L’ex-magasin Cora et ses 330 salariés en quête d’un nouveau repreneur
Commerce. Passé dans le giron de Carrefour, l’hypermarché de Villers-Semeuse devra être cédé d’ici la fin de l’année 2025 à une enseigne concurrente, suite à une mesure imposée au repreneur par la Haute Autorité de la Concurrence. Explications.

Alors qu’elle avait racheté, le 12 juillet 2023, 60 hypermarchés Cora et 125 supermarchés Match pour un peu plus d’un milliard d’euros au groupe Louis Delhaize, le géant français de la distribution Carrefour a été rattrapé, le 13 mars dernier, par la Haute Autorité de la Concurrence. Si cette instance a autorisé Carrefour à prendre définitivement le contrôle de la grande majorité des activités françaises du groupe belge, elle a, en revanche, émis des réserves en identifiant huit zones problématiques où Carrefour sera contraint de céder sept magasins à des enseignes concurrentes. Parmi ceux-ci figure l’ancien magasin Cora de Villers-Semeuse récemment passé sous l’enseigne Carrefour et distant de seulement cinq kilomètres du Carrefour déjà existant sur la zone commerciale de la Croisette, implantée à Charleville-Mézières. C’est là que le bât blesse.
Protéger d’autres commerces
Afin que « les consommateurs puissent bénéficier d’alternatives suffisantes pour faire jouer la concurrence dans leurs achats de produits de grande consommation », l’instance a donc estimé que cette acquisition aboutirait à une position dominatrice trop forte de Carrefour sur ce secteur géographique qui pourrait nuire aux commerces alimentaires alentours, réduisant ainsi l’offre des consommateurs.
Avisé de cette réserve, le groupe Carrefour s’est donné jusqu’à la fin de l’année 2025 pour céder le magasin ardennais à une enseigne concurrentielle à prédominance alimentaire et ainsi rassurer les 330 salariés (dont 38 encadrants placés sous la direction de Francis Bourdin, en place depuis un peu plus de deux ans), pour lesquels cette décision de la Haute Autorité de la Concurrence a fait l’effet d’une douche froide. « Nous attendons de savoir ce qu’on va devenir et de qui on va désormais dépendre. On ne sera pas tranquilles tant qu’il n’y aura pas de repreneur officiel. Nos 330 emplois sont liés à cela », souligne Nathalie Lambert, déléguée syndicale FO de l’ancienne enseigne Cora.
Leclerc sera-t-il à nouveau intéressé par la proximité de Charleville ?
Ce magasin ayant fait l’objet de différents travaux ces dernières années au prix d’un investissement estimé à six millions d’euros, consacrés à différentes améliorations pour « rafraîchir » les lieux (façade, caisses automatiques neuves, amélioration du rayon boucherie et traiteur, nouvelles gondoles, sas d’entrées, carrelage et plafond dans la galerie commerciale, etc.), il est fort probable que ce lifting constituera un « plus » lors des prochaines négociations avec des investisseurs intéressés. Parmi les potentiels repreneurs, on cite le plus souvent : Leclerc, déjà présent à Sedan, Super U – Auchan en difficulté financière – voire même l’anglais Costco qui chercherait des ouvertures en France ou le Belge Colruyt, dont l’envergure semble pourtant insuffisante. Si l’on se fie aux réactions sur les réseaux sociaux, Leclerc fait l’unanimité chez les consommateurs.
Ce groupe déjà présent à Sedan où il draine aussi des clients de Charleville-Mézières et de sa périphérie avait déjà convoité, un terrain à Tournes, en 2017, en envisageant alors d’y ériger un « hyper » de 6 000 m². Mais aussi un drive de neuf pistes, une station-service, une animalerie et un restaurant Crescendo. Soit un projet estimé, à l’époque, à 25 millions d’euros et pouvant déboucher sur 200 créations d’emploi. Mais cet ambitieux programme n’avait pas obtenu le feu vert de la commission nationale de l’aménagement du territoire.
La galerie marchande aussi concernée
Le Carrefour de la Croisette, qui emploie 300 personnes et réalise un meilleur chiffre d’affaires que son voisin, restera dans le giron de Carrefour. « L’opération est également conditionnée à la cession de la galerie marchande attenante à l’hypermarché villersois », ajoute la Haute Autorité.
Cet espace comprend un peu plus d’une douzaine de magasins locataires (Nocibé, l’agence de voyage Prêt à partir, Léonidas, Kryss, deux bijouteries, la Caisse d’Epargne, la Poste, deux salons de coiffure, une esthéticienne, un bar, un cordonnier, etc…) et dépend, aujourd’hui, de Carmila, une filiale rattachée à Carrefour France et dédiée à la valorisation des centres commerciaux attenants et de la gestion de l’immobilier et qui a succédé à Galimmo qui oeuvrait pour Cora. La cession effective du centre commercial de Villers-Semeuse sera soumise aux représentants sociaux qui d’ici la fin 2025 seront avisés lors d’une consultation du Comité Social et Economique (CSE).