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RE 2020 : l’UNICEM Grand Est partage les objectifs mais pas la méthode

Alors que la RE2020, nouvelle réglementation environnementale pour la construction des Bâtiments neufs, doit entrer en vigueur au 1er janvier 2022, les membres du Bureau de l’UNICEM Grand Est, représentants des entreprises qui exploitent des carrières pour la production de granulats et de roches pour la construction et des entreprises qui transforment ces ressources minérales en béton ou briques, dénoncent fermement la méthode retenue quitte à assumer des positions à contre-courant.

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RE 2020 : l’UNICEM Grand Est partage les objectifs mais pas la méthode

Car, si en tant qu’industriels responsables, ils soutiennent l’ambition politique, sociétale et environnementale, de baisser l’empreinte carbone des bâtiments, y compris pour ce qui les concernent, celle de la production des matériaux minéraux, ils déplorent un dogmatisme des pouvoirs publics en faveur du bois dans la construction, matériau consacré au rang de remède à tous les maux.

Une idéologie aux racines solides puisqu’elle trouve sa source dans la Stratégie Nationale Bas Carbone qui prévoit une multiplication par 8 entre 2015 et 2050 de la production de bois de structure. L’effet attendu : le stockage à long terme du carbone contenu dans le bois au sein des constructions, n’est en rien neutre car les émissions associées aux prélèvements de bois dans les forêts ne sont pas comptabilisées ; ainsi, pour obtenir 1 m3 de bois destiné à la construction, il faut extraire 20 m3 de bois de la forêt dont 80 % serviront pour des usages à faible durée de vie d’un an (papier, bois énergie etc…) – c’est ainsi que l’objectif de stocker du carbone dans la construction impliquera progressivement un accroissement des émissions de CO2 et réduira notablement le rôle de puits de carbone des forêts, destinées à être substituées par des « champs d’arbres » jeunes et peu captants.

Symbole de cette promotion outrancière, l’introduction d’une nouvelle méthode de calcul dite d’Analyse de Cycle de Vie Dynamique simplifiée qui, souffrant de rigueur scientifique, confère un avantage injustifié au bois dans la RE2020 et donc dans les constructions de demain.

Pour Rémy Moroni, président de l’UNICEM Grand Est, « le bois a toute sa place dans la construction sans qu’on ait besoin de le doper virtuellement. La compétition entre matériaux doit être équitable, sans quoi on trompe le consommateur et qu’importe le maître d’ouvrage, qu’il soit public jusqu’au particulier ».

Pour l’UNICEM Grand Est, le choix de favoriser le bois dans la construction ne passe donc plus car il repose sur un concept erroné - celui de la neutralité carbone de la filière bois – mis en exergue, depuis peu par des études et des communications scientifiques. Elle en appelle à une autre voie pour décarboner la construction, celle qui donnera confiance en l’avenir pour susciter les investissements à la hauteur des enjeux, celle qui s’appuiera sur la recherche et l’innovation pour développer la performance de chaque matériau, celle qui mettra au cœur des réflexions la conception des ouvrages pour placer le bon matériau au bon endroit, celle qui fera la part belle à la mixité des matériaux.

Pour Rémy Moroni, « si on ne choisit pas cette voie, alors on risque de n’avoir finalement aucune filière performante à l’horizon 2050 ». Il rappelle notamment que : « les carrières et les matériaux de construction qui en sont issus garantissent l’emploi de ressources locales et de proximité qui met le secteur de la construction à l’abri des effets de la mondialisation ; or, l’actualité nous montre à quel point la filière bois est soumise à une concurrence internationale effrénée et dont les effets (disponibilité, prix) se font sentir actuellement sur les chantiers en cours ».

Et de poursuivre : « Aujourd’hui, nous sommes des lanceurs d’alerte car nous ne voulons pas engager les générations futures sur un chemin hasardeux ; c’est la raison pour laquelle nous engagerons, avec le soutien de nos syndicats et dans l’intérêt de la France, des recours administratifs contre la RE2020 ». Et de clore : « le seul mérite de la RE2020 aura été de participer à une acculturation accélérée de l’enjeu carbone des solutions constructives que nous proposons. Dès lors, nous sommes résolument engagés à les faire connaître ».