Michel Soufflet, l’homme qui cultivait les valeurs
Carnet. Michel Soufflet est décédé le 8 septembre. Le Groupe agroalimentaire nogentais est orphelin du visionnaire qui lui a donné sa dimension internationale.
Visionnaire et humaniste, Michel Soufflet, est décédé à 94 ans. L’homme a transformé l’entreprise familiale de collecte de céréales en un groupe agroalimentaire international. Si l’entreprise a été cédée en 2021 au Groupe InVivo, Michel Soufflet continuait de se rendre à son bureau nogentais, comme il le faisait depuis toujours.
L’histoire commence par un petit commerce de grains acheté par sa grand-mère. Autodidacte, Michel Soufflet hérite du sens des affaires de sa mère, Yvonne Juchat, du charisme de son père, Jean Soufflet. Né en 1930, il a 27 ans quand il prend la tête de l’entreprise en 1957, après le décès prématuré de son père. Chauffeur, livreur, manutentionnaire, Michel Soufflet a tout fait. Il a acquis les valeurs du travail sur le terrain. Sur le pont dès 6 h 30, il n’oublie pas la leçon apprise de son père : « résoudre les problèmes, bien ou mal, mais au fur et à mesure ». Alors, il avance. Visionnaire, il développe l’entreprise grâce au négoce et à l’export. Il améliore la collecte des céréales en proposant aux agriculteurs un service d’enlèvement et de transport des grains du champ au silo et construit le silo de Rouen pour conquérir les marchés à l’étranger. En 1970, Michel Soufflet développe les industries de première transformation. Il construit, en 1972, une malterie moderne à Nogent qui marque le pas vers le développement des filières et des futurs métiers qui composeront le groupe. En 1980, Soufflet devient le 3e exportateur français de céréales, l’entreprise s’impose comme un acteur incontournable du développement de l’agroalimentaire en France. L’export monte en puissance de 1980 à 1990.
Nogent-sur-Seine, capitale internationale du négoce de grains
Les années 2000 confirment le passage au statut de groupe international. Sous la conduite de Jean-Michel Soufflet, devenu Président du Directoire en 2001, l’entreprise multiplie les acquisitions dans les secteurs de la meunerie et de la malterie, notamment en Europe. Elle développe également des activités de collecte des céréales. Jean-Michel Soufflet et son père Michel travaillent ensemble et les décisions sont souvent prises autour du traditionnel apéritif du dimanche matin. Avec le rachat en 2014 du groupe Neuhauser, acteur de la boulangerie industrielle, le groupe passe à 7 500 collaborateurs, dont 2 100 à l’étranger et réalise un chiffre d’affaires de 5 milliards d’euros.
Président du Conseil de Surveillance, Michel Soufflet reste attentif à la marche de l’entreprise. La petite boutique de grains est devenue un groupe international de premier ordre qui participe à l’essor de l’agriculture française, à son industrie agroalimentaire et à son rayonnement à l’international. « Michel Soufflet, dont l’histoire se confond avec la ville de Nogent-sur-Seine, a été un très grand capitaine d’industrie », écrit François Baroin, maire de Troyes et proche de la famille, en hommage à Michel Soufflet.
« Son nom se confond avec l’histoire de notre pays. Pour l’enfant que j’étais, quand je l’ai connu, il était un géant. Pour l’homme que je suis, il l’est resté », Michel Soufflet aimait la convivialité de la chasse, l’esprit de compétition du football et le bateau pour l’évasion. Sa vie s’est toujours confondue avec celle de son entreprise et il lui a transmis ses valeurs familiales : la passion du client, la qualité, l’innovation, le professionnalisme, l’esprit d’équipe et l’épanouissement des hommes. L’ancien livreur de grains a su partager sa vision. Quand il visitait une usine, il commençait par saluer tout le monde, avec un mot pour chacun : « J’ai vraiment un respect profond pour tous, de l’ouvrier au directeur du site », confiait-il. « Ce qui m’intéresse, c’est de construire avec, et pour des hommes. La réussite de notre groupe doit beaucoup à la motivation des hommes. J’ai eu la chance d’être entouré par des personnes formidables et dévouées ».