Le plaidoyer vibrant de la Cour d’Appel de Reims pour la défense de l’État de droit
Justice. Si la récente audience solennelle de la Cour d’Appel de Reims a été l’occasion de présenter officiellement sept nouveaux magistrats, elle a permis au Premier Président, Christophe Regnard, et à la Procureure Générale, Dominique Laurens, de faire un point sur l’actualité du ressort mais aussi de réaffirmer le rôle de la justice dans la défense d’un État de droit.

En accueillant le nouveau Préfet de la Marne, Romain Royet, la Procureure Générale insiste sur l’actualité de leurs sujets communs : la lutte contre le blanchiment, celle contre le proxénétisme et la prostitution dans les salons de massage, la délinquance routière, la mise en oeuvre de la nouvelle loi sur les homicides routiers et la coordination entre les pouvoirs administratifs et le judiciaire, la nouvelle loi sur le narco-trafic, sans oublier la dynamique à poursuivre sur les comités locaux d’aide aux victimes, notamment les enfants et les victimes de la route.
Dominique Laurens : une justice au service de la démocratie
Une cérémonie d’installation qui marque le renouvellement de l’engagement collectif au service de la justice et de la société et que précise Dominique Laurens : « Pour certains, c’est une grande première, l’entrée d’un magistrat dans une nouvelle juridiction est toujours un moment d’émotion, de joie et de fierté pour ces collègues qui rejoignent ici leur premier poste après leur prestation de serment. Pour d’autres qui sont à un moment charnière de leur carrière, cette cérémonie représente de nouveaux engagements, de nouvelles responsabilités, un nouveau positionnement au sein de notre institution ».
Une cérémonie qui est aussi un moment de satisfaction pour la Cour d’Appel de Reims, avec des effectifs qui se stabilisent, remarque Dominique Laurens, et reviennent à l’étiage nécessaire pour un bon fonctionnement, même si des ajustements sont encore nécessaires comme c’est le cas pour le parquet de Charleville-Mézières ou celui de Châlons-en-Champagne. Propos prémonitoires ? La Procureure Générale conclut son intervention : « Nous allons vivre une fin d’année où nous devrons à nos concitoyens le courage de nos institutions, le courage de nos engagements, le courage de tenir bon et de ne pas nous laisser emporter par le défaitisme ambiant, le courage de résister à ces menaces qu’expriment les extrémismes ».
Christophe Regnard, un hommage à une cour d’appel exemplaire
Abordant quelques sujets d’actualité, le Premier Président, Christophe Regnard, acte la création de deux postes de conseiller, faisant passer le nombre de magistrats du siège de 21 à 23, outre les 6 juges placés, et mentionne ce progrès : chaque chambre dispose désormais d’un attaché ou d’un assistant de justice. Christophe Regnard mentionne un fait nouveau : « La mise en place de mesures d’intéressement par la création d’enveloppes supplémentaires sur les budgets de proximité au bénéfice des juridictions ayant le plus amélioré leurs résultats depuis deux ans ». Une Cour d’Appel exemplaire ? « Nous aurons du mal à faire mieux, les chiffres étant excellents, les stocks bas et le délai de traitement, pour tous les contentieux compris entre 6 et 10 mois, soit un tiers de moins que la moyenne des juridictions similaires à la nôtre et moitié moins que la moyenne nationale ».
Bémol et non des moindres mentionné par Christophe Regnard avec l’état du contentieux criminel : « Si nous parvenons encore à gérer la situation de l’Aube et des Ardennes, nous sommes inquiets de l’audiencement criminel dans la Marne, le nombre de dossiers en stock nous conduisant à ne quasiment plus pouvoir juger les dossiers des accusés libres, ou à le faire dans des délais peu raisonnables, malgré l’augmentation en 2025 du nombre et de la durée des sessions ».
Trop de laxisme ou trop d’incarcérations ?
La sagesse budgétaire s’invite aussi dans les débats et la Cour d’Appel de Reims rationnalise les dépenses engagées au titre des frais de justice. Y passe les frais de téléphonie et les dépenses inutiles, comme par exemple celles inhérentes au gardiennage des véhicules sous scellés. En mentionnant l’état de la population carcérale, un taux d’occupation qui n’excède par 110% dans son ressort, Christophe Regnard juge honteux le cliché d’une justice et des juges laxistes. En référence au projet de loi SURE, il s’interroge : « Les ultra courtes peines sont par nature dé-socialisantes, la réduction du sursis simple, voire sa suppression, le rétablissement des peines planchers qui ont démontré leur inefficacité il y quelques années pour réduire la délinquance, ne pourront que conduire à une augmentation du nombre de détenus ».
Quant aux atteintes à l’État de droit en France et dans le Monde, le Premier Président réitère sa pensée : « Nous devrions être concernés et consternés par les mesures de rétorsion des Etats-Unis à l’encontre de la Cour pénale internationale… Par les mises en cause désormais régulières du Conseil constitutionnel ou de la Cour européenne des droits de l’homme sur le thème du pseudo gouvernement de juges… Faisons très attention à ce qu’en France, ce phénomène déjà présent dans la bouche de certains ne vienne emporter notre État de droit, dont je souhaite vraiment parce qu’il conditionne la vie en démocratie, ne pas vivre son crépuscule ».