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La bioraffinerie Multifolia dope la filière sainfoin

Bioéconomie. Sainfolia inaugure son site d’extraction de molécules du sainfoin et un laboratoire de biocontrôle à Viâpres-le-Grand (Aube).

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Photo de sainfoin
Le sainfoin est une plante mélifère aux multiples propriétés. (Crédits : MBP)

La filière sainfoin s’organise. La plante aux fleurs roses continue de démontrer ses bienfaits tant en agriculture qu’en élevage. Pour ses dix ans, la coopérative auboise Sainfolia, qui prône « le bon sens paysan au service du vivant », franchit un cap avec l’inauguration de sa bioraffinerie et de son laboratoire de biocontrôle portée par Multifolia. L’entité aval de Sainfolia dédiée à la recherche et au développement, à l’extraction végétale et à la transformation et à la valorisation des granulés, permet au projet de prendre corps. La vision de Sainfolia rassemble ses 90 adhérents autour d’une production différente, durable et équitable.

« Il faut ramener la valeur ajoutée dans les fermes. Du monde du vivant, nous allons tirer des produits verts, sans solvants avec des fonctions de biocontrôle en santé animale ou végétale pour limiter l’usage de substances chimiques », explique Pascale Gombault, présidente de Sainfolia.

« Nous avons décidé, en tant que paysans, de prendre le problème à la racine et de proposer au monde agricole des solutions naturelles qui sortent de nos champs. Nous y voyons une économie circulaire, une économie du bon sens et un respect total du cycle du vivant avec le respect de la biodiversité, le respect de nos sols, le respect des hommes aussi puisque nous devons vivre de nos métiers et non de subventions ».

Créée en 2015, la coopérative Sainfolia porte sa vision : « Il faut oeuvrer à un monde plus propre, plus cohérent mais surtout plus humain, une vraie mission », poursuit Pascale Gombault. Et la filière mise sur le collectif et le partage de compétences en s’appuyant sur l’expertise tant d’agriculteurs, d’éleveurs, de viticulteurs que des partenaires d’interprofession, de chercheurs, d’ingénieurs, d’institutions et de collectivités.

Du miel aux enzymes

Le sainfoin constitue ainsi une alternative naturelle pour des produits de santé végétale ou animale pour les chevaux et bovins. Il réduit les émissions de méthane des ruminants. Le biocontrôle regroupe des solutions naturelles qui permettent de lutter contre les ravageurs ou des maladies. La gamme viticulture, développée en lien avec l’INRAE Grand Est, propose une gamme homologuée en 2024 par la commission européenne qui permet de lutter contre la maladie du court-noué de la vigne grâce à ses propriétés nématicides.

En concentrant les vertus de plantes agroécologiques, Pascale Gombault ouvre de nouvelles perspectives : « Nous nous servons du modèle du sainfoin et pensons que l’on peut produire d’autres plantes et d’autres extraits. À partir de ce processus, nous pouvons travailler le vivant sous toutes ses formes de biomasse, c’est-à-dire les graines, les feuilles, les tiges, peut-être même les fleurs. La nature sait faire tout toute seule, donc nous allons chercher les fonctions qui nous intéressent dans les extraits que nous allons pouvoir mettre au point », poursuit la présidente de Sainfolia.

Photo de L'intérieur de la bioraffinerie
L’intérieur de la bioraffinerie. (Crédits : MBP)

Le démonstrateur industriel permet de réaliser des extractions liquides de molécules d’intérêt du sainfoin et d’autres plantes aux propriétés agroécologiques en permettant des assemblages innovants. Première licence Biolie française, la bioraffinerie s’appuie sur les connaissances de la start-up nancéenne de formulation d’ingrédients sans solvants chimiques. La technique permet d’obtenir des ingrédients qualitatifs aux propriétés préservées.

Les plantes sont convoyées, finement broyées et mélangées dans une cuve à de l’eau et des enzymes. Centrifugées et filtrées, elles passent dans un tricanteur pour séparer les huiles, les extraits aqueux et les solides. Ce processus permet de préserver l’intégralité des molécules présentes dans la plante et donc de leurs propriétés pour des applications agricoles. « Le laboratoire est installé on va pouvoir démarrer ».

Inauguré le 18 juin dernier, le site de Viâpres-le-Grand est soutenu par l’Europe pour 798 000 euros et par la Région Grand Est à hauteur de 200 000 euros, le reste étant financé sur fonds propres avec l’aide d’un prêt BPI. Philippe Pichery, président du Conseil départemental de l’Aube, félicite l’arrivée d’une nouvelle filière qui valorise l’Aube. « Ce projet de filière est un projet gagnant-gagnant pour le territoire et c’est notre objectif commun ». La filière Sainfoin pèse aujourd’hui 3 millions d’euros et Multifolia emploie 10 salariés dont 4 ingénieurs chercheurs.