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Le Hameau de la Sucrerie, créateur de dynamisme local

Développement. 15 entreprises constituent « le Hameau de la Sucrerie », situé à Saint-Germainmont dans les Ardennes, véritable village de savoir-faire variés, interdisciplinaires et coopératifs avec comme locomotive, l’entreprise Scorpe Technologies portée par Sylvain Duménil.

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Photo de la sucrerie betteravière de Saint-Germainmont
Créée en 1864, par les frères Linard, la sucrerie betteravière de Saint-Germainmont a fermé ses portes en 2007. Elle a été rachetée en 2019 dans l’objectif d’en faire un lieu rassembleur. (Crédit : ND)

C’est sur l’immense friche de l’ancienne sucrerie de Saint-Germainmont, fermée en 2007, que s’est implantée en 2019, juste avant le Covid, l’entreprise Scorpe Technologies afin de regrouper ses deux sites : les bureaux administratifs situés à Witry-lès-Reims et ses entrepôts et ateliers de Charleville-Mézières.

Photo de Sylvain Duménil
Sylvain Duménil (Crédit : ND)

Créée en 1994, sous le nom de SOFRAD, l’entreprise est au départ spécialisée dans l’importation et la distribution de matériel de secours routier et de lutte anti-incendie.

En 2006, son fondateur, Sylvain Duménil, après le rachat d’un fabricant savoyard de matériel de recherche de victimes, fonde sa propre marque, Scorpe (dont le nom a été choisi en référence à son signe astrologique) au logo vert pomme.

« Aujourd’hui, l’export direct et indirect représente 50% de notre chiffre d’affaires », précise ce dernier. Outre le regroupement de ses activités, l’idée est aussi de créer un véritable village associant des entreprises, un centre d’entrainement international destiné aux secours mais également une partie évènementielle. Tout cela sur un espace de 6 hectares totalement en friche, au beau milieu des prairies ardennaises, à 35 minutes de Reims.

Une utopie devenue réalité

Une ambition qui, si elle n’avait pas connu un franc succès depuis 4 ans, aurait pu paraître totalement utopique. Mais c’était sans compter sur le sens des affaires extrêmement aiguisé de son créateur, Sylvain Duménil.

« Quand je suis entré au capital de la sucrerie avec mon associé David Bodenan, il y avait tout à refaire : les espaces de bureaux, toute la toiture, de nombreuses fenêtres… Pour ces dernières, le devis était de 800 000 euros. Comme elles donnent sur des endroits n’en ayant pas forcément besoin, au lieu de les remplacer, nous avons mis des panneaux d’aggloméré sur lesquels nous avons fixé des publicités de nos partenaires. Non seulement je n’ai rien déboursé mais en plus, je gagne de l’argent », relève-t-il. Un exemple qui illustre parfaitement la vision business du Pdg de Scorpe Technologies.

Et c’est en parcourant le dédale d’espaces différents où il nous emmène tambour battant, dans lequel sont implantées les filiales de Scorpe, que l’on se rend compte de l’envergure du projet, qui répond « à une véritable philosophie ».

« Pour générer de la croissance, il faut fabriquer soi-même. Et pour fabriquer soi-même, il faut un site pour usiner, un bureau d’études pour dessiner et une agence pour communiquer. » Qu’à cela ne tienne, il crée dans la foulée les entreprises correspondantes : Innov’Sainger pour le bureau d’études et Colibry’s pour l’agence de communication.

« On s’est installé avec une quinzaine de collaborateurs. Aujourd’hui, on est 45 », souligne-t-il. Le fonctionnement de l’entreprise a d’ailleurs été évalué par un cabinet d’audit et de conseils en 2018, pour passer d’un mode « en silos », à un « management transversal ». « Je m’appuie sur une très bonne équipe, avec des associés dirigeants », reconnait Sylvain Duménil. Ce qui, compte tenu des nombreuses entités, facilite la conduite des projets.

Ainsi, le « Training Center Sucrerie (TCS) » a vu le jour pour compléter l’offre Scorpe, proposant aux équipes de secours de s’exercer « dans plusieurs zones spécifiques, à travers des scénarios personnalisés afin d’allier théorie et pratique. Chaque plateau est équipé d’une salle de formation dédiée. »

Dans un immense hangar ouvert, une reconstitution de terrain de guerre a été aménagé, dans une autre partie entièrement fermée et faite de couloirs et coursives, 500 m2 de noir total, ailleurs encore, dans l’ancienne salle des machines de la sucrerie, une zone dédiée aux risques technologiques, avec de faux airs de fin du monde, a été sécurisée.

Quant à l’immense tour de 30 mètres de haut, elle peut être utilisée pour pratiquer le travail sur corde dans le cadre du secours industriel et de la progression verticale.

Des entraînements des SDIS de toute la France

Un modèle gagnant puisque les SDIS de toute la France viennent régulièrement tester des entrainements au sein du Hameau de la Sucrerie. Et bien que les mises en situation physiques aident aux partenariats (dont un avec Renault qui fournit une centaine de véhicules prototypés par an pour entrainer à la découpe lors d’accidents), la mise en place de démonstrations via visio et studio a aussi permis de vendre du matériel et d’assurer une présence de Scorpe dans une cinquantaine de pays.

« Certes, les commerciaux sont moins sur les routes. Mais leur métier n’est pas d’être routier, il est de vendre. Les démonstrations que nous effectuons sur site doivent être convaincantes, c’est pour cela que nous avons investi 1,5 million d’euros pour aménager les espaces de TCS et dans un studio. »

Fonctionnant véritablement en économie circulaire, une collaboration est née avec les anciens propriétaires de la Sucrerie, la famille Poulain, dont Jean-Luc était le responsable maintenance et avec qui Sylvain Duménil a créé SG motors spécialiste en rénovation de Porsche et revendeur de véhicules d’occasion.

« Au départ, pour fournir mes collaborateurs en véhicules, je faisais du leasing. Aujourd’hui, nous sommes propriétaires de nos propres automobiles converties au bioéthanol et quand elles ont atteint 100 000 km, on les revend. Ça nous coûte moins cher, on pollue moins, et en plus, on gagne de l’argent. »

D’ailleurs aujourd’hui, avec beaucoup plus de compétences et de salariés, les frais fixes de Scorpe ont baissé. Et si ce modèle collaboratif marche, c’est parce que le dirigeant demande à ses filiales de ne pas avoir plus de 60% de leur chiffre d’affaires qui provienne de contrats avec Scorpe Technologies, « afin de rester actif, en alerte et à l’écoute du marché ».

Pour parfaire la démarche de complémentarité de l’offre et occuper tous les espaces disponibles, Sylvain Duménil a aussi lancé un espace évènementiel, avec salle de réception d’une capacité de 550 personnes, un bar et un restaurant d’une capacité de 100 couverts dans lequel si les salariés souhaitent s’y restaurer le midi, 50% de la facture est prise en charge, « et le samedi soir, à partir de 22 heures, c’est moi qui suis aux platines ! », lance celui qui ne se fatigue jamais et aime toucher à tous les domaines.

Photo de l'espace évènementiel de la Sucrerie
L’espace évènementiel pouvant contenir jusqu’à 550 personnes. (Crédit : ND)
Photo de l'espace événementiel de la Sucrerie
(Crédit : ND)

Une recette gagnante, puisque depuis quatre ans, Scorpe technologies et ses filiales ont « créé près de trente emplois tous conservé sans aucune démission à ce jour. »

Fourmillant d’idées, Sylvain Duménil ne compte pas s’arrêter en si bon chemin avec encore de nombreux projets pour agrandir les services et prestations du Hameau de la Sucrerie, dont une reconstitution de voie ferrée et d’espace routier. En substantielle progression, le chiffre d’affaires est passé de 9,5 millions d’euros en 2022 à 11 millions en 2023.