Alexandre Fauvet
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Alexandre Fauvet

Sa vie est un terrain de jeu international

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Photo de Alexandre Fauvet
A 56 ans, le nouveau capitaine du Coq Sportif vit à 100 à l’heure. (Crédits : MBP)

Alexandre Fauvet est né avec une raquette de tennis dans la main. Il a longtemps renvoyé la balle à son ami Cédric Pioline, mais son terrain de jeu préféré reste l’entreprise dans un environnement international. À 56 ans, associé de Dan Mamane, repreneur du Coq sportif, le nouveau capitaine de la marque auboise vit à 100 à l’heure pour sauver la marque qui a failli disparaître après le faste des Jeux Olympiques et la faire chanter à l’international. « Nous voulons une équipe capable de gagner, pour qu’un jour, nous puissions jouer la Champions League. C’est un pan du patrimoine qui ne peut pas s’écrouler et un objectif collectif ».

Enfant et étudiant, Alexandre Fauvet arpente les courts de tennis en équipe de France et les terrains de football. « J’ai commencé le tennis à deux ans quand j’ai pu tenir une raquette ! J’ai grandi dans le tennis avec Cédric Pioline, on est de la même année. Lui a fait ensuite ce parcours exceptionnel et moi non ! J’étais plus passionné par le foot et le rugby. Je savais que je n’allais pas faire carrière dans le sport ». Peut-être pas une carrière sur un court, mais le sport a toujours jalonné sa vie.

Après un master en gestion et économie à la Sorbonne, il rejoint la mission économique et financière comme coopérant puis attaché commercial au ministère de l’Économie en Corée du Sud. « J’ai eu la chance d’arriver au moment où la France vendait le TGV. J’étais dans le pôle industrie à Séoul pour trouver des partenaires industriels pour les entreprises françaises autour du projet TGV. Cela a été extraordinaire et magique de pouvoir me frotter à une culture très éloignée de la nôtre. C’était la première fois que je mettais les pieds en Asie ». Mais pas la dernière. Bernard Lacoste, le fils aîné du tennisman et fondateur de la marque éponyme, marié à une Japonaise, vit la moitié de son temps au Japon.

« Être dirigeant d’entreprise, c’est aussi dur qu’être un sportif de haut niveau. »

Il lui demande de prendre la responsabilité de la marque en Asie. « C’est le début de ma carrière chez Lacoste qui durera 15 ans. Un fabuleux apprentissage ». Après un voyage en Amérique du Nord avec Bernard Lacoste, il récupère aussi la zone Amériques pour trouver les partenaires commerciaux « pour le textile, mais également pour tous les autres produits stratégiques comme le pilotage des licences chaussure maroquinerie ou parfum. J’y ai appris la construction et la gestion d’une marque pour qu’elle soit cohérente, tant sur le plan produit, distribution que communication. J’ai eu beaucoup de chance de voyager partout dans le monde avec Bernard Lacoste qui a fait de sa marque une marque mondiale ».

Des raquettes au ski

Quand en décembre 2012, Lacoste est racheté par Devanlay, Alexandre Fauvet quitte le groupe et se met en quête d’un nouveau projet avec l’objectif de répondre aux nouveaux modes de vie en mouvement. « On a plutôt tendance à porter des sneakers que des chaussures en cuir parce que finalement, nous marchons beaucoup, faisons du vélo en ville, prenons le métro, les transports en commun… Mon constat, en 2012, est de dire qu’en réalité, nos vestiaires ne sont pas adaptés à nos nouveaux modes de vie. Alors, je pars sur cette idée d’un vestiaire technique, mais urbain ». À Annecy en 2012, Fusalp ne va pas bien. Il y a 30 personnes dans l’entreprise qui réalise 6,2 millions d’euros de chiffre d’affaires. Alexandre Fauvet décide de reprendre la société avec Sophie et Philippe Lacoste, les neveux de Bernard Lacoste. « Nous en avons fait une jolie marque internationale avec, dix ans plus tard, des filiales aux États-Unis, en Corée, en Grande-Bretagne, en Norvège, en Espagne… Aujourd’hui Fusalp réalise la moitié de son chiffre à l’étranger ». La marque, dont Alexandre Fauvet est toujours actionnaire, génère aujourd’hui 65 millions d’euros avec 350 personnes. Un terrain propice à des synergies, d’autant que l’associé majoritaire du Coq Sportif, Dan Mamane, est également propriétaire d’Ogier, marque de luxe de vêtements de ski. « Atterrir aujourd’hui au Coq Sportif, c’est une forme de continuité naturelle de mon parcours ». La connexion avec l’entreprise s’est faite via le fonds d’investissement Mirabaud Patrimoine Vivant, de l’ancien ministre Renaud Dutreil qui l’encourage à conseiller Marc-Henri Beausire, alors directeur du Coq Sportif en 2024. Alexandre Fauvet, qui a remonté la pente de Fusalp et Dan Mamane, qui a sauvé les meubles de Conforama, se positionneront pour la reprise du Coq Sportif et arrivent à la tête de l’entreprise auboise en juillet dernier.

Capitaliser sur le savoir faire

« Il y a un savoir-faire dans la maison, il faut capitaliser dessus en développant des produits techniques. Nous voulons inventer l’entreprise de demain, comme un sportif qui veut pousser ses performances au maximum ». Alors la dynamique est impulsée auprès des 177 salariés et la vision déployée. Modernisation de l’outil de gestion, recrutement, repositionnement de la marque avec la reprise du logo des années 1980 avec le Coq dans le triangle pour mieux franchir les frontières – « aux États-Unis, ils l’adorent ! » – et l’objectif de faire 50 % du chiffre à l’international dans quatre ans. Le Coq travaille sur une vraie gamme pour la femme dans l’esprit « athleisure » qui combine le streetwear et le gymwear. « L’heure est à la stabilisation des équipes, nous ne mettrons surtout pas la charrue avant les boeufs. Comme en sport, tout est une question de bon timing. J’aime m’entourer de gens plus forts que moi dans leur domaine, ce qui signifie que j’apprends et que nous progressons individuellement et collectivement. Être dirigeant d’entreprise, c’est aussi dur qu’être un sportif de haut niveau. Vous n’avez pas de répit. J’y pense tout le temps ».

Alors, si Alexandre n’a pas le temps d’aller à la pêche, « son petit truc », il se recentre chaque matin en pratiquant une demi-heure de yoga avant de commencer son marathon quotidien.