Une filière venaison en projet dans les Ardennes
Agroalimentaire. Le territoire ardennais a été retenu site pilote au niveau national dans le cadre d’un projet initié par le Réseau rural français. Ainsi, le Parc Naturel Régional et la Fédération départementale des chasseurs se sont associés pour créer une filière de proximité de valorisation de viande de gibier sauvage.
Partant du principe que jusqu’alors, 80 % de la venaison consommée dans les Ardennes était le plus souvent importée d’Europe de l’Est, de Nouvelle-Zélande et d’Amérique du Nord, le Parc Naturel Régional et la Fédération départementale des chasseurs, aidés par Ardennes Métropole, s’associe afin de créer un circuit local de collecte en se dotant d’un atelier de découpe avant transformation. L’idée étant de transformer, vendre et manger sur place les sangliers, cerfs et chevreuils abattus dans les massifs forestiers du territoire.
Ce projet suscite l’intérêt de toute une filière : bouchers-charcutiers, traiteurs, restaurateurs mais aussi distributeurs et responsables de grandes et moyennes surfaces ainsi que la restauration collective. Futurs approvisionneurs de cette filière, 170 sociétés de chasse ont été consultées sur le sujet, ce qui a permis d’estimer l’offre potentielle à 28 tonnes au long d’une saison. Mais avant de trouver de la viande de gibier 100% ardennais sur les étals, il y a encore plusieurs étapes à franchir.
« Un cahier des charges rigoureux garantira aux consommateurs la traçabilité, le respect des normes sanitaires et la conformité des contrôles vétérinaires. »
En premier lieu, necessité est de trouver des locaux adaptés et fonctionnels pour assurer les meilleures conditions réglementaires, sanitaires et techniques liés à la commercialisation du gibier mais également afin de garantir un prix attractif aux chasseurs et cohérent aux bouchers, restaurateurs et revendeurs. Une étude de faisabilité a d’ores et déjà été confiée au cabinet rémois Agrex Consulting qui devra défricher le terrain en évaluant les besoins des professionnels susceptibles de commercialiser localement le gibier, en définissant les besoins et en chiffrant les travaux et équipements nécessaires pour l’organisation d’une telle chaîne.
« Nous souhaitons accompagner l’augmentation des volumes et profiter du savoir-faire et des connaissances des professionnels pour désaisonnaliser la consommation, en créant notamment des gammes de produits d’été. Tout ce qui se fait avec le porc, le bœuf et l’agneau peut se faire avec la viande de gibier », explique Jean-Matthieu Gonnet, directeur de la Fédération des chasseurs des Ardennes.
La ville de Charleville-Mézières s’est portée candidate pour assurer la maîtrise d’œuvre du projet et la mise en place d’un outil de transformation sur son secteur. « Une demande de subvention sera déposée auprès de la Région Grand Est au titre du projet alimentaire territorial et de la mesure de soutien aux investissements dans les projets alimentaires territoriaux », précise Camille Acedo, chargée de mission pour l’agriculture durable au sein du PNR.
3kg de CO2 émis pour un gibier local
Un local de 700 m2 proche des abattoirs municipaux est déjà convoité par les porteurs du projet pour y installer un atelier de traitement et de découpe agréé qui comprendrait quatre chambres froides pour conserver les carcasses et un immense congélateur pour des stockages collectifs utiles afin d’approvisionner le marché tout au long de l’année.
« Pour ce projet assez unique en France, relate Céline Bavois-Davril, directrice du PNR, un cahier des charges rigoureux garantira aux consommateurs la traçabilité, le respect des normes sanitaires et la conformité des contrôles vétérinaires. »
Ce programme présente un autre avantage non négligeable : il diminuera fortement le bilan carbone : 3 kg seulement de CO2 pour un gibier local contre 17 kg de CO2 pour une viande importée des Etats-Unis (base Carbone établie par l’ADEME en 2015). Rappelons que chaque année, 500 grands cervidés, 6 800 chevreuils et 8 500 sangliers sont chassés dans les Ardennes. Une population de grand gibier qui pourrait encore croître. L’économie ardennaise a donc une bonne carte à jouer dans un domaine où la Belgique limitrophe dispose déjà de filières plus développées qu’en France.