Native de Charleville-Mézières, Isabelle Titeux a passé sa jeunesse à Vrigne-aux-Bois « au milieu de diverses entreprises industrielles comme La Fonte Ardennaise, Mécano Galva et Jardinier Massard » avec des parents tous deux instituteurs dans cette commune.
« J’ai vécu une adolescence classique. Parallèlement à mes activités scolaires au Collège Pasteur de Vrigne-aux-Bois, je faisais aussi de la musique au Conservatoire national de musique de Charleville-Mézières où j’ai suivi pendant une dizaine d’années des cours de clarinette ».
Mise en pratique des mathématiques
Après avoir obtenu en 1987 un bac C (scientifique) au Lycée Chanzy, Isabelle Titeux rallie Reims et l’UFR Sciences de l’URCA pour y passer successivement un DEUG, une licence et une maîtrise de mathématiques. Lors de cette dernière année, en 1991, elle effectue durant deux mois un stage aux Mureaux (Yvelines) au sein du département informatique de « L’Aérospatiale » (aujourd’hui AirbusGroup et ArianeGroup), structure qui englobe des techniques scientifiques comme l’aéronautique et l’astronautique.
« Ce fut mon premier contact professionnel avec le monde de l’industrie. J’y ai travaillé sur des programmes informatiques traitant de problèmes physiques et notamment sur la résistance thermique des fuselages de fusées lors du retour sur terre par des navettes habitées. Pour moi, c’était la mise en pratique vraiment concrète des équations mathématiques. Cela servait à quelque chose. Ce fut donc une expérience extrêmement intéressante ».
Major de promotion
« À la suite de cette expérience très enrichissante, j’ai eu plusieurs choix possibles. J’ai finalement opté pour un Diplôme d’Etudes Approfondies (DEA) en mécanique théorique, correspondant à une deuxième année de Master Recherche, à l’université Pierre et Marie Curie de Paris car j’aimais beaucoup les maths et leurs applications (modélisation et simulation numérique des phénomènes physiques, mise en équation de tous les phénomènes mécaniques, solides rigides ou déformables, fluides...) C’était donc une suite logique pour moi ». Major de sa promotion, la jeune provinciale se voit alors proposer dans la foulée un sujet de thèse de doctorat pour suivre son parcours sur la modélisation mathématique du comportement des plaques minces laminées sous différentes sollicitations, à Paris.
Maître de conférence à l’IFTS….
À la fin de sa thèse, Isabelle Titeux est contactée par Lucien Rimlinger, le directeur de l’Institut de Formation Technique Supérieure (IFTS), une composante de l’Université de Reims spécialisée dans les nouvelles technologies et le génie des matériaux, située à Charleville-Mézières. « Il était à la recherche d’un enseignant chercheur en mathématiques appliquées qui puisse s’investir dans les Ardennes. Je répondais au profil et c’était pour moi une bonne opportunité de revenir à mes origines et dans le berceau local. D’autres postes m’avaient aussi été proposés à Paris et Orléans mais revenir dans les Ardennes, c’était d’une certaine façon répondre au sens du devoir en donnant un coup de main à mon département ». En 1996, Isabelle Titeux devient donc enseignant chercheur à l’Université sur un poste de maître de conférences à l’IFTS qui laissera ensuite place à… l’EiSINe. Elle y enseigne bien sûr les mathématiques appliquées au service d’étudiants qui se destinent à l’industrie dans les filières de sciences des matériaux et génie des procédés. Tout en travaillant pour la recherche à Reims dans un groupe de mécanique des structures.
« Lors de ma première expérience au sein de l’Aérospatiale (ex-ArianeGroup), j’ai constaté la mise en pratique vraiment concrète des équations mathématiques. »
Six ans plus tard, elle rejoint l’UFR Sciences Exactes et Naturelles au Moulin de La Housse à Reims « où j’avais accès au laboratoire pour pouvoir me consacrer un peu plus à la recherche et étoffer ce registre » tout en travaillant toujours comme maître de conférences. « J’ai assisté Véronique Carré Ménétrier comme directrice adjointe en charge de la pédagogie et de la formation tout en travaillant sur la modélisation des ouvrages maçonnés en génie civil ».
… puis à l’IUT de Reims et Charleville
En 2006 elle passe son habilitation à diriger des recherches et postule à des postes de professeur d’université. En 2009, elle en obtient un à l’IUT de Reims dans le département de génie civil où, là encore, elle enseignera les mathématiques appliquées, par exemple pour faire des plans de bâtiments, des raccordements de routes ou des coûts de construction. Comme un département HSE (Hygiène Sécurité Environnement) était en cours de création, elle rallie l’antenne de l’IUT située à Charleville-Mézières dont elle deviendra vite une cheville ouvrière au côté du chef de département. « Il fallait vulgariser les choses pour les rendre plus visibles et attrayantes et persuader les apprenants de l’intérêt que représentent les mathématiques dans leur futur métier de responsable sécurité ». À son panel habituel, elle ajoutera des mathématiques pour les techniques de commercialisation (finances, statistiques, représentation quantitative pour faire du marketing…).
Enfin en 2023, à la demande de Guillaume Gellé, le président de l’URCA de l’époque, Isabelle Titeux revient à l’EiSINe, l’Ecole d’Ingénieurs en Sciences Industrielles et Numérique, toujours sur le Campus Sup Ardenne. Depuis février 2025 et après un long parcours dans l’enseignement supérieur, l’Ardennaise, estimant « avoir fait la boucle », devient directrice de l’EiSINe, l’école d’ingénieurs ouverte sur le Campus Sup Ardenne mais bi-sites avec Reims, créée en 2019 « suite à une volonté des élus et des industriels locaux de former des ingénieurs dans les Ardennes ».
« Cette école propose des formations adaptées aux enjeux actuels de la transition industrielle et numérique en formant des ingénieurs capables de répondre aux besoins locaux de toute la chaîne de production. Depuis la conception de la pièce jusqu’à l’implémentation d’un process dans l’usine tout en s’occupant de la maintenance, de la distribution et même du recyclage », précise la directrice en évoquant ce cercle vertueux.
Les formations dispensées aux 480 étudiants par une cinquantaine d’enseignants-chercheurs sont liées aux matériaux, à la mécaniques, la robotique et ouvrent à des licences, licences professionnelles, masters et des spécialités d’ingénieurs qui recrutent dès le bac avec des classes préparatoires intégrées. « À l’EiSINe, on sort environ 48 ingénieurs tous les ans ».
« Durant toutes ces années, j’ai eu la chance d’avoir de bonnes opportunités et des responsabilités importantes à assumer. Que ce soit à l’UFR Sciences de Reims, sur le Campus Sup Ardenne où j’ai été vice-présidente de l’université durant neuf ans en servant de relais entre les personnels de l’Inspé, de l’IUT et de l’EiSINe, la présidence de l’université et les collectivités locales. Beaucoup de gens m’ont fait confiance et je pense avoir fait mes preuves à tous ces postes », conclut cette mère de trois enfants. Pour l’ensemble de son parcours, Iasbelle Titeux a récemment été nommée au grade de Chevalier dans l’Ordre national du mérite par le Ministre de l’enseignement supérieur de la recherche et de l’espace.