net Zéro Carbone d’ici 2050 ». Réduction des émissions (-75% en 2050), développement des puits de carbone, et compensation des émissions incompressibles en dernier recours (possiblement à hauteur de 7%) devraient permettre à la filière d’y parvenir, à la fois par ses actions collectives et individuelles.

Pour Maxime Toubart, « il ne s’agit pas de répondre uniquement à l’évolution des demandes des consommateurs ; il s’agit d’assurer la productivité et la pérennité du vignoble champenois ; de concevoir et promouvoir une viticulture en équilibre avec l’écosystème, pour produire une quantité suffisante de raisin de qualité. Telle est l’ambition de ce plan de la filière et le cap que nous nous fixons ».

Protection de l’appellation

Mais pour continuer à rayonner dans le monde entier, la Champagne doit aussi veiller à protéger son image et son appellation. C’est l’un des éléments majeurs de la stratégie de l’interprofession sur laquelle insiste David Chatillon : « La Champagne du futur est une Champagne plus rayonnante », avance-t-il. « C’est pourquoi nous avons décidé de sanctuariser un budget d’un million d’euros par an consacré à la protection de notre appellation. Pour accompagner la protection du Champagne à travers le monde, le Comité a déjà déployé des Bureaux dans 9 pays et prévoit d’en créer deux nouveaux au Canada et en Scandinavie d’ici 2025. »

« Nous changeons d’échelle », poursuivent les deux co-présidents du Comité Champagne, qui insistent sur la nécessité de toute la filière de poursuivre les efforts ensemble. « L’investissement que nous réalisons incarne la Responsabilité Sociétale de notre filière, c’est une priorité absolue pour que le champagne reste un vin d’exception, porté par une filière unie, responsable et engagée. C’est un nouvel élan au service de nouvelles ambitions pour notre appellation et notre terroir ».