35 heures travaillées : requalification en contrat à temps complet !
Travail. Confronté à une pénurie de main-d’oeuvre inquiétante, l’employeur doit inéluctablement s’appuyer sur son personnel existant pour pouvoir faire face à la reprise d’activité amorcée depuis quelques mois. Par voie de conséquence, il peut être tenté, voire contraint, de demander plus d’heures de travail à ses salariés, tout en se conformant à un cadre juridique complexe non sans certaines rigidités, étant rappelé que la durée légale du travail demeure toujours fixée à 35 heures.
L’équation n’est pas simple, comme le rappelle une décision récente de la Cour de cassation en matière de temps partiel (Cass. soc. 15-9-2021 n° 19-19 563 FS-B, H. c/Sté Entreprise privée de sécurité). L’affaire concernait un agent de sécurité, engagé à temps partiel pour une durée de travail mensuelle (comme il est d’usage dans le secteur de la sécurité), limitée à 50 heures, en novembre 2014. Ayant accompli 36,75 heures de travail sur une seule semaine du mois de février 2015, il saisit la juridiction prud’homale afin d’obtenir, à compter de ce mois, la requalification de son contrat de travail à temps partiel en un contrat de travail à temps complet.
Le salarié se prévalait des dispositions légales (aujourd’hui codifiées sous l’article L. 3123 – 9 du code du travail) selon lesquelles, dès lors que le salarié en temps partiel atteint les 35 heures hebdomadaires, son contrat est susceptible d’être requalifié en contrat à temps complet. Toute la difficulté résidait alors, pour les juges, à décider si, lorsque la durée du travail du salarié à temps partiel est fixée mensuellement, les dépassements s’apprécient sur le mois (151,67 heures) ou bien sur la semaine (35 heures).
Pour rejeter la demande de l’agent de sécurité, la cour d’appel de Riom retient que, dès lors que la durée du travail du salarié était fixée mensuellement, la réalisation, durant une semaine, d’un horaire supérieur à la durée légale hebdomadaire, alors que l ’horaire mensuel ( 50 heures) demeurait inchangé, ne pouvait pas entraîner la requalification de son contrat à temps partiel en contrat à temps plein. Ce raisonnement, bien que parfaitement « mathématique » a été censuré par la Cour de cassation. Selon la haute cour, la durée légale du travail doit systématiquement s’apprécier dans un cadre hebdomadaire pour les salariés à temps partiel.
Requalification de contrat
En l’espèce, l’agent de sécurité ayant travaillé 36,75 heures pendant une semaine en février 2015, le contrat de travail à temps partiel devait être requalifié à temps complet, à compter de cette date. Notons que la Cour de cassation, au travers cet « arrêt de principe », s’appuie sur une autre règle particulièrement sévère qu’elle avait déjà posée, selon laquelle si les heures complémentaires effectuées par un salarié à temps partiel ont pour effet de porter, fût-ce pour une période limitée à un mois, la durée de travail de l’intéressé au-delà de la durée légale, la requalification de son contrat en un contrat à temps plein est justifiée et doit intervenir à compter de la première irrégularité (Cass. soc. 17-12-2014 n° 13- 20 627 FS-PB : RJS 3/15 n° 225 ; Cass. soc. 27-9-2017 n° 16-13.926 F-D).
Il va sans dire que cette décision jurisprudentielle rappelle que le statut du travailleur à temps partiel, est particulièrement protecteur pour le salarié. Ajoutons à ce titre que la rédaction du contrat nécessite une attention particulière, et doit impérativement fixer la répartition des horaires, sous peine là encore, de risque de requalification en contrat à temps complet, avec les conséquences financières qu’il entraîne pour l’employeur.