Entreprises

Serge Febvre : « Le local n’est pas une option »

Commerce. Au cours de la journée des Alliances locales organisées par la Scapest, 230 producteurs locaux viennent à la rencontre des adhérents Leclerc pour échanger et faire des affaires. Du business de proximité qui bénéficie à tous.

Lecture 8 min
Photo de Stéphane Peultier et Wenceslas Fandre
Stéphane Peultier, éleveur en Meurthe-et-Moselle, président de l’APAL et Wenceslas Fandre, patron de l’hypermarché Leclerc Champfleury et organisateur des Alliances locales. (Crédit : BB)

« Le local n’est pas une option, ça n’est pas un souvenir que le consommateur rapporte de ses vacances. C’est une composante de l’offre à part entière et nous voulons que ce soit une vraie alternative à proposer au consommateur », explique Serge Febvre, président de la Scapest, la centrale d’achats et logistique pour les hypermarchés Leclerc et leurs drive de 11 départements, répartis autour de son site de Saint-Martin-sur-le-Pré (Châlons-en-Champagne, Marne).

« Il faut donc qu’on ait un maximum d’offres à proposer en magasin. L’objectif c’est de développer l’offre et le nombre d’assortiments ». Cette philosophie défendue par Serge Febvre se traduit chaque année ou presque par un événement bien connu des adhérents Leclerc mais aussi des producteurs situés dans le champ d’action de la Scapest : Les Alliances locales. Pendant une journée, 230 producteurs et 190 magasins se réunissent à Châlons-en-Champagne où les premiers tiennent des stands, présentant leurs produits aux seconds pour leur donner envie de les référencer dans leurs rayons.

Un concept qui fêtera ses 15 ans d’existence en 2025 et qui, saison après saison, voit le nombre de collaborations se multiplier. « Le local c’est dans l’ADN de nos magasins », souligne le président de la Scapest. Côté producteurs, ils sont venus de l’Aube, la Lorraine, le Nord, les Ardennes, l’Yonne, la Haute-Marne, la Marne et la région parisienne afin de rencontrer ou de continuer à travailler avec les adhérents Leclerc, sur l’ensemble des familles, les produits frais étant les plus représentés (150 producteurs de fruits et légumes sont concernés), l’épicerie ou les liquides étant eux aussi bien positionnés. Et alors que le bio tire la langue et voit ses rayons se réduire comme peau de chagrin, le local fonctionne plutôt bien, voire même très bien : « En 2023, les ventes de produits locaux ont été en augmentation de 18% par rapport à l’année 2022 ».

Fiers de l’économie locale

Pour Serge Febvre, il s’agit à la fois de proposer des produits locaux au consommateur et de soutenir très concrètement les filières de producteurs de proximité, en dehors de toute intervention des pouvoirs publics. « C’est à nous d’agir. Il faut que nous, distributeurs, adhérents et collaborateurs des centres Leclerc nous leur tendions la main et on les aide à avoir des débouchés pour leurs produits. C’est à la fois rendre service au client et au producteur. Il faut être fiers de cette économie locale et valoriser nos territoires en travaillant ensemble », souligne Serge Febvre qui alerte néanmoins : « Il faut rester raisonnable et respectueux dans l’approche des prix, parce que l’économie est compliquée pour nos consommateurs ».

Ardent défenseur des Alliances locales, Wenceslas Fandre, le patron de l’hypermarché de Reims-Champfleury estime que la démarche est gagnante pour tous. « Les Alliances locales, c’est une relation durable qui doit être équilibrée. Pour le producteur, ce sont des délais de paiement réduits, un engagement en volumes sur plusieurs années, une relation personnalisée et une juste rémunération. Pour le distributeur, c’est très simple, c’est du commerce qu’on apprend à l’école : le bon produit, au bon prix et au bon moment. Et pour le client, c’est bon, local, frais et RSE en plus ». En résumé : « Les Alliances locales, c’est mieux qu’une loi : c’est un contrat moral entre deux personnes qui se disent oui », résume-t-il, encourageant producteurs et adhérents à travailler ensemble.

Dans un rayon de 100 km

« Nos producteurs doivent devenir nos ambassadeurs auprès d’autres producteurs car il y a de la place pour tous et il y a moyen de faire de belles choses ensemble », souligne Wenceslas Fandre. « Nous proposons et ensuite ce sont aux consommateurs de faire leurs choix. Mais on s’aperçoit que les gens sont de plus en plus contents de soutenir le local ». Chez Leclerc, le local se définit par un producteur présent dans un rayon de 100 km autour du magasin. Dans la réalité, la distance est souvent bien plus courte. « La plupart des magasins travaillent même en direct avec les producteurs, comme les maraîchers par exemple. Cela nous permet d’être approvisionnés deux fois par jour si besoin. En terme de fraîcheur, on ne peut pas faire mieux ».

Photo de la journée des Alliances locales
Le credo des Alliances locales c’est : « le bon produit au bon prix et au bon moment ». (Crédit : BB)

Avec les éleveurs locaux aussi, les partenariats sont désormais très fréquents, avec des engagements sur des volumes, sur des prix stables garantis et sur une durée de contrat. C’est le cas de la démarche « Les éleveurs du Grand Est », initiée par l’APAL (Association de Production Animale du Grand Est). Eleveur en Meurthe-et-Moselle, Stéphane Peultier est président de l’APAL, qui représente 2 700 éleveurs de la région. Créée en 1995, l’association propose à ses éleveurs de valoriser leurs produits via plusieurs actions, comme avec sa marque « Les éleveurs du Grand Est ». Celle-ci propose des steaks hachés issus d’animaux nés et élevés dans l’un des dix départements de la région. Une proximité garantie, gage de qualité pour le consommateur.

Mais l’intérêt de la démarche ne s’arrête pas là. Elle apporte un soutien de poids aux éleveurs régionaux. « Grâce à cette initiative, nous avons valorisé plus de 12 000 animaux depuis la création de la marque », explique le président. « Les derniers éleveurs de la région ont besoin de vous », adresse-t-il aux adhérents Leclerc.

« La démarche apporte une meilleure rémunération des éleveurs, le maintien d’une économie régionale et la préservation de nos paysages et de nos prairies ». Et à ceux qui opposent élevage, viande rouge et réchauffement climatique, Stéphane Peultier le rappelle : « Il n’y a pas plus de vaches en France aujourd’hui qu’en l’an 1 800 ! » Pour le président de l’APAL, chaque ferme est entourée de 9 emplois induits, de l’amont à la transformation, pour une économie locale, non délocalisable. L’initiative des éleveurs du Grand Est fait l’objet d’un accord tripartite entre éleveurs, abattoirs et magasins pour assurer à chacun une activité régulière dans la durée mais aussi un prix garanti. Le tout à destination du client, quatrième partie de l’accord, qui bénéficie quant à lui d’un produit local, tracé et de qualité.