« Les Ardennes affichent une résilience lors des crises »
Conjoncture. François Marbaix, directeur de la succursale de la Banque de France, a livré un état des lieux de l’économie du département qui souffre d’un manque de visibilité pesant incontestablement sur la confiance des chefs d’entreprise.

« Selon de nombreux dirigeants d’entreprises, ce qui pose problème, c’est le grand manque de visibilité notamment en raison de la situation politique qui interagit sur ce phénomène et bloque la consommation. Résultat, les carnets de commande sont à moins long terme que par le passé. C’est désormais du coup par coup. Les entreprises attendent une stratégie de relance des investissements et une dynamique européenne pour faire face aux Etats-Unis et à la Chine », constate François Marbaix.
L’emploi préservé malgré tout
« Depuis quelques mois, l’ensemble des secteurs industriels se félicite d’une reprise de l’activité qui préserve globalement l’emploi avec même un recours plus affirmé aux intérimaires depuis le mois d’août. » Sur le plan financier, les trésoreries, même si elles s’amenuisent quelque peu, restent toutefois conformes aux besoins des entreprises. Quant aux stocks de produits finis, ils sont au niveau escompté à l’exception de l’agroalimentaire. Concernant le bâtiment qui comprend les travaux publics et la construction, François Marbaix constate que le repli des volumes d’affaires touchant le gros oeuvre et le second oeuvre est toutefois moins important que dans la région Grand Est. « On est un peu plus préservé ».
Avec peu d’impact sur les effectifs. « On réemploie même avec les nouveaux chantiers qui s’ouvrent grâce à la baisse des taux sur les prêts immobiliers. Ce qui a pour effet de relancer les projets de rénovation ou libérer des programmes envisagés par des promoteurs ». À noter que la morosité du marché et la concurrence qui l’accompagne amènent de gros faiseurs extérieurs de la construction à venir sur le territoire ardennais répondre à des appels d’offres.
20 % de baisse des défaillances
« Ici, il existe un fort esprit d’entreprendre puisque, depuis 2019, le nombre d’entreprises a augmenté de 26 % dont 85 % de micro entreprises qui gagnent du terrain en se positionnant dans les services, les commerces et le bâtiment ». Bonne nouvelle pour le dynamisme local : 55% des dirigeants ardennais ont moins de 50 ans, ce qui signifie qu’il y a moins de problèmes de successions et de cessions d’entreprises.
Sur les douze derniers mois glissants, 166 défaillances d’entreprises (contre 200 l’année précédente, soit un recul de 20,6 %) sont à déplorer. Les disparitions résultent souvent d’un effet rattrapage du covid. Les services, les commerces et le bâtiment ont été les secteurs les plus touchés. Toutefois, le directeur départemental de la Banque de France souligne : « Face aux différentes crises survenues ces cinq dernières années, il y a eu une belle résilience dans les Ardennes grâce à la bonne santé financière des entreprises ».
François Marbaix a ainsi observé que les PME ardennaises avaient, depuis 2019, globalement amélioré leur niveau de rentabilité de plus de 35% malgré un affaissement en 2022 dû à la hausse des coûts des matières premières et de l’énergie. Le commerce, lui, fait exception en raison des facteurs inflationnistes et du manque de confiance des consommateurs.
Selon François Marbaix, depuis 2023, l’effort d’investissement des entreprises est en net retrait malgré un degré d’obsolescence des immobilisations d’exploitations de 55%, ce qui constitue « un point de faiblesse et d’alerte, surtout en cas de reprise ». Là encore le manque de visibilité explique cet attentisme et ce coup de frein. « On n’appuie pas sur l’accélérateur lorsqu’on est dans le brouillard », image François Marbaix. Enfin avec 26 % de cotations d’excellence et 48% de cotations « bonnes à satisfaisantes », le millier d’entreprises ardennaises réalisant un chiffre d’affaires minimal de 1,25 million d’euros permet au département d’afficher une situation enviable.