À 38 ans, celui qui est le plus jeune directeur d’usine du mastodonte automobile Stellantis, est également à la tête du plus gros employeur industriel de Champagne-Ardenne : une fonderie employant 1 800 personnes, réalisant un chiffre d’affaires de 250 millions d’euros, livrant un million de pièces par mois à ses clients (usines de moteurs, de boîtes de vitesse et de véhicules) et qui fêtera ses 50 ans en 2024.
« Dans les Ardennes, depuis ma prise de fonctions, j’ai trouvé des salariés motivés et impliqués », souligne Sébastien Rouaud qui, en janvier 2023, a succédé à Patrice Peslier à la tête du site Stellantis (ex-PSA).
Cette unité fabrique différentes pièces de liaison au sol en fonte et aluminium (trains, berceaux, traverses arrières) mais aussi des culasses, sa spécialité, des pivots, boitiers différentiels, collecteurs, longerons, vilebrequins et, depuis 2022, les carters de machines électriques.
« Nous travaillons pour les différentes plateformes de Stellantis et souhaitons, à l’avenir, œuvrer pour les futures structures qui émergeront dans les prochaines années. Avec la montée en cadence en 2023 de la production de carters, notre objectif est d’avoir un maximum de projets sur la partie électrique de manière à réduire l’impact de la baisse des moteurs thermiques », précise Sébastien Rouaud.
Le nouveau venu compte aussi développer l’économie verte avec la pose de 9,3 hectares de panneaux photovoltaïques mais aussi réduire substentiellement les coûts énergétiques grâce à l’installation d’une pompe à chaleur ainsi qu’à de nouvelles solutions destinées à mieux isoler l’usine.
Début chez PSA en Chine
Après avoir vécu très jeune dans le monde ouvrier, puisque ses parents étaient opérateurs dans des entreprises de fabrication, Sébastien Rouaud a passé l’essentiel de son temps libre, outre ses études, dans le sport en pratiquant le football et la course à pieds.
À 17 ans, il effectue un raid humanitaire de 6 000 kilomètres vers le sud du Maroc en participant au 4L Trophy. Grâce aux 6 000 euros récoltés auprès de mécènes, des fournitures scolaires sont remises à des classes sous-équipées.
Une fois son bac obtenu en 2005, « attiré par la mécanique industrielle et scientifique » et parce qu’il désire aussi suivre l’exemple de son frère, il intègre l’école d’ingénieurs généralistes EIGSI de La Rochelle.
Après avoir fait ses premiers pas chez Manitou en Chine et Faurecia en Allemagne, il débute sa carrière à PSA Peugeot-Citroën en juillet 2008, comme lean manufacturing manager à Wuhan (Chine) où il effectuera la dernière année de son cursus universitaire en alternance.
« Là-bas, j’ai d’abord effectué un stage dans une nouvelle usine de peinture et puis en volontariat international en entreprise dans un site d’assemblage. C’était une époque où PSA s’installait et créait de nouvelles usines dans un pays qui souhaitait avancer, accélérer et se développer. »
« Cette expérience a été un vrai tremplin professionnel qui m’a aussi permis d’apprendre la langue et la culture chinoise. »
Cette mission s’est finalisée par la signature d’un CDI, synonyme de retour en France. En 2010, à 23 ans, il devient opérateur, moniteur, chef d’équipe et responsable de groupe de fabrication des Peugeot 206 et 308 à Mulhouse.
« Cette étape m’a familiarisé avec les bonnes pratiques, l’assemblage en pleine cadence de production et le management en encadrant jusqu’à 200 opérateurs ».
Un CV impressionnant
Ensuite à l’occasion d’une joint-venture, Sébastien Rouaud a l’opportunité de repartir en Chine, cette fois à Shenzen et Shangai. De 2012 à 2016, il participe à la création d’une nouvelle usine de véhicules au poste de chef de projet industrialisation des DS 5 LS et DS 6.
« Par la suite, j’ai aussi effectué des missions auprès des fournisseurs chinois et des concessions de la marque DS afin d’augmenter la qualité et la livraison des pièces en utilisant la méthode du lean manufacturing. »
En 2016, il réussira en outre, le tour de force de terminer son MBA, commencé à HEC puis au HKUST Hong Kong University mené en alternance avec son travail : le démarrage à Paris de la DS 9. « J’ai rejoint les équipes de développement comme responsable de lancement industriel de cette nouvelle grande berline. »
Il complètera sa vision d’ensemble de responsable de fabrication à trois endroits : Mulhouse (novembre 2016-décembre 2018) avec la fabrication des châssis en étant à la tête de 550 personnes ; à Valenciennes (janvier 2019-février 2021) avec la production de transmissions manuelles (un million de transmissions par an) en manageant 1 000 employés ; et enfin à Paris, où chez Stellantis, entre 2021 et 2023, il devient responsable de la performance et de l’excellence opérationnelle de 29 usines powertrain.
« Je mesure la chance que j’ai eu d’avoir travaillé pour de grands constructeurs automobiles. Ce qui m’a permis d’effectuer différents métiers en fonction de mes envies personnelles. Ce parcours m’a aussi fait rencontrer des personnes de diverses nationalités et de différents horizons. »
Depuis cette année, à Charleville-Mézières, le trentenaire a trois challenges à relever. « À court terme, assurer la qualité et la livraison de l’ensemble de nos pièces auprès de nos clients, à moyen terme réussir l’ensemble des projets actuels comme la montée en cadence des carters de machines électriques pour arriver à 1 million et 200 000 pièces en 2025 après un investissement de 22 millions d’euros chaque année, et le lancement de nouveaux pivots et de nouvelles cornes. Et à long terme travailler sur la stratégie de l’usine pour concevoir de nouvelles pièces à forte valeur ajoutée. »
Quand il s’évade du travail, Sébastien Rouaud passe son temps auprès de son épouse et de son enfant d’un an tout en se préparant à courir le marathon de Prague, programmé au début du mois de mai.