Humeur

Seul en scène

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Benjamin Busson
Benjamin Busson.

Le pouvoir isole. Pas un acteur ni un observateur de la scène politique contemporaine ne se risquerait à affirmer le contraire. Le pouvoir isole et, quand il s’exerce au plus haut niveau de l’Etat, cela peut atteindre des proportions vertigineuses, au point d’en perdre toute notion de temps, d’espace, voire de réalité. Le constat n’est pas nouveau, il ne doit pas non plus en être fait le reproche aux concernés, qui doivent tenter de rester au contact de la réalité, tout en étant (sur)protégés, entourés et conseillés.

Très conseillés. Un équilibre loin d’être évident. N’échappant pas au syndrome qu’ont bien connu ses prédécesseurs à des degrés divers, Emmanuel Macron semble donc s’être lui aussi enfermé dans cette tour d’ivoire élyséenne, plus encore dès le début de son second quinquennat. L’épisode de la nomination officieuse de Catherine Vautrin au poste de Premier ministre et son rétropédalage au profit d’Elisabeth Borne semble avoir lancé comme un symbole de renoncement le quinquennus horribilis du président. Majorité relative, réformes poussives, popularité en chute libre, atermoiements à la chaine... Jusqu’à ce 9 juin 2024 et cette dissolution surprise si décriée. Une décision sous la forme d’un coup de poker de la part d’un joueur n’ayant plus de bonnes cartes en main mais qui compte sur un dernier coup de bluff et sa bonne étoile pour renverser la situation.

Lâché en rase campagne par son ancien Premier ministre, snobé par ses propres députés qui effacent son nom de leurs affiches et même tancé par son ministre de l’Economie depuis 7 ans qui dénonce les conseillers "cloportes", le Président se prépare sans doute à trois années de solitude de plus. Car même en cas de victoire inespérée de son camp, au vu de l’humeur de ses troupes, c’est presque à une cohabitation qu’il devrait s’attendre.