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Inventer l’agriculture de demain

Accompagnement. À l’initiative de l’incubateur régional Quest for Bioeconomy*, et dans le cadre de son deuxième Bioeco Camp – Hackathon for Sustainability**, une conférence intitulée "Agricultures durables x innovations : enjeux croisés & opportunités" avait l’ambition de mettre en lumière les défis et les opportunités d’une agriculture plus durable, résiliente et innovante.

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Photo de Hervé Pillaud et Serge Zaka
Hervé Pillaud (à gauche) et Serge Zaka, intervenants passionnés d’une conférence passionnante. (Crédits : JR)

À la mi-novembre, le Village by CA, à Bezannes, accueillait l’agroclimatologue Serge Zaka et l’agriculteur spécialiste du numérique Hervé Pillaud pour parler innovations et agriculture durable. Serge Zaka faisait tout de suite la différence entre agrométéorologie – qui relève de la protection agricole sur le court terme – et agroclimatologie, qui doit accompagner des décisions socio-économico-politiques sur le long terme. Si, par exemple, 2022 fut une année exceptionnellement chaude, entraînant de ce fait des pertes de productions agricoles, une projection agroclimatique à l’horizon 2050 montre que la canicule de 2022 sera alors une année normale ! Hervé Pillaud soulignait d’ailleurs que le réchauffement hivernal est le plus problématique car il favorise le développement des maladies.

Voilà une réalité nouvelle à laquelle il importe de trouver des solutions. Dans le même ordre d’idées, il faut se poser la question de l’évolution et de la répartition des aires et des variétés culturales, avec des espèces adaptées au changement – et au réchauffement – climatique. On est là dans le domaine de la biogéographie. Serge Zaka estimait qu’à la fin du siècle les abricots Bergeron, aujourd’hui produits en vallée du Rhône, pourraient l’être… du côté de Reims ! D’où la nécessité de « prendre des décisions politiques à l’échelle des 30 ou 40 prochaines années, voire plus » ! Un travail à la fois sociétal, de recherche, économique, numérique, portant sur l’agronomie, les paysages, le matériel, la génétique… Vaste mais indispensable programme.

L’ia arrive au bon moment

D’où l’intérêt de mettre l’intelligence artificielle au service d’une agriculture intensive… en connaissances. Pour Hervé Pillaud, « les politiques publiques ne changent pas les choses : c’est l’adversité qui fait progresser » – et de citer à cet égard l’exemple du vaccin contre la Covid-19, mis au point en un temps record. Selon lui, « l’IA n’est pas la panacée, mais elle arrive au bon moment », en révolutionnant les usages, et surtout la façon de travailler. Elle va permettre de mieux connaître la nature des sols, par phénotypage numérique à haut débit, de procéder à des sélections génomiques et des conceptions variétales augmentées par l’IA générative.

Passer d’un excès à un déficit est l’une des caractéristiques du changement climatique. Faire de l’eau un bien commun – la conserver quand elle tombe pour mieux l’utiliser quand elle manque - piloté par la connaissance augmentée devient une nécessité. Bien entendu, l’exemple s’applique à d’autres domaines.

La conclusion d’une conférence passionnante ? Il faut sublimer les points forts plutôt que de compenser les points faibles. Voilà l’opportunité qu’offre l’agriculture

* Quest for bioeconomy est l’incubateur du Grand Est dédié aux startups de la bioéconomie. Il accompagne les entrepreneurs dans les domaines de l’agriculture durable, des matériaux biosourcés, des bioénergies et de l’alimentation durable.

** Le Bioeco Camp - Hackathon for Sustainability rassemble des professionnels (industriels, chercheurs, entrepreneurs, agriculteurs...) et des étudiants ayant des profils complémentaires (ingénieurs, développeurs, designers, agronomes...) pour construire les solutions innovantes qui répondront aux enjeux des agricultures durables de demain. L’objectif étant de transformer, en 48 h, une idée en un premier prototype fonctionnel, ouvrant la voie à la création d’une startup ou d’une solution pérenne.