Voilà trente ans, Fabrice Provin créait Âge d’Or Services, la première société privée d’aide aux personnes âgées à domicile. C’est après avoir acheté en 2002 et restauré pendant plus de dix ans le château marnais de Bignicourt-sur-Saulx, qu’il y a créé en mars dernier le premier séjour pour les aidants familiaux de France. « C’était important pour moi d’offrir à ces personnes qui s’occupent sans relâche soit d’un enfant handicapé, soit d’un conjoint malade, trois jours dans une demeure historique pour souffler », explique le président de la SAS Relais du Bien-être.
Depuis 2014, il conçoit et réalise ainsi des séjours à taille humaine, uniquement dans des demeures historiques, avec pour thèmes l’accompagnement du deuil, repartir du bon pied après un cancer ou encore la prévention du burn out… Et si Fabrice Provin a déjà un beau parcours, celui-ci n’a cependant pas été un long fleuve tranquille. « Depuis mon démarrage dans la vie professionnelle, j’ai toujours vécu de ma passion, au contact des personnes âgées et des personnes handicapées ».
Fabrice Provin se souvient que cette passion remonte à l’âge de 12 ans, lorsqu’il aidait les personnes âgées de son quartier. Une professeure ne comprenait pas qu’il ait un agenda déjà bien rempli pour un élève de sixième : « En fait, je notais tous les rendez-vous de façon à n’oublier aucune des courses pour les personnes âgées ». Avec en poche un BAC G2 et un DUT Gestion des Entreprises et Administrations, il entame en 1989 une année de spécialisation. Avant de décider d’arrêter ses études. « J’avais créé mon entreprise et j’avais trop de travail car je me suis retrouvé propulsé par une importante exposition médiatique », explique le créateur d’Âge d’Or Services.
Un beau parcours semé d’embûches
« Comme il s’agissait essentiellement de services destinés à accompagner les personnes âgées en grande partie en voiture, les taxis me sont tombés dessus. J’ai dû attendre 2002 - soit dix ans - pour gagner le procès à la Cour de cassation, avec une jurisprudence à mon nom, “mon lot de consolation” », sourit- il. Il devra d’autre part attendre six ans pour que l’administration reconnaisse son activité comme services déductibles des impôts, étant donné qu’il s’agit d’un service en dehors du domicile. C’est seulement en 1997, qu’il est reconnu comme un service de maintien à domicile.
« En 2005, Jean-Louis Borloo m’a reçu à déjeuner pour me dire officiellement que le terme accompagnement de personnes âgées et handicapées était clairement identifié comme des missions de services à domicile. J’avais déjà vendu l’entreprise à CNP Assurances depuis 2001. Mais j’en étais le directeur général et je défendais l’Âge d’Or comme si c’était moi », souligne-t-il.
« On va se spécialiser dans les thérapies qui vont aider nos participants à vraiment se ressourcer et repartir du bon pied »
En 2005, Catherine Vautrin, alors ministre des personnes âgées, lui remet la médaille de Chevalier de l’Ordre National du Mérite, avec ces mots : « Vous avez parfaitement anticipé l’évolution liée aux personnes âgées, que notre pays a tardé à prendre en compte. Et cette révolution de la longévité, vous l’avez anticipée avec initiative et créativité ». Le discours de la ministre fait écho aujourd’hui encore au côté précurseur de Fabrice Provin qui continue d’innover en matière de services à la personne.
Une demeure historique pour accueillir les aidants
En 2002, Fabrice Provin achète le château – alors abandonné – de Bignicourt-sur-Saulx, près de Vitry-le-François, dans la Marne. Et se lance le challenge de restaurer cette demeure historique : « À cette époque, je ne savais pas que j’allais avoir dix ans de rénovation. Je ne savais pas non plus qu’il s’agissait de la sixième villa palladienne de France… J’ai mis en place des chantiers d’insertion jeunes. Et on a réuni quinze mécènes, de la Marne, pour la plupart ». C’est à l’occasion de cette restauration qu’a été signée la première convention de mécénat affecté spécifiquement à un monument historique. « C’est devenu en 2011 le chantier en mécénat le plus important de la région, d’un montant de 500 000 euros », fait valoir Fabrice. « Une fois la restauration du château terminée, en 2015, nous avons décidé d’y créer des chambres d’hôtes ».
Mais avec une âme pétrie de valeurs humaines, Fabrice Provin n’a pas tardé à se dire que le château pouvait avoir une autre destination. « J’ai pensé que ce serait bien de profiter d’une demeure historique pour accueillir des personnes étant à des moments difficiles dans le travail, dans la vie de tous les jours, la maladie... », explique le passionné. Après en avoir parlé avec ses partenaires historiques, il a bâti un projet sur l’accompagnement du deuil, dans un premier temps, qui sera validé par AG2R La Mondiale. Fort de son succès, le projet permet de réaliser trois séjours en 2015. « Et on s’est retrouvés à faire trente séjours en 2019. Nous avons créé la même année le premier séjour sur l’après cancer. Nous sommes les seuls sur le Grand Est à le faire aujourd’hui », observe le précurseur.
« On va se spécialiser dans les thérapies qui vont aider nos participants à vraiment se ressourcer et repartir du bon pied. »
Le premier séjour de proximité pour les aidants familiaux de France est créé en mars 2021. « Ces séjours rencontrent un succès incroyable. On est déjà dans l’Aube, les Ardennes, la Haute-Marne et la Meuse. Pour les aidants, nous faisons intervenir une sophrologue pour gérer le côté émotionnel. Nous proposons de la gymnastique adaptée, deux massages – réflexologie plantaire et shiatsu. Pour l’après cancer, nous faisons appel à une socio-esthéticienne de Reims », détaille-t-il, avant d’ajouter : « On va se spécialiser dans les thérapies qui vont aider nos participants à vraiment se ressourcer et repartir du bon pied ».
Ces séjours de proximité individualisés sont d’ores et déjà reconnus par plusieurs départements. L’agence nationale des chèques vacances reconnaît d’ailleurs l’initiative et finance une partie du séjour pour les participants : « Il faut savoir que l’on a des gens parmi les aidants familiaux notamment qui ne sont pas partis en vacances depuis plus de dix ans. Nous partons du principe que le participant n’a pas à payer le séjour car on touche à la santé publique. C’est légitime qu’une mutuelle, une caisse de retraite ou un département veuille bien le financer ». Le dynamique président de Relais du Bien-être passe d’ailleurs l’essentiel de son temps à trouver des financements. « Mais je suis content aujourd’hui. C’est vraiment important pour moi ».