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Transports Lebrun : le colza en attendant l’électrique

Transports. L’entreprise de transports basée à Vauciennes (Marne) poursuit son engagement dans la décarbonation de ses activités grâce à un carburant végétal et teste des véhicules électriques en voie d’une future acquisition.

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Photo Transports Lebrun
Les Transports Lebrun effectuent 1,1 million de km par an au carburant 100% végétal et comptent bien compléter leur décarbonation grâce à l’électrique. (Crédits : BB)

Initiée en 2021, la stratégie de décarbonation des transports de Matthieu Lebrun se poursuit à grande vitesse (tout en respectant les limitations en vigueur sur la route, il va sans dire). Le dirigeant de l’entreprise marnaise Transports Lebrun s’est lancé dans l’aventure du carburant 100% végétal en 2021 et depuis, il n’a de cesse de poursuivre dans cette voie.

Petit rappel historique avant d’aller plus loin : créée en 1971 par son père Jacques, l’entreprise de transports s’est progressivement tournée vers une clientèle de Maisons de Champagne. Une décision logique au vu de sa situation géographique, à quelques kilomètres seulement d’Epernay, la Capitale du Champagne. Que ce soit pour le transport de bouteilles ou de citernes de vin lors des vendanges, l’activité continue de se développer très régulièrement. L’entreprise compte ainsi parmi ses clients les Maisons Lanson, Pommery, Moët & Chandon, Ruinart ou Veuve Clicquot Ponsardin. Ce sont d’ailleurs ces dernières qui, en recherche d’une réduction notable de leur bilan carbone dans le cadre d’une démarche sociétale forte, avaient incité Matthieu Lebrun à réfléchir à des nouvelles idées pour améliorer leur empreinte écologique. Le groupe verrier Verallia, également client important de l’entreprise de transport s’était lui aussi penché sur la question de la décarbonation du transport de ses bouteilles. C’est donc vers la solution de l’Oleo100 (ou B100) - un carburant végétal obtenu à partir d’huile de colza -, que s’est tournée l’entreprise marnaise.

« Au départ, nous avions équipé 20% de notre flotte de véhicules pour voir comment cette nouvelle solution se comportait et aussi comment nos clients la percevaient », souligne le dirigeant.

Du Colza Local

Photo de Mathieu Lebrun
Mathieu Lebrun. (Crédits : BB)

Le B100 présente de nombreux avantages, tant pour le transporteur que pour ses clients. « Il permet une réduction de 60% des émissions de CO2 et 80% de réductions des particules fines », précise Matthieu Lebrun. Un impact écologique plutôt convaincant, au même titre que la provenance du biocarburant qui est issu de colza français, cultivé par des agriculteurs régionaux et produit par le groupe Avril, à 90 km du site des Transports Lebrun, à Mériot (Aube). Un circuit court qui s’ajoute à la traçabilité du colza, dont la partie solide est utilisée pour de l’alimentation animale. Autant d’arguments qui ont fait mouche après des clients du transporteur. « L’ensemble de nos clients ont adhéré et tous ont un volet B100 dans leur marché », souligne Matthieu Lebrun dont 60% de la flotte roule aujourd’hui au biocarburant qui présente un avantage supplémentaire : sa facilité d’utilisation puisqu’il suffit d’installer un boitier qui détecte la présence du B100 dans le camion. Autre intérêt majeur : grâce à cette solution, les véhicules disposent de la vignette Crit’air 1, ce qui leur permet d’obtenir l’autorisation d’accéder au centre-ville des grandes agglomérations soumises aux obligations de la ZFE (Zone à Faibles Emissions). Certes, le B100 est un peu plus onéreux que le carburant fossile et les camions qui l’utilisent consomment un peu plus, mais cela ne constitue pas un frein pour les donneurs d’ordre. « On estime que le B100 engage un surcoût de +3% à +5% mais au regard des réductions d’émissions de CO2 et de particules fines, les clients s’y retrouvent, dans le cadre de leurs engagements sociétaux », note le dirigeant. En effet, pour le secteur du champagne, l’activité transports est le deuxième poste d’émissions de gaz à effet de serre, derrière la verrerie. Agir sur ce levier s’avère donc rapidement efficace au niveau d’un bilan RSE par exemple.

Un Essai Concluant

Actuellement 15 camions sur les 50 que compte la flotte des Transports Lebrun roulent à 100% au B100 et l’entreprise consomme 50 000 litres de ce biocarburant tous les 15 jours. « Nous avons effectué 1,1 million de km au B100 en 2024 », précise Matthieu Lebrun qui poursuit dans la décarbonation en s’intéressant de très près au véhicule électrique.

« Cela faisait un peu plus d’un an que nous suivions de près cette motorisation. Nous avons attendu la levée de certaines contraintes réglementaires (notamment au niveau du poids total autorisé, NDLR) pour aller plus loin et nous avons travaillé sur les flux éligibles et les contraintes. Nous avons fait des essais sur des tracteurs de deux constructeurs en janvier et février pour voir si la pratique correspondait à la théorie et nous avons été agréablement surpris, notamment par l’autonomie réelle qui correspondait à celle annoncée par les constructeurs, soit entre 320 et 350km ». Là aussi, les avantages en termes de réduction de CO2 sont assez conséquents (1,2 kg de CO2 économisé par km parcouru) et les véhicules électriques pourraient être utilisés sur des circuits régionaux effectués en journée.

« Avec cet essai nous sommes passés de la curiosité à la conviction », ajoute Matthieu Lebrun, qui croit en cette énergie, à condition que le pays se dote d’un nombre suffisant de bornes de recharge poids lourds et que les promesses d’autonomie de 500 km annoncées par certains constructeurs se concrétisent. C’est surtout du côté des tarifs que l’arbitrage sera fait, puisque, à l’heure actuelle par exemple, un tracteur électrique coûte à l’achat 2,5 fois le prix d’un tracteur thermique. Avec également des investissements à prévoir pour l’entreprise en matière d’infrastructures, pour installer des bornes de recharge. Quoi qu’il en soit, Matthieu Lebrun se dit prêt à se lancer : « Aujourd’hui, nous attendons qu’un client nous dise qu’il est prêt à nous suivre pour appuyer sur le bouton ».