La bioéconomie auboise : du transport et de l’alimentaire
Environnement. Pegaz Panais Energie produit et distribue son biogaz aux transporteurs et particuliers sur son exploitation agricole de Thennelières. MD CO₂ récupère le carbone capté par les plantes lors de la photosynthèse pour faire pétiller les boissons. Les agriculteurs repensent la filière de la méthanisation et s’organisent sur des marchés vertueux pour l’environnement.
Dix bus alimentés au gaz naturel de la TCAT, les transports en commun de Troyes Champagne Métropole font désormais le plein de biogaz GNV à Thennelières et dix autres devraient suivre. Avec sa station-service Pegaz, la famille Boutiton franchit un nouveau cap dans la décarbonation en offrant une alternative écologique pour le transport qui génère 1/3 des gaz à effet de serre en France, notamment avec le trafic routier qui augmente sans cesse. Située à la sortie d’autoroute A26 à Thennelières, la station alimente les particuliers et les transporteurs avec une capacité d’avitaillement de 100 camions par jour.
PEGAZ, la station-service BioGNV du producteur au consommateur
« Nous, nous ferons toujours du gaz, c’est une indépendance totale », explique Bernard Boutiton, exploitant agricole et président de Pegaz Panais Energie avec sa fille Charlène, 37 ans, qui dirige l’exploitation. « Nous produisons sur place une énergie non fossile et ne dépendons ni du climat ni du contexte géopolitique. Peu de véhicules roulent au biogaz aujourd’hui. Nous avons espoir que cela se développe, c’est une solution pour décarboner ». L’entreprise emploie trois salariés pour la méthanisation et deux pour la partie agricole. « 70 % des intrants de la méthanisation sont des CIVE (cultures intermédiaires à vocation énergétique) produites pour les deux tiers sur l’exploitation, avec les intercultures et cultures alimentaires, et pour un tiers par des agriculteurs partenaires », explique Charlène Boutiton. « Il y a aussi 30 % de biodéchets provenant de la région parisienne, des cantines, hôpitaux et restaurants. Ils sont hygiénisés en région parisienne et répartis entre cinq méthaniseurs associés ».
Après méthanisation, le digestat, liquide ou solide, repart comme engrais naturel sur les terres de la SCEA et chez les partenaires qui alimentent le site en CIVE. L’épandage se fait sur les 400 hectares parcellaires sur 6 km aux alentours du site via un réseau d’irrigation en souterrain. Le BioGNC produit par Panais Energie alimente les 4 bornes à charge rapide de la station-service Pegaz raccordée au réseau de distribution de gaz naturel de GRDF pour garantir la disponibilité totale du BioGNC.
La famille Boutiton concrétise ainsi un projet de longue date – elle détient l’accord de permis de construire depuis 2020 – avec un investissement de 2 millions d’euros sur fonds propres. « Cela fait longtemps que nous voulions faire la station. Nous tenons à promouvoir notre image et vendre notre gaz à proximité de notre exploitation. Maintenant, nous allons aussi travailler sur la production de CO₂ biogénique pour l’alimentation », explique Charlène Boutiton.
Circuit court et environnement
Pour Jean-Jacques Raidelet, directeur des marchés GRDF, « notre métier est de continuer à utiliser du gaz, mais ça n’est absolument pas incompatible avec des parcours de décarbonisation. Des installations comme celle-ci, en France, GRDF en met 2 ou 3 en service par semaine. Avec d’un côté le méthaniseur et de l’autre, l’usage. Nous comprenons tout à fait l’ancrage territorial et la logique d’économie circulaire. »
L’utilisation de BioGNV pour les transports routiers agit directement sur l’environnement. Il réduit de 80 % les émissions de CO₂ et de 95 % les particules fines et la pollution sonore de 50 % par rapport au bruit d’un moteur diesel. Pour Valérie Schwartz, directrice de l’agence de marketing territoriale Business Sud Champagne « une énergie produite en local est un argument fort pour l’implantation d’activités et le développement économique en général ». La France compte 350 stations publiques de BioGNV et 300 privées.
Les transporteurs aubois, dont le manque de points d’avitaillement sur le territoire pénalise le développement des camions au gaz accueillent positivement l’ouverture de Pegaz dans l’Aube. Et d’ores et déjà, les collectivités s’engagent dans la décarbonation. La TCAT, le réseau de transport de Troyes Champagne Métropole, s’approvisionne en gaz local à Thennelières avec dix bus destinés au transport scolaire et aux dessertes de ville. Dix autres sont en commande. « Nous créons une énergie locale avec nos cultures. Nous emmenons les enfants à l’école avec les biodéchets de la cantine », explique Bernard Boutiton. La prochaine étape pour la famille Boutiton étant de fournir du CO₂ norme alimentaire et sans doute contribuer à fournir les limonades des cantines.