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Les agriculteurs demandent le classement en catastrophe naturelle

Agriculture. Très fortement touchés par les intempéries des deux dernières semaines, les agriculteurs de la région se sont réunis afin de faire un état des lieux des dégâts occasionnés. Les préfets de la Marne et des Ardennes se sont d’ailleurs déplacés afin de constater l’ampleur des sinistres et écouter les demandes d’un classement en catastrophe naturelle.

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Dans les Ardennes, des pâtures entières ont été inondées.

C’est devant des pâtures encore inondées que se sont retrouvés officiels et agriculteurs le 19 juillet dernier, à Margut, dans les Ardennes. « Face à une situation climatique exceptionnelle et historique (300 mm depuis le 4 juin dont 120 mm ces derniers jours), la FDSEA lance un recensement de l’ensemble des dégâts occasionnés sur les cultures et les élevages, auprès des agriculteurs », indique Francis Pierrard, directeur de la FDSEA 08.

D’ores et déjà, le constat est alarmant aussi bien dans la Marne que dans les Ardennes. « En quelques jours, nous avons déjà recensés 150 exploitations sur les 4 200 que compte le département », signale Christophe Songy, directeur général de la FDSEA 51, précisant que la situation est compliquée aussi bien pour les éleveurs que pour les céréaliers.

Appel à la solidarité

« Les prairies touchées sont inutilisables. Les animaux ont dû être rentrés mais en plus, les éleveurs doivent puiser dans le fourrage d’hiver s’ils n’avaient pas pu faire leur foin et que leurs parcelles sont aussi dégradées. » Dans la partie Argonne et dans le Tardenois, des mortalités d’animaux ont aussi été recensées. « Nous devons attendre la décrue pour pouvoir tout chiffrer », annonce Francis Pierrard, poursuivant : « Nous comptons aussi un peu sur la solidarité entre agriculteurs avec des échanges foin / fumier par exemple. »

Le prefet des Ardennes, Jean-Sébastien Lamontagne était aux côtés de Christiane Lambert, présidente de la FNSEA et des agriculteurs du département. 

C’est un gros coup au moral des exploitants, car la saison 2021 augurait une très bonne récolte. La situation est d’ailleurs plus catastrophique que lors des pluies diluviennes de 2016 qui étaient intervenues plus tôt dans la saison, en mai/juin. « À ce moment, les céréales avaient pu sécher. » Les agriculteurs espèrent ainsi un dispositif exceptionnel comme celui qui a été mis en place au printemps lors du gel. Car les épisodes climatiques hors-normes se multiplient.

« On accuse souvent les agriculteurs d’être à l’origine d’émissions de gaz à effets de serre et donc en partie responsable du réchauffement climatique, mais nous en sommes les premiers impactés ! » insiste Francis Pierrard, reconnaissant une nécessité de transformation du métier.

Perte de cultures et maladies

En 2016, dans les Ardennes, 2 à 3 000 hectares avaient été touchées représentant, 150 à 200 exploitations. « Là, ce sera forcément plus, mais je ne peux pas m’avancer à ce stade sur un chiffrage », reconnait le directeur de la FDSEA 08 livrant tout de même que la plupart des vallées sont touchées par le débordement des multiples cours d’eau du département (Chiers, Meuse, Aisne, Vaux, Don, etc.)

Les crues et leur persistance dans les vallées provoquent donc la destruction des foins et des céréales de printemps en vallée et obligent les agriculteurs à relever un défi logistique et alimentaire pour gérer les animaux qui étaient dans les parcelles inondées. « Ailleurs l’excès de pluie provoque des pertes quantitatives et qualitatives sur les récoltes de céréales et oléo protéagineux, mais aussi des développements des maladies sur les pommes de terre (mildiou) et les cultures maraîchères », relève Christophe Songy.

« On a fait le lac du Der pour éviter d’inonder Paris, mais en contrepartie, c’est la Marne qu’on inonde. »

Les cultures de pois et de lentilles par exemple ont été totalement inondés dans la Marne, provoquant des germinations à même le sol. « Le colza commence également à être impacté, quant aux céréales, on a aussi constaté des germes sur certaines parcelles, à hauteur de 7 - 8%. ». Dans certains champs, ce sont les moissonneuses elles-mêmes qui ont été coincés dans les zones inondées.

La gestion des réseaux hydrauliques du der en question

Ces inondations ont aussi été l’occasion de rappeler les problèmes de gestion des réseaux d’eau dans la Marne avec le lac du Der, problématique marnaise, mais régulièrement remise sur le tapis avec les élus : « Il faut trouver un bon équilibre de gestion hydraulique des réseaux. Les évacuations ne se font pas. On a fait le lac du Der pour éviter d’inonder Paris, mais en contrepartie, c’est la Marne qu’on inonde. C’est un éternel problème de la ville contre les campagnes, mais il va falloir un jour que cette question soit traitée », martèle Christophe Songy.

Rendez-vous a été pris pour fin août-début septembre avec la constitution d’une cellule de crise et d’un point d’étape post-récolte. C’est à ce moment que seront chiffrées toutes les pertes induites par les fortes pluies, où au plus fort, il a plu en une journée ce qui normalement pleut en un mois.