Entreprises

L’économie régionale, résiliente en 2022, s’apprête à résister aux aléas annoncés de 2023

Conjoncture. Entre bilan 2022 et perspectives 2023, l’enquête annuelle de la Banque de France passe d’une étape de résilience à un ralentissement probable de l’économie. Dans le Grand Est, l’industrie s’en sort bien et investit pour l’avenir.

Lecture 6 min
Louis Retornaz
Louis Retornaz est le directeur de la Banque de France dans la Marne. (Crédit : GD)

L’environnement économique mondial de 2022, avec une certaine détente en fin d’année, reste fragile au niveau de l’inflation, continue depuis 2021 et qui s’avère être la première préoccupation des Français :

« La vaincre est la mission de la Banque de France », précise Louis Retornaz, Directeur départemental Marne Banque de France, en introduction de sa présentation du bilan 2022 et des perspectives 2023.

Dans une France (+6,7%) qui résiste mieux que la zone européenne (+9,2%), l’inflation a flambé en 2022 pour les prix du gaz et de l’électricité (+16,3%), ceux de l’alimentation (+16%), des équipements ménagers (+9,1%), de l’hôtellerie-restauration (+8,3%) ou des transports (+6,9%). La détente détectée récemment mettra deux ans à s’affirmer, la Banque de France mise sur une trajectoire descendante, de +6% en 2023 à +2,1% en 2025.

Du côté du Produit Intérieur Brut, le Fonds Monétaire International enregistre pour la zone euro une progression de 3,5% en 2022, de 0,7% en 2023 avant une très légère amélioration de 1,6% en 2024. La France pourrait faire mieux en passant de +0,7% en 2023 à +1,6% en 2024.

Pas de reprise avant 2024-2025

Analyse synthétisée par Louis Retornaz :

« La croissance française a connu une certaine résilience en 2022, elle va connaître un ralentissement en 2023 et une reprise en 2024. »

« Pour les entreprises nationales, les difficultés d’approvisionnement vont s’estomper entre 2022 et 2023. Elles vont passer de 64% des entreprises concernées à 31% dans le bâtiment et de 54 à 31% dans l’industrie. »

Depuis 2021, une entreprise sur deux en France connaît des difficultés de recrutement, malgré une remontée du chômage, de 7,3% en 2022 à 8,3% en 2024. La progression des créations d’emplois devrait lourdement chuter : +647 000 en 2022 et +58 000 en 2023.

Ces créations vont même régresser : -196 000 en 2024 et -40 000 en 2025. C’est l’évocation de la dette qui clôt ce panorama économique national : la France s’endette plus vite que la zone européenne. Ses ratios passent de 60 en 2000 à 110 en 2024, contre une progression de 70 à 90 dans le reste de l’Europe.

Le ralentissement prospectif de 2023

L’enquête Banque de France Grand Est du bilan 2022 porte sur 1 752 entreprises (782 pour l’industrie, 442 pour les services marchands et 528 pour la construction). Elle révèle des chiffres d’affaires en hausse : 13,6% pour l’industrie, 5,7% pour les services marchands et +4,6% pour la construction, et notamment les +23,7% pour le secteur de la fabrication des matériels de transport.

Les exportations se portent plutôt bien : +12% pour l’industrie, +14% pour l’agroalimentaire, +25% pour le travail du bois, du papier et de l’imprimerie et +25% pour l’industrie chimique. Les estimations 2023 sont plus mesurées : +5% pour l’industrie, +3,4% pour les services marchands et +1,4% pour la construction.


>LIRE AUSSI : La réforme de l’assurance chômage se met en place progressivement


Dans ces trois grands secteurs de l’enquête Banque de France, l’emploi a progressé en 2022 : +3,6% dans l’industrie, +3,8% dans les services marchands et + 3% dans la construction. Tous les secteurs d’activité ont eu recours à l’emploi intérimaire, notamment celui de l’industrie, avec +48% pour la fabrication des matériels de transport. La projection sur l’emploi est bonne mais mesurée : +1% dans l’industrie, +2,6% pour les services marchands et +1,2% pour la construction.

Cependant, les baisses de rentabilité touchent un tiers des entreprises : 35% dans l’industrie, 38% dans les services marchands et 29% dans la construction. Les meilleures progressions de la rentabilité, entre 35 et 40%, appartiennent aux secteurs des équipements électriques, du second œuvre du bâtiment et de la fabrication de matériels de transport.

Les meilleures prévisions d’augmentation de la rentabilité en 2023 sont repérées dans l’agroalimentaire, les équipements électriques et électroniques et le gros œuvre du bâtiment.

L’industrie investit pour l’avenir

L’industrie régionale poursuit ses investissements : +17% en 2022 et +18% en 2023. Une tendance forte comparée à celle des autres grands secteurs : +3,5 et -5,5% pour les services marchands, -0,2 et -4,7% pour la construction. Notables et contrastées les prévisions 2023 d’investissement industriel : - 26,5% pour la fabrication des matériels de transport et + 29% pour l’agroalimentaire.

En résumé, les entreprises du Grand Est ont globalement enregistré une progression de leur activité et de leur chiffre d’affaires, avec un effet volume et un effet prix, malgré des difficultés de recrutement.

Elles ont renforcé leurs équipes, elles ont poursuivi leurs investissements et ont moins souffert, en fin d’année 2022, des problèmes d’approvisionnement de matières premières. En 2023, souffrant d’une visibilité insuffisante, elles vont cependant consolider leurs effectifs, mais réduire, sauf dans l’industrie, leurs investissements.