Expert-comptable, troyenne, Virginie Vellut multiplie les représentations, les mandats, les conseils et se challenge au quotidien. Élue au Conseil national de l’Ordre des Experts-comptables, elle occupe la fonction d’assesseur au bureau national, siège à la commission administration et finances, est vice-présidente d’ECS, expert-comptable service, un satellite chargé d’organiser les événements de l’Ordre. « Je suis aussi présidente de la commission secteurs marchands de l’Ordre et je fais régulièrement des auditions à Bercy. Il s’agit pour le ministère d’avoir des remontées de terrain avec notre regard de professionnels. Il y a des commissions permanentes entre l’Ordre et Bercy et nous sommes écoutés. »
Dernièrement, Virginie Vellut était consultée sur une réforme des tickets restaurant, sur les mesures de simplification, la prise en charge des entreprises en difficulté, la facture électronique. La présidente de l’Ordre, Cécile de Saint-Michel participe aux échanges avec les cabinets de Bruno Le Maire et du Premier ministre sur les réformes en cours et sur tout ce qui touche la sphère de l’entrepreneuriat.
« Je rencontre des personnes que je ne n’aurais jamais rencontrées en d’autres circonstances et je vois comment fonctionnent les services de l’État. J’ai besoin de me poser des questions et de benchmarker sur d’autres façons de faire. Et je suis arrivée dans les instances parce que cela me paraissait naturel, j’ai été formée ainsi. Le cabinet se trouve ainsi un peu aux avant-postes de ce qui va se passer, des évolutions métiers, des évolutions législatives, etc. Intellectuellement, c’est très intéressant parce que je travaille sur des sujets de prospective ou des sujets réglementaires. »
Bilan, une entreprise et de multiples mandats
Virginie Vellut affiche une carrière à contre-courant. Entrée comme stagiaire au Cabinet BDS associés en 1988, elle y reste, passe son diplôme d’expert-comptable en 1995 et devient associée du cabinet un an plus tard en même temps qu’elle devient maman de jumeaux. « J’ai été éduquée professionnellement par Maurice Buat et Martine Le Corre qui sont mes inspirateurs. Ils me disaient de développer le cabinet mais aussi de m’investir dans les instances ». Au décès de Martine Le Corre, Virginie Vellut reprend la présidence de l’Ordre des Experts Comptables. En 2021, elle passe un Master à Dauphine en évaluation, financement et transmission d’entreprise. Puis elle crée un pôle d’accompagnement du dirigeant et y implique une collaboratrice.
Aujourd’hui, Virginie Vellut va encore plus loin et, à 57 ans, elle s’inscrit à l’IAE de Lyon en Master d’ingénierie patrimoniale pour conseiller les entrepreneurs sur les différentes options qu’ils peuvent prendre à certains moments de leur vie, avec le meilleur montage, la meilleure forme de société ou le meilleur départ à la retraite. La relation aux clients évolue. « Je n’ai pas fait huit ans d’études pour juste présenter des chiffres à des personnes. J’ai envie de voir des clients qui ont une vraie demande, à qui je peux conseiller des choses et leur parler de comment on fait, de comment on finit sa carrière, comment on peut arrêter peut-être un peu plus tôt tout en gagnant correctement sa vie. Aujourd’hui les clients sont usés et épuisés de batailler avec les augmentations de coûts. Je suis étonnée de voir le nombre de chefs d’entreprise qui décident de vendre leur société parce qu’ils en ont juste ras-le-bol. Nous vivons dans un contexte géopolitique stressant, un contexte national aussi et il faut faire avec. »
« J’ai vraiment besoin de me challenger et de sortir de ma zone de confort. »
Covid, Ukraine, hausse des prix matière, hausse de l’énergie plombent le moral des entrepreneurs qui ont le sentiment qui ne reprendront jamais le dessus. Présidente de la commission des finances à la Chambre de commerce et d’industrie de l’Aube, Virginie Vellut se trouve aux premières loges de l’évolution du monde du travail. « Globalement, les bilans que l’on sort au cabinet sont plutôt bons. Il y a une dégradation des marges et de la trésorerie qui subit les coûts matières, les coûts salariaux, mais nous avons dans le département de belles entreprises. » Des entreprises qui ont profité de la période Covid pour revoir leur modèle économique et qui ont bien réagi.
« Au café de la création, je ne vois que des auto-entrepreneurs. Cela permet à des personnes de s’installer alors qu’elles ne l’auraient jamais fait autrement. C’est l’évolution de l’entrepreneuriat. Il y a quand même beaucoup d’entreprises profitables et rentables. Les métiers du bâtiment ont de beaux résultats alors que l’activité est censée être en berne, l’alimentaire avec de belles marges, la métallurgie… Je dois dire que c’est aussi le talent du chef d’entreprise, son travail, sa capacité à réfléchir, à être à l’écoute. »
Un ascenseur social incroyable
Administratrice du Réseau Entreprendre, Virginie Vellut voit aussi passer de nombreux projets de créations. Elle a décidé de soutenir les étudiants via un accord entre BDSA et la Technopole de l’Aube.
« Nous proposons un tarif à la limite du bénévolat aux étudiants créateurs de startup la première année. Je trouve qu’il y a une belle dynamique. Il faut qu’on soit dans la compréhension de l’évolution des modèles ». Si les startups ne sont pas profitables au début parce qu’il s’agit d‘idées à développer, cela permet au cabinet de se confronter à de nouveaux types d’entreprises.
« J’ai reçu un héritage et il faut que je le transmette. Je viens de remettre la Médaille Grand Or à l’une de mes collaboratrices, ce sera sûrement la dernière ! Expert-comptable, dit comme cela, ça ne fait pas rêver, il y a une méconnaissance du métier. Pourtant, c’est un ascenseur social incroyable. Les étudiants peuvent passer leur diplôme sans quitter Troyes à l’IUT, être en alternance. Il y a huit ans d’études dont trois comme salarié stagiaire. Ce diplôme permet d’accéder à un métier qui permet de gagner correctement sa vie. On devrait attirer du monde. L’intérêt dans cette profession, c’est qu’avec le diplôme, nous pouvons flécher en fonction de ce qui nous plaît. »
Le cabinet compte 160 salariés et forme une quinzaine d’alternants. « Les jeunes ont besoin de sens dans leur travail. L’alternance est une formidable invention et je me dis que c’est le seul moyen de recruter. Les jeunes ont des idées qu’on n’a pas, une autre vision. Cela bouscule nos certitudes et nous fait progresser ».
Aujourd’hui, BDS compte 9 associés et a doublé le nombre de collaborateurs depuis les années 90 avec 160 salariés répartis dans les cabinets de Troyes, Bar-sur-Seine, Auxerre, Sens et Paris. « Chacun peut développer son domaine d’appétence. Maintenant je voudrais proposer de la gestion patrimoniale. » C’est pourquoi, à la rentrée, Virginie Vellut reprendra le chemin de l’école pour y passer son Master en ingénierie patrimoniale et additionner de nouvelles compétences.