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Colère des agriculteurs : la régulation des marchés agricoles est la seule réponse !

Agriculture. Partout en Europe, les agriculteurs manifestent leur exaspération, ils n’en peuvent plus d’être entre le marteau et l’enclume.

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Photo d'un agriculteur prenant du blé
(Crédit : Freepik)

Le marteau des normes sociales et environnementales les plus élevées au monde et l’enclume de la concurrence déloyale des importations et de prix imposés par plus puissants que soit. Cette situation est intenable, mais nous devons faire le bon choix : celui de la régulation des marchés et non celui de la remise en cause de la transition vers des modes de production plus durables.

Après avoir touché des sommets il y a à peine 18 mois, les prix du blé dévissent sérieusement : ils sont passés de plus de 350 euros/tonne à moins de 180 euros/tonne aujourd’hui. Et personne ne peut savoir où cette chute s’arrêtera. Qui accepterait que son chiffre d’affaire ou son salaire soient divisés par deux sans réagir ?

Pour le blé, le prix plancher européen existe toujours mais, à 101 euros/tonne, il est beaucoup trop bas et ce n’est pas les aides de la PAC qui représentent environ 30 euros/tonnes qui vont amortir grand-chose. Le contraste avec les Etats-Unis a de quoi laissé songeur : outre Atlantique, les Farmers sont assurés de recevoir 202$/tonne car des aides, qu’on appelle « anticycliques », sont versées pour compenser les prix quand ils descendent sous ce seuil. Nous, en Europe, on verse la même somme, que les prix soient hauts ou bas. Cela n’a pas de sens.

« La régulation doit revenir à la mode et la Champagne est l’exemple le plus probant que cela fonctionne ! »

La régulation doit revenir à la mode et la Champagne est l’exemple le plus probant que cela fonctionne ! Collectivement, via les différentes institutions champenoises, on régule les surfaces, on régule les rendements et on régule même le partage de la valeur grâce aux recommandations du CIVC sur le prix du raisin. La réserve qualitative participe également à la régulation en rendant disponible des volumes les années où la vendange est catastrophique.

Fruits de compromis sociaux entre le vignoble et les maisons, savamment bâtis par plusieurs générations de responsables syndicaux et politiques depuis l’après-guerre, cette régulation assure la prospérité de notre territoire. Nous savons ce que nous devons à ces choix visionnaires et nous avons la responsabilité, collectivement, de défendre et de faire vivre ce système ingénieux. Les progrès, autant en savoir-faire pour la qualité du produit qu’en faire-savoir pour son image, profitent à l’ensemble des acteurs de la filière, il est donc tout à fait normal que la valeur ainsi créée soit équitablement partagée entre ceux qui la produisent.

La solidité de la régulation champenoise doit nous permettre de poursuivre l’engagement pris au début des années 2000 vers l’adoption de pratiques plus durables. C’est notre intérêt de nous y tenir, sans confondre vitesse et précipitation, pour que la transition se fasse sans heurts via l’acceptation de tous.