Guillaume Bonvalet n’a pas de famille dans le monde du champagne. Il n’a pas non plus hérité de vignes. Et si au départ il ne prétendait pas monter une Maison de champagne, ni même une marque, le Marnais a toujours eu cette volonté et cette envie de créer quelque chose.
Il a aujourd’hui concrétisé son rêve d’entreprendre dans le champagne. Avec son épouse, Pauline, ils sont aujourd’hui à la tête d’une Maison de champagne à Pierry, à quelques kilomètres d’Épernay.
Après avoir passé son enfance en région parisienne, dans l’Oise puis à Beauvais, Guillaume Bonvalet a vécu à Reims et en Champagne.
« Puis j’ai fait une grande partie de mes études en alternance, car cela avait pour moi du sens d’être à la fois à l’école, pour la théorie, et en entreprise pour la mettre en pratique », fait-il valoir. Pendant son cursus à l’IUT de Reims, où il se spécialise en techniques de commercialisation, il deviendra ainsi le premier alternant dans une grande maison de champagne.
C’est avec en poche un diplôme d’études supérieures commerciales du CNAM ( Conservatoire National des Arts et Métiers) et un master de l’École Supérieure de Commerce de Paris qu’il passe une admission parallèle pour entrer en 2012 à l’École spéciale militaire de Saint-Cyr, pour une formation d’officier de réserve de haut niveau. « Je n’ai pas continué dans l’armée active. Je suis resté en réserve opérationnelle. Et j’ai postulé à différents postes du monde du champagne », relate Guillaume.
Il sera d’abord embauché chez Laurent Perrier puis dans d’autres structures, avec un parcours plutôt tourné vers les vins et spiritueux. « C’était un rêve depuis toujours de travailler dans ce monde-là », confie le passionné. Et d’expliquer que c’est en tombant sur une publicité de l’Instant Taittinger, en classe de seconde, qu’il a eu comme une révélation : « À partir de là, je n’ai eu de cesse de m’intéresser à l’univers du champagne ».
Des débuts difficiles
Pour atteindre son rêve, il s’investira corps et âme, pendant de nombreuses années. D’abord comme stagiaire ouvrier dans des grands groupes, puis comme alternant dans des petites maisons de champagne. Avant d’intégrer les grandes maisons, toujours par l’alternance. « Petit à petit cette accointance a fait que j’ai voulu découvrir, au-delà du monde de l’effervescent, également les vins tranquilles en travaillant dans un grand domaine de la vallée du Rhône. J’avais vraiment besoin de faire ce parcours initiatique avant de créer quoi que ce soit », estime-t-il.
En plus d’acquérir de l’expérience, Guillaume Bonvalet se crée ainsi de facto un réseau dans le monde du champagne et dans les autres régions viticoles. « La famille Pereyre de Nonancourt m’a d’ailleurs soutenu dans ma démarche auprès du CIVC (Comité interprofessionnel du vin de Champagne) qui m’a permis au début d’entreprendre dans le monde du champagne », se souvient-il. Ses débuts ne seront cependant pas des plus faciles.
Ni son quotidien des plus valorisants. Il n’a alors pas de bureau, dort dans sa petite voiture commerciale. « Je faisais livreur, commercial, je m’occupais du service après-vente, je faisais des dégustations. Je faisais tout. Je sais d’où je viens. Maintenant qu’on fait quelques dizaines de milliers de bouteilles, c’est sûr que ça change. Mais c’est vraiment une démarche, une entreprise, dans laquelle le départ n’a pas été simple. Je me suis sacrifié pendant des années et des années financièrement. Mais je n’ai pas regretté, aujourd’hui le jeu en vaut la chandelle », observe le dynamique entrepreneur.
« Les premières bouteilles que j’avais vinifiées, j’ai pu les vendre. J’ai mis toutes mes économies sur la table. Mais je n’arrivais pas à décrocher de prêt. Les banques, pour certaines, m’ont ri au nez »
Il sera finalement suivi par sa banque : « Cela m’a permis de mettre le pied à l’étrier et de mettre à nouveau sur la table tout ce que j’avais mis de côté pour construire un bâtiment, avoir une cuverie, des chais, une zone de vieillissement… Et, parallèlement, de me bagarrer pour les approvisionnements, de convaincre les vignerons qui livraient dans les structures dans lesquelles il n’y avait pas forcément une valorisation de leur travail. Toute une aventure ».
En 2014, deux ans après avoir créé sa marque, Guillaume Bonvalet sort ses premières bouteilles. Avant de, petit à petit doubler les volumes. Jusqu’au moment où il s’avérera que Guillaume Bonvalet n’est plus en mesure d’être seul dans cette aventure entrepreneuriale. En 2017, Pauline, son épouse, qui a une formation à l’international, rejoint l’entreprise. « Elle avait une carrière toute tracée dans un grand groupe international », fait-il remarquer. En s’associant, ils progresseront sur bon nombre de sujets, grâce à leur complémentarité.
« Elle m’accompagne administrativement et techniquement sur pas mal de choses et formalise tous les dossiers financiers et j’en passe », explique Guillaume qui se charge, quant à lui, du développement et de la stratégie commerciale de la structure. En 2022, ils ont vendu 80 000 bouteilles de champagne, avec un marché tourné à 80 % vers l’export – dont la Scandinavie, toute l’Europe du Nord, l’Asie.
Deuxième phase du projet
Pour Guillaume Bonvalet, le monde de la viticulture ne peut se dissocier de celui de la distillation.
Fin 2022, leur maison de champagne lance une activité de revalorisation de sous-produits vinicoles. Pour cela, Guillaume a suivi une formation de distillateur et co-conceptualisé une machine avec un constructeur d’alambic. Dès cette année, la distillerie Bonvalet produira ainsi des spiritueux avec et sans alcool (gin, vodka, whisky, fine et eaux-de-vie de fruits) à partir de produits bio sous valorisés.
« En réalité, on est dans un monde où l’on s’inscrit dans une urgence environnementale. On est membres du collectif Économie circulaire Grand Est, membres des Suivis conventionnés par la Protection des Ressources en eau et on est suivis aussi par la Région Grand Est par un nombre d’entités dans lesquelles j’ai une démarche proactive ».
L’an dernier, la livraison de l’alambic représentait ainsi l’accomplissement de tout un travail et d’une volonté de s’inscrire à la fois dans le retraitement des sous-produits bio – les trois quarts de l’activité en distillerie – et de retraiter pour des opérateurs, des vignerons, des structures un peu plus grandes, sans toutefois concurrencer les acteurs les plus importants qui retraitent en Champagne, des gens voulant du sur-mesure.
Ils voulaient également avoir leurs bases éthyliques neutres pour faire leurs bases de spiritueux. « Avec une volonté de travailler en circuits courts avec des opérateurs locaux, des viticulteurs champenois, des agriculteurs, des arboriculteurs. L’objectif étant d’avoir un panel complet d’activités qui est un cercle vertueux ».