L’affaire donne des sueurs froides au plus haut sommet de l’Etat. Alors que depuis la crise du Covid, l’Exécutif brandit la souveraineté industrielle du pays comme un étendard, la volonté de Sanofi de se débarrasser de sa division Santé Grand Public sonne comme un affront.
Car cette branche du géant pharmaceutique comprend le Doliprane, symbole du médicament grand public vendu sans ordonnance, avec des chiffres qui ont de quoi donner le tournis, avec près de 450 millions de boites vendues chaque année. Déclarée pas assez rentable pour le groupe Sanofi, la branche ne comprend pas que le Doliprane, on y retrouve aussi la très célèbre Lysopaïne ou le Maalox, bien connus des habitués des maux de gorge et d’estomac. Une activité qui réalise « seulement » 5,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires par an pour un résultat estimé à 1,2 milliard. Inutile de préciser que bon nombre d’entreprises hexagonales aimeraient présenter de tels ratios avec un produit qui, s’il ne présente pas d’intérêt thérapeutique majeur, est devenu un indispensable du quasi-quotidien, ce qui en fait une valeur sûre.
Au-delà des questions d’emploi soulevées par cette cession, on assiste à une financiarisation de plus en plus aiguisée et surtout assumée du monde pharmaceutique, où se pressent les fonds d’investissements en recherche de rentabilité sous couvert de se concentrer sur l’innovation. On en peut évidemment contraindre une entreprise privée à faire preuve d’un altruisme exacerbé. Mais alors qu’on demande de plus en plus aux citoyens de consommer local, français et responsable, ce genre d’annonces laisse un goût amer quant à la volonté de ces groupes de manifester un soupçon de civisme économique largement à leur portée.