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Mademoiselle Chèvre, entre choix de vie et réussite commerciale

Agriculture. Repris en 2021, l’élevage de Coussegrey dans l’Aube a quadruplé et la marque se propage dans les enseignes Bio.

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Photo de David Dehaemers
David Dehaemers et ses 120 chèvres dans la région du Chaourçois. (Crédit : MBP)

Chèvrerie Bio norme CE, la marque Mademoiselle Chèvre alimente en glace, en yaourt, en fromage, lait et savon les magasins bios et spécialisés dont les Biocoop de l’Aube, de l’Yonne et de Paris. Quand ils décident de faire l’école à la maison pour leurs trois enfants, David Dehaemers, originaire de l’Aube, et Myriam Gualandi adoptent un projet de vie centré sur le vivant et le respect de la nature. Ils prennent alors quelques poules pour les enfants puis rachètent la Ferme des Damoiselles en 2021. David Dehaemers a dirigé une agence web à Paris pendant 20 ans. Son épouse était costumière pour le théâtre et directrice de médiathèque. Emmanuel Guchet, leur associé, a fait Centrale et est ingénieur.

Aujourd’hui, l’élevage compte 120 chèvres, 300 poules de races anciennes, soutenues par une aide européenne pour leur préservation et des ânes. Engagée et labellisée en agriculture Bio, Mademoiselle Chèvre transforme les produits sans présure animale et avance dans le respect de l’environnement et de la biodiversité : soins des chèvres par aromathérapie pots de glace compostables, eau recyclée, optimisation des livraisons pour réduire l’impact carbone… Un projet de transformation des déchets de la ferme en Biogaz est aussi à l’étude.

Bien-être animal

David Dehaemers et ses associés pratiquent la lactation longue, « un argument chez nos distributeurs à Paris ! » Les chèvres produisent du lait toute l’année et aucun chevreau ne part à l’abattoir. « Dans nos valeurs, nous respectons le vivant, les chèvres ne font pas de petits tous les ans, elles sont en meilleure santé tout en donnant du lait l’hiver. Elles vivent 12 à 14 ans », explique David Dehaemers. Élevées en pâturages tournants pour favoriser la repousse d’herbe, les dispositifs mis en œuvre protègent aussi les chèvres de l’attaque des loups. L’élevage cultive du sainfoin pour déparasiter le troupeau. Les poneys et les ânes nettoient aussi les prés. Le troupeau se berce également de musique classique diffusée dans l’étable. « Elles sont apaisées et nous avons constaté une augmentation de la production de lait de 3 % ».

La salle de traite respecte aussi leur rythme physiologique. Un esprit nature qui s’associe volontiers à la technologie. « Nous avons développé un logiciel estimé à 270 000 € pour le suivi et la traçabilité de l’exploitation ». 250 à 350 litres de lait sont transformés quotidiennement dans le laboratoire de 175 m², l’antre de Myriam Gualandi.

Élevage, tourisme et environnement

Au départ, l’idée était de juste faire de la glace. La spécialité permet de se différencier d’autres chèvreries et d’accueillir les touristes à la ferme pour déguster glaces et repas fermiers l’été. « Maxime Frédéric, un ami et meilleur chef pâtissier de France, travaille pour les plus grandes maisons. Il nous a conseillé pour les recettes. Notre glace, au-delà d’être au lait de chèvre, est faite avec de bons ingrédients, avec de la vraie vanille, de la pistache, pas avec des arômes. Le lait de chèvre n’est pas fort, contrairement aux idées reçues ».

Distribués en magasins, à la boutique de la ferme et en drive, les produits de la ferme s’affichent sur les réseaux sociaux et le web. L’entreprise agricole emploie trois salariés et a généré un chiffre d’affaires de 340 000 € en 2023. « Preuve en est qu’on peut faire une production paysanne et ne pas subir le système. J’ai passé l’âge de me prouver que je peux réussir. Ce que je veux, c’est m’amuser », poursuit David Dehaemers. Alors Mademoiselle Chèvre poursuit son chemin et sa ligne éthique avec pour principal objectif celui des valeurs transmises à ses enfants.