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Les Tribunaux de Commerce restent vigilants

Commerce. Dans la Marne, l’année 2021 laisse apparaître une augmentation du nombre d’immatriculations de sociétés commerciales et une baisse sensible du nombre de procédures collectives…

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Me Pierre Di Martino, greffier du Tribunal de Commerce de Châlons, Frédéric Jean, président du Tribunal de Commerce de Châlons, Jean-Marie Soyer, président du Tribunal de Commerce de Reims et Me Axelle Delpy, greffier du Tribunal de Commerce de Reims. DR

Faute de rentrée solennelle, les Tribunaux de Commerce de Reims et de Châlons-en-Champagne se sont adressés directement à la presse pour dresser leur bilan 2021, placé sous le signe d’une conjoncture intimement liée à la crise sanitaire. L’année écoulée laisse apparaître une augmentation du nombre d’immatriculations de sociétés commerciales et de personnes physiques, une légère augmentation du nombre d’injonctions de payer, une baisse sensible du nombre de procédures collectives et une augmentation du nombre de sanctions commerciales. « On constate une forte augmentation du registre du commerce et une baisse relativement importante des procédures collectives », note Me Pierre Di Martino, greffier du Tribunal de Commerce de Châlons-en-Champagne pour résumer l’activité de l’année écoulée. « La mise sous cloche de l’économie a joué son rôle », souligne Frédéric Jean, président du Tribunal de Commerce de Châlons.

« Les Tribunaux de Commerce ne seront pas encombrés en 2022 »

« Certains secteurs d’activités se sont même renforcés comme la vente à distance, la grande distribution, l’aménagement, le bricolage ou le luxe, par exemple ». Si les entreprises saines avant la crise ont pu passer cette dernière sans trop d’encombres, malgré la baisse de leur chiffre d’affaires, les entreprises en difficulté avant la crise ont quant à elle été remises à flots par les aides. Les entreprises fragiles n’étant pas devenues saines par la seule grâce des aides gouvernementales, elles devront néanmoins faire face à leurs remboursements. Pour les représentants des Tribunaux de Commerce marnais, les nombreuses aides distribuées par l’Etat et l’étalement progressif des calendriers de remboursements expliquent que la surcharge des Tribunaux de Commerce redoutée en 2021 n’a pas eu lieu.

Pas de crainte donc d’être confrontés au fameux « mur des remboursements » des Prêts Garantis par l’Etat (PGE), explique Jean-Marie Soyer, président du TC de Reims : « Nous n’imaginons pas cette déferlante cette année, les Tribunaux de Commerce ne seront pas encombrés en 2022 ». De quoi dégager du temps pour la prévention, le cheval de bataille des juridictions commerciales. « Les entreprises qui sentent arriver les premières difficultés doivent venir nous voir : les tribunaux de commerce sont les seuls à disposer des outils et des solutions pour les accompagner ». Car pour les juges consulaires, il s’agit de rester vigilant pour ne pas continuer à masquer les difficultés trop longtemps et ne pas alimenter une concurrence déloyale dans certains secteurs d’activité.

Un territoire dynamique

En terme d’activité justement, en 2021, les Tribunaux de Commerce ont enregistré une hausse sensible dans le domaine commercial, avec des hausses d’immatriculations et de formalités. Le Tribunal de Commerce de Reims a ainsi enregistré 3 819 immatriculations (1599 personnes physiques, 1 284 sociétés commerciales, 933 sociétés civiles et 3 GIE) quand le Tribunal de Commerce de Châlons-en-Champagne a enregistré une hausse des immatriculations, au nombre de 1 147 (372 personnes physiques, 474 sociétés commerciales, 301 sociétés civiles et aucun GIE). « La hausse des immatriculations traduit le dynamisme du territoire marnais », souligne Me Axelle Delpy, greffier du Tribunal de Commerce de Reims. Autre signe de dynamisme, en 2021, la juridiction commerciale de Reims a enregistré une hausse du nombre de formalités (immatriculations, modifications et radiations), au nombre de 18 923 contre 16 483 en 2020 et 12 365 en 2019. Le Tribunal de Commerce de Châlons a quant à lui enregistré 5 400 formalités, contre 4 056 en 2020 et 4 505 en 2019.

« Les entreprises qui sentent arriver les premières difficultés doivent venir nous voir : les tribunaux de commerce sont les seuls à disposer des outils et des solutions pour les accompagner »

Les immatriculations au registre spécial des agents commerciaux de Reims ont, au nombre de 291, pratiquement retrouvé leur niveau de 2019 (293) après une année 2020 en baisse (210). Châlons-en-Champagne a noté « significativement les mêmes variations », note Me Pierre Di Martino, greffier du Tribunal de Commerce, qui a enregistré 372 commerçants en 2021 (contre 300 en 2020) dont 311 auto-entrepreneurs. « Paradoxalement nous n’avons jamais autant immatriculé de fonds de commerce pour des activité de restauration », souligne Pierre Di Martino. « Dans le secteur du bâtiment aussi, des salariés en ont profité pour se mettre à leur compte ». À Reims, Axelle Delpy constate elle aussi « l’ouverture de commerces et des reprises de boutiques, de restaurants et de commerce. Les gens ont profité de la crise pour monter des projets et reprendre des locaux vides ».

Au niveau de l’activité juridictionnelle, les deux Tribunaux de Commerce enregistrent, en revanche, une deuxième année consécutive de baisse. À Reims, après un pic en 2019 (8 648 décisions prononcées) et une forte baisse en 2020 (6 520 décisions), l’année 2021 enregistre 5 982 décisions, soit une baisse de 9%. L’année dernière, 552 injonctions de payer ont été prononcées à Reims et 134 à Châlons. L’année 2021 a connu une baisse de 32% des procédures collectives à Reims avec 100 liquidations judiciaires ouvertes, 32 redressements judiciaires et deux sauvegardes. 50 procédures collectives ont été ouvertes à Châlons contre 56 l’année précédente et 100 en 2019, soit une baisse de 50% sur les deux dernières années. Une tendance baissière qui ne devrait pas durer, avec l’arrêt du « quoi qu’il en coûte ». De quoi faire passer à nouveau le message de la prévention et de la disponibilité des Tribunaux de commerce auprès des entreprises qui sentent poindre des signes de fragilité, avec un triple conseil : « Anticipez, anticipez, anticipez ».