Entreprises

Une histoire centenaire pour le fil de Gantois Clôtures

Industrie. L’usine Gantois de Fismes, spécialiste du tréfilage de fils et de panneaux vient de célébrer ses 100 ans. Un anniversaire marqué par la fusion de cinq entités de la maison-mère, Forlam, entraînant pour le site, une future montée en puissance.

Lecture 10 min
Photo de l'usine comportant les lignes de production
Le bâtiment historique de l’usine créée en 1923 abrite toujours les lignes de production. (Crédit : ND)

Les photos en noir et blanc, religieusement conservées par Bruno Montupet, Responsable QSE depuis un an et Responsable technique, travaux neufs et dispositions réglementaires pendant 19 ans à l’usine Gantois de Fismes, témoignent de l’histoire de centenaire du lieu. Au fil des clichés, on voyage dans le temps.

Des premiers bâtiments inaugurés en 1923, à la période de la Seconde Guerre mondiale, où les femmes étaient les seules employées des ateliers, en passant par l’édification de la cité Gantois, hébergeant les salariés, dans de petites maisons individuelles, toutes équipées de jardins. Période faste où, dans les années 50, l’usine a pu compter jusqu’à 300 employés. Aujourd’hui, ils sont 55. La robotisation est passée par là, non seulement pour augmenter la production mais également pour éviter les tâches répétitives et blessantes.

« Nous en sommes à 415 jours sans accident », se félicite Bruno Montupet pour qui la sécurité est la priorité numéro un et compte bien atteindre les 500 jours au mois de décembre.

Il faut dire que les étapes de tréfilage, galvanisation et thermolaquage ne sont pas sans risque... Mais remontons le fil de la chaîne de production du début. Le site de Fismes, qui s’étend sur 4 ha dont 1,8 ha de bâtiments couverts, réceptionne 10 000 tonnes d’acier par an, venues principalement d’Europe.

  • La photo du tréfilage
    1ère étape, le tréfilage. Étirer le fil à froid. (Crédit : ND)
  • Photo des bobines de fils
    (Crédit : ND)
  • Photo des bobines de fil utilisées par les machines
    (Crédit : ND)

« Au début de la chaîne, nous commençons par étirer le fil à froid afin de le faire baisser de diamètre et le calibrer. 20% est utilisé brut et 80% part ensuite en galvanisation », explique le Responsable QSE. La galvanisation consiste à faire un revêtement de zinc en surface afin d’apporter au fil une propriété anti-corrosion.

  • Photo du trempage du fil
    2ème étape, la galvanisation. Le trempage du fil dans un four à 950 degrés puis dans un bain de 50 tonnes de zinc chauffé à 450 degrés. (Crédit : ND)
  • Photo de la galvanisation
    (Crédit : ND)

Une qualité indispensable pour réaliser des clôtures extérieures soumises aux éléments climatiques. Le processus nécessite le trempage du fil dans un four à 950 degrés puis dans un bain de 50 tonnes de zinc chauffé à 450 degrés. « Une fois le fil galvanisé, on le transforme en panneau soudé ou tissé. » Le savoir-faire de l’entreprise intervient ici.

De 11 à 31 M€ de chiffre d’affaires en 10 ans

Car ces opérations demandent une grande technicité. En effet, si au fil des années les chaînes de production ont été robotisées, de nombreuses tâches se font encore à la main, demandant une connaissance pointue des produits fabriqués. Une fois que le panneau est soudé, il part en thermolaquage, c’est à dire qu’il est peint avec une peinture spécifique destinée aux métaux. « Cette production a été installée en 2012, après le rachat de l’usine Gantois par le groupe Experton-Revollier. »

  • Photo des panneaux
    Ces fils deviennent des panneaux. (Crédit : ND)
  • Photo des panneaux
    (Crédit : ND)

Car la destinée de l’usine de Fismes n’a pas été un long fleuve tranquille. Jadis faisant partie du groupe Gantois, créé dans les Vosges à Saint-Dié, l’usine voit le jour sur le site d’une ancienne chapellerie, dont la fabrication est alimentée par une turbine dans la Vesle. Édifiée le long d’une ligne de chemin de fer, des wagons amenaient les matières premières et partaient ensuite avec la marchandise au sein même de l’usine, jusque dans les années 70.

En 2011, le groupe Gantois connaît des difficultés financières et chacun des sites du groupe familial est racheté individuellement. Devant le savoir-faire historique de l’entreprise marnaise, le groupe Experton-Revollier, non seulement le rachète, mais y fait de nombreux investissements. 2,5 millions d’euros pour y ajouter l’activité de thermolaquage par exemple.

Photo du thermolaquage
3ème étape, le thermolaquage. (Crédit : ND)

Le chiffre d’affaires triple alors en 10 ans, passant de 11 à 31 millions d’euros. L’usine, qui produit essentiellement des panneaux rigides (clôtures, serruriers, ondulés et solutions de criblage) développe et étoffe son offre avec un catalogue de 8 000 références.

Un catalogue aujourd’hui appelé à encore évoluer avec la fusion des cinq entités de Forlam, entité créée en 2017 au sein d’Experton-Revollier, devenu le 1er septembre 2023, Forlam Clôture Industrie (FCI) et regroupant en plus de Gantois, les entreprises Cermast (52), Vermigli (83), Girardot (69) et Clofor (38).

« Cette fusion a pour objectif d’harmoniser le fonctionnement du groupe, et surtout de le rendre encore plus performant pour les clients en leur offrant une réponse unique et homogène ainsi qu’un taux de service amélioré », indique Frédéric Agnès, responsable commercial Grands Comptes. FCI devient ainsi la porte d’entrée unique des clients.

Après avoir transité par une plateforme logistique, les clôtures partent ensuite soit chez les distributeurs de matériaux, soit en direct dans des sociétés de pose pour de grands donneurs d’ordre. Mais il serait réducteur de penser que l’entreprise ne fournit que le secteur du bâtiment. En effet, son savoir-faire permet d’alimenter une grande variété de clients.

« Nous fournissons par exemple en produits tissés très finement l’industrie de l’agroalimentaire qui a besoin de panneaux de tamis. » Et le tissage s’effectue sur un authentique métier à tisser avec des fibres d’acier aussi fines qu’un cheveu. Jolie anecdote, Gantois Clôtures fait aussi de « la bordure parisienne », ce fil de fer vert sapin caractéristique, torsadé et en losange, utilisé uniquement dans les parcs et jardins parisiens.

De nouveaux enjeux

Si la société bénéficie de la solidité du groupe et d’une expérience centenaire, elle n’en est pas moins confrontée aux enjeux d’aujourd’hui avec, durant la crise des matières premières, une augmentation de 50% du prix de l’acier. Actuellement, c’est à l’augmentation des coûts de l’énergie que Gantois Clôtures va devoir faire face. En effet, si elle bénéficiait d’un contrat de trois ans avec son fournisseur d’énergie en 2024, elle doit en négocier un nouveau.

« Nous sommes un gros consommateur de gaz, car nos fours marchent à cette énergie. En 2022, nous en avons consommé 9 GW. » Une consommation qui appelle aussi à réfléchir à la décarbonation . Un projet d’installation de panneaux solaires au niveau du groupe est en réflexion et un Carbon Score sur les produits a été mis en place. La création d’une nouvelle aire de déchargement va aussi voir le jour, évitant le passage de 500 camions par an, à l’intérieur de l’usine, entraînant un risque considérable pour les équipes. « Les camions passeront désormais par la route en longeant les bâtiments. »

Photo de la création de la bordure parisienne
Une des particularités de l’usine est de travailler « la bordure parisienne », cette clôture spécifique aux jardins de la ville de Paris. (Crédit : ND)

Quant au recrutement, il reste un des enjeux forts pour Gantois Clôtures. La localisation de Fismes, à 30 km des grandes villes (Reims, Soissons et Laon), reste un frein à l’embauche. Si auparavant, les salariés étaient logés dans la cité édifiée par Joseph Gantois, aujourd’hui, la ville attire moins. Les qualifications aussi, font défaut, faisant de la formation une des clés pour recruter.

Mais l’usine, « à taille humaine avec des valeurs fortes, une histoire et une vraie identité, restent les meilleurs atouts pour donner envie de venir y travailler », confie Bruno Montupet qui y officie depuis 20 ans et compte bien encore faire vivre l’usine au travers de nouvelles photographies y intégrant les aménagements de demain.