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Le Salon de l’Agriculture, une vitrine pour les éleveurs et producteurs de la région

Agriculture. Le monde agricole est en attente de changements. Après une mobilisation intense depuis un an, le Salon International de l’Agriculture est l’occasion de remettre les préoccupations au centre du dialogue avec le gouvernement et la Ministre, Annie Genevard.

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Photo d'une pancarte avec bannière "Non au Mercosur"
Dans de nombreux villages, on peut encore voir des panneaux inversés ou enveloppés d’une bannière « Non au mercosur ». (Crédits : ND)

Si la mobilisation des agriculteurs n’a pas cessé dans l’absolu, elle a en revanche changé de visage sur le terrain. Après les blocages de ronds-points ou le déversement de fumier devant les préfectures l’année dernière, ce sont les panneaux de communes qui ont été retournés, signifiant que les normes toujours plus contraignantes donnaient le sentiment de « marcher sur la tête ». Plus récemment, ces mêmes panneaux étaient recouverts de bâches barrées d’un « non au mercosur » du nom de l’accord ayant pour but d’intensifier les échanges entre l’Union européenne et les pays d’Amérique du Sud. Aussi, les revendications de la filière ont pris un autre tournant avec les élections au sein des Chambres d’Agriculture, véritables interlocuteurs des pouvoirs publics. Créés en 1924, ces établissements publics sont pilotés par des élus représentant l’ensemble des acteurs du secteur agricole, rural et forestier. Les 102 établissements (88 Chambres départementales ou interdépartementales, 13 Chambres régionales ainsi qu’une structure nationale) rassemblent 3 200 élus et emploient 8 230 collaborateurs dont 6 430 cadres et techniciens.

Et alors que la FNSEA connaissait une hégémonie, le syndicat a été quelque peu bousculé par la Coordination rurale qui a effectué une véritable percée, notamment dans le département des Ardennes où elle a rassemblé 48% des voix. « Il va falloir faire des alliances », concède Thierry Lebegue, secrétaire général de la Coordination rurale des Ardennes et vice-président national. Et d’embrayer dans la foulée : « Mais ce n’est pas une alliance contre-nature. Nous ne sommes pas sectaires, ce qui compte c’est de défendre les intérêts des agriculteurs. » Des intérêts que les producteurs ardennais jugent mieux compris par « les bonnets jaunes ».

« La physionomie du département est très différente de celle de la Marne, territoire voisin, où il y a majoritairement des céréaliers et des viticulteurs. Dans les Ardennes, ce sont beaucoup plus des éleveurs », précise celui qui est à la tête d’une exploitation de 380 animaux, en bio. Allusion au président national de la FNSEA, Arnaud Rousseau, également à la tête du groupe Avril, groupe agro-industriel français spécialisé dans l’alimentation humaine, animale, l’énergie et la chimie renouvelable. Il dispose d’un portefeuille de marques comme Lesieur, Puget, Vivien Paille, Sanders ou Diester. À la Coordination rurale, on dénonce ainsi les intérêts « antagonistes » du président national de « la fédé ».

Valorisation des pratiques

Pourtant, sur le terrain, les discours des responsables de la FDSEA ne sont pas si différents de leurs homologues de la CR (voir PAMB 8108). Concernant la PAC (Politique Agricole Commune) par exemple, si le syndicat s’est construit en 1991 en opposition au traité européen, aujourd’hui, Thierry Lebegue reconnaît : « Je ne connais pas d’agriculteurs qui pourraient vivre sans les aides. Nous avons la plus belle agriculture au monde, mais à côté de ça, on importe d’Amérique du Sud ou d’Ukraine. Plutôt que de soutenir les exploitations et d’aider à leur développement, on ajoute des normes et on préfère faire venir des produits d’ailleurs. »

Alors quel discours compte porter la coordination rurale au Salon de l’Agriculture qui se déroule du 22 février au 2 mars ? « Moins de contrôles dans les exploitations » plaide Thierry Lebegue qui prend son propre exemple. « Tous les deux jours, mon lait est contrôlé et analysé. Ce sont des astreintes, une organisation et cela jette le doute sur la manière dont on fait notre travail. » Deuxième doléance, un bouclier énergétique : « Toutes les fermes sont confrontées aux augmentations de l’énergie, que cela soit les céréaliers pour conserver le grain, les maraîchers ou les éleveurs. Nous portons la volonté d’obtenir un kilowattheure détaxé », fait-il savoir. La question d’une meilleure rémunération est aussi sur toutes les lèvres, FDSEA et Coordination rurale réunies. « Les coopératives doivent acheter à un prix rémunérateur. Et c’est possible. Pour prendre encore l’exemple du lait, les coopératives qui achètent dans le Jura ou en Savoie rémunèrent à 700 euros les 1 000 litres là où dans le Grand Est, on tourne plus autour des 400 euros. »

La valorisation des produits, la reconnaissance de leur spécificité avec des labels AOP par exemple, entre aussi en ligne de compte. « Il faut des coopératives à taille humaine qui reversent les bénéfices aux agriculteurs plutôt que d’aller investir à l’étranger », insiste le vice-président de la Coordination rurale. L’année dernière, le syndicat a reçu 160 parlementaires nationaux et européens sur le Salon de l’Agriculture et compte bien renouveler les rencontres cette année. « L’avenir de l’agriculture se joue surtout au niveau européen, quand la France vient surtransposer les normes que l’UE impose », affirme celui qui s’est converti en bio il y a 12 ans. « La situation du bio en France est très compliquée, à tel point que beaucoup songent à repasser en conventionnel. »

Concernant l’agriculture biologique, Thierry Lebegue a également des idées : « Quand on mange bio, on est moins malade. Pour les animaux, c’est impressionnant leur santé avant et après. Dans la mesure où la TVA sert en partie à financer la sécurité sociale, on pourrait moins taxer le bio. On mangerait mieux et les produits seraient plus abordables pour le consommateur », veut croire l’Ardennais.