

« Ma passion pour l’aviation remonte à l’âge de 6 ans. À l’époque, dans le jardin de la maison familiale, j’assistais aux nombreux survols d’avions postés dans les bases aériennes de Dijon, Luxeuil, Reims, Metz, Nancy, Saint-Dizier et Colmar. Les mirages passaient régulièrement au-dessus de moi. Cela m’a donné l’envie d’être un jour pilote de chasse ».
Sébastien Maillard entretiendra cette passion précoce en pratiquant l’aéromodélisme. « J’achetais des avions en balsa en les faisant voler avec une télécommande ». Plus tard, après avoir passé avec succès un bac scientifique au lycée Kleber de Strasbourg, il suivra une classe préparatoire scientifique préparant à une école d’ingénieurs. Malheureusement, une vision chromatique déficiente l’empêchant, très légèrement, de distinguer les couleurs, le prive d’une éventuelle sélection.
Il met un terme aux cours de calculs et mathématiques, aux matières scientifiques et à la physique nucléaire ainsi qu’à son rêve de devenir officier et pilote de chasse dans l’armée de l’air ou l’armée navale. « Je me suis alors rabattu contre mon gré sur des études universitaires plus classiques en décidant de passer un DUT Génie industriel et maintenance puis un autre en manière accélérée en techniques de commercialisation ».
Cette double casquette obtenue à l’Université de Strasbourg lui permet de postuler à un poste de technico-commercial auprès de différentes entreprises. En 2002, il entame sa carrière professionnelle chez Eberlé à Reichstett. « Une entreprise qui m’a permis de travailler à l’export lointain en vendant des équipements industriels, des lignes de productions de tubes et de cornières. Ce qui m’a amené aux États-Unis, au Japon, en Chine, en Arabie Saoudite, à Singapour et en Malaisie durant près d’une décennie. Cela m’a offert une riche ouverture humaine et culturelle. Durant cette période, j’ai aussi constaté que sur ce type de marchés, la technique de vente était presque secondaire. Il était surtout primordial de connaitre les coutumes de ces différents pays pour négocier au mieux avec la clientèle ».
« Grâce à cet avion, on veut démocratiser l’accés aux vols à des pilotes amateurs. »
La naissance de son premier enfant en 2010 amène Sébastien Maillard à revenir définitivement en France en stoppant cette expérience d’export au long cours « peu conciliable avec une vie de famille ».
À partir de là, il opte pour le télétravail en oeuvrant sur le territoire national pour des entreprises étrangères, expertes en électronique embarqué. Comme Ermi Electronique, fabricant de connecteurs haut de gamme pour l’industrie électrique et le groupe hollandais Kendrion, spécialiste en mécatronique proposant des solutions de haute performance pour un large éventail d’applications industrielles. Et aussi PTR Hartmann, société proposant des solutions innovantes dans le secteur des composants et des technologies de tests.
Touches sérieuses avec l’armée de l’air italienne
« Avec ces différents postes, j’ai évolué dans des domaines enrichissants et très techniques et été en contact avec des clients comme Alstom, Thales, Safran, Sagem, Dassault Aviation, Siemens, Schneider Electric, Comotec. Mais, après avoir complètement perdu de vue l’univers aéronautique, j’ai voulu y revenir en m’appuyant sur mon profil technico-commercial. »
Sébastien Maillard se renseigne donc sur les petits constructeurs aéronautiques en aviation légère. « Il faut être introduit sur ce type de marché et, heureusement, au cours de ces recherches, j’ai eu la chance d’entrer en contact avec l’ingénieur aéronautique italien Pasquale De Rosa, basé près de Rome et fort de 40 ans d’expérience de prestataire dans ce milieu. Après de nombreux contacts téléphoniques, on s’est rencontrés en juillet 2023. Vite en harmonie sur différents sujets, on est devenus amis. Il a accepté de se charger de la partie ingénierie et d’activer son réseau. Dans la foulée, j’ai donc décidé de créer SMD Aero ».
Avant-même la commercialisation de ces avions, la start-up carolomacérienne a entamé des négociations fructueuses avec des distributeurs au Canada et en Afrique du Sud mais surtout, via le consortium avec l’armée de l’air italienne qui veut remplacer sa flotte d’avions d’entraînement. « Si ces tractations aboutissent, l’avenir immédiat de SMD Aero serait quasiment garanti avec au minimum une quinzaine de kits à produire par an », indique Sébastien Maillard qui compte aussi sur d’autres sources de revenus : revente motorisation et avionique, services d’assemblages, maintenance et services après-vente.
Innovation inédite
C’est un projet totalement inédit dans les Ardennes. La start-up se destine en effet à la conception et à la fabrication d’un avion léger biplace en tandem, doté d’un turbopropulseur de 250 chevaux, unique sur le marché. Cette SAS est en phase de lancement des premiers prototypes.
« Notre idée est de proposer aux titulaires d’une licence de pilote une turbine sur un avion qui a le format de ceux existant dans les aéro-clubs, lesquels utilisent des engins équipés de moteurs à pistons. Cette turbine présente plusieurs avantages : elle est plus efficiente, moins sensible à la température, a un fonctionnement équivalent en été et en hiver et est peu sensible aux variations d’altitude. Par ailleurs, nos turbopropulseurs s’inscrivent dans une aviation plus écologique grâce à l’utilisation du carburant jet ou de synthèse, neutre en carbone et offrant même une compatibilité future avec l’hydrogène », explique Sébastien Maillard.
SMD Aero n’en est encore qu’aux premiers balbutiements précédant le passage à la construction de ses aéronefs : dessins des futurs avions, finalisation des plans, R&D, calculs aéronautiques, démarches auprès des autorités, recherche de sous-traitants en tôlerie fine, montage financier et ultimes tests avant les essais en vol.
Différentes cases à remplir avant de trouver dans les Ardennes un site d’assemblage des pièces du HF1.1 « Hobby Falcon », nom de baptême donné aux premiers exemplaires qui seront déployés en trois kits différents à des prix allant de 75 000 à 300 000 euros. Capable d’atteindre une vitesse maximale de 380 km/h, l’aéronef sera d’une envergure de 8,75 m et d’une masse au décollage de 750 kg.
« Nous sommes encore en fonctionnement start-up mais toutes ces étapes sont impératives pour asseoir les bases de notre entreprise et être compatible avec les cadres réglementaires fixés par l’Otan et le marché civil et militaire mondial. Il ne faut pas se précipiter. Une fois que l’on aura passé cette période et que nous aurons trouvé la meilleure façon de produire, l’entreprise aura plus de visibilité et aspirera alors à grandir. La suite ne sera pas figée car nous avons déjà de bons retours de clients potentiels. On sait aussi pouvoir s’appuyer sur un marché de niche très dynamique et la croissance régulière de la construction amateur », projette le fondateur.