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Vendanges 2024 : la Champagne prend ses responsabilités

Champagne. Préparer, sécuriser, réagir. Voici donc le triptyque avancé par la filière Champagne pour élaborer son plan d’action destiné à sécuriser les vendanges à court, moyen et long terme.

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Photo d'un contrôle lors des vendanges
Les responsables du Comité Champagne ont demandé au Préfet le renforcement des contrôles lors des vendanges. (Crédit : Archives - BB)

Devenues une priorité à la suite de la vendange 2023 au cours de laquelle plusieurs personnes sont décédées, les conditions d’emploi des travailleurs saisonniers- et en creux les pratiques de certaines entreprises prestataires de services - font aujourd’hui l’objet d’un plan d’action élaboré par l’interprofession et présenté le jeudi 20 juin.

Dès octobre 2023, au sortir de la récolte, un groupe de travail interprofessionnel associant Vignerons et Maisons a été mis en place par le Comité Champagne sous l’égide du préfet de la Marne. Toutes les parties prenantes y ont participé : services de l’État, services de l’inspection du travail, Mutualité Sociale Agricole, France Travail, établissements d’enseignement supérieur, prestataires de services, syndicats de salaries et organismes de prévention. Pendant plusieurs mois, une centaine de réunions de travail ont été organisées autour de quatre chantiers prioritaires : les conditions de santé et de sécurité au travail, l’hébergement, le recrutement et la prestation de services, avec une vigilance toute particulière portée sur la sécurisation de la relation entre le donneur d’ordre et le prestataire de services.

Santé et sécurité d’abord

Le Comité Champagne, emmené par ses deux co-présidents, David Chatillon et Maxime Toubart, a donc œuvré pour redéfinir et consolider les normes et les standards applicables à tous les professionnels de la filière, en amont de la vendange mais aussi au cours de celle-ci.

Avec une priorité affichée : les conditions de santé et de sécurité des travailleurs saisonniers. Cela passe en premier lieu par la mise à disposition des employeurs et des saisonniers, de guides et outils dédiés à la prestation de services, à l’hébergement collectif ainsi qu’à la santé et à la sécurité. Cette année, un livret d’accueil dédié aux vendangeurs a été ajouté à la palette d’outils pour les informer à la fois sur leurs droits et sur les règles de sécurité à suivre. Outre la mise en place d’un référentiel de bonnes pratiques (qui, présenté sous la forme d’un autodiagnostic, préconise les pratiques qui constituent des engagements supplémentaires allant au-delà des exigences légales et réglementaires), le Comité Champagne, le SGV et l’UMC, ont signé une convention de partenariat collective avec les Services Départementaux d’Incendie et de Secours et les Unions Départementales des sapeurs-pompiers du territoire pour assurer la formation des personnels qui encadrent les vendangeurs. Enfin, le Comité Champagne veut s’appuyer sur son réseau en local pour assurer une veille territoriale. « Les relais locaux, dont les maires, qui jouent un rôle majeur dans les communes concernées, sont invités à faire remonter les difficultés qu’un travailleur saisonnier pourrait rencontrer, notamment en matière d’hébergement », avancent les co-présidents.

« Concernant la prestation de services, nous avons également pris plusieurs mesures destinées à encadrer cette profession », note David Chatillon. En effet, en plein développement depuis plusieurs années déjà, la prestation de services occupe une place de plus en plus importante en Champagne, notamment au moment de la vendange. Sur les 100 000 vendangeurs accueillis chaque année, l’interprofession estime à environ la moitié ceux qui sont employés par des prestataires de services. Une pratique parfois méconnue et qui peut aussi attirer des personnes peu scrupuleuses du respect des règles.

C’est pourquoi, afin d’encadrer et de sécuriser ces pratiques, plusieurs mesures sont mises en place dès cette année :

« La création de la plateforme Viti-Argos permet au prestataire de s’identifier et de réaliser en ligne l’autodiagnostic de ses pratiques. Elle permet au donneur d’ordre de vérifier le référencement et l’engagement de son prestataire avant de signer son contrat » Un autodiagnostic, annexé au contrat, qui est opposable et qui sécurise donc la relation entre les deux parties. Par ailleurs, le Comité Champagne a encouragé et accompagné la structuration des prestataires en syndicat, réunis au sein de la section “Champagne” nouvellement créée de la Fédération nationale des entrepreneurs des territoires (FNEDT) de la Marne.

Favoriser le recrutement

Le développement de la prestation est d’ailleurs intimement lié à la question de la mobilisation de la main d’œuvre lors des vendanges. Réunir près de 100 000 personnes sur le territoire champenois en une si courte période s’avère de plus en plus compliqué pour les professionnels, Maisons et Vignerons.

« Afin de mobiliser la main d’œuvre locale, nous avons engagé un travail de fond sur l’attractivité de la profession », ajoute Maxime Toubart. « Un partenariat a été signé avec l’Université de Reims Champagne-Ardenne (URCA) pour favoriser le recrutement des étudiants lors des vendanges. Des synergies sont également créées avec Neoma Business School pour diffuser les offres d’emploi auprès des étudiants ». Le président du Syndicat Général des Vignerons annonce également le renforcement du partenariat avec France Travail et la création d’un dispositif expérimental avec les services du Département, pour favoriser le recrutement de personnes éloignées de l’emploi, notamment les personnes bénéficiaires du RSA.

Quant aux mesures à prendre au cours des vendanges, le Comité Champagne l’assure, elles relèvent de l’affaire de tous les acteurs :

« La filière accompagnera également les Champenois durant la période de cueillette, en lien avec les principales instances de contrôle. La filière Champagne a pris ses responsabilités pour le collectif. à chacun, désormais, de prendre sa part de responsabilité. Nous comptons sur la mobilisation de tous pour que les pratiques de chacun soient à la hauteur de l’excellence de notre appellation », avancent Maxime Toubart et David Chatillon.

Une cellule de suivi - instance de partage et de coordination avec la préfecture, les forces de l’ordre, les pompiers et le Comité Champagne - se réunira d’ailleurs quotidiennement pendant les vendanges. « Nous ne pouvons constituer des contrôles et les sanctions relèvent de la prérogative des services de l’Etat », poursuit le président de l’Union des Maisons de Champagne.« Nous avons donc demandé un renforcement des contrôles durant la vendange pour éviter que des situations anormales ne se reproduisent. Le préfet nous a assuré que les moyens nécessaires seraient déployés ». Des contrôles et des sanctions sur lesquels compte la filière pour éradiquer définitivement les pratiques douteuses en Champagne.