« Le Tribunal administratif, c’est le juge du quotidien »
Justice. Le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a reçu, dans ses murs, le Vice-Président du Conseil d’État, Didier-Roland Tabuteau, dans le cadre de ses visites annuelles aux 42 Tribunaux administratifs de France et 9 Cours d’appel.
« En 1987, quand ont été créées les Cours administratives d’appel, la gestion des tribunaux administratifs et des Cours d’appel a été confiée au Conseil d’État. Cette gestion fait que l’unité de la juridiction est très forte. Ces rencontres sont ainsi une façon de travailler ensemble », indique Didier-Roland Tabuteau, le Vice-Président du Conseil d’État. Une nécessité à la vue du stock d’affaires traité chaque année : 260 000 affaires tous les ans, 30 000 en Cour administrative d’appel et 10 000 en Conseil d’État. « Nous avons aussi dans le champ des juridictions, la Cour nationale du droit d’asile, avec 70 000 affaires par an ainsi que depuis le 1er janvier, la Commission du contentieux du stationnement payant, avec de très nombreuses requêtes. »
Au niveau national, les délais de jugements sont, pour les Tribunaux administratifs, de l’ordre de neuf mois, « si on prend les affaires sans les référés, le délai est d’un an et quatre mois ». Mais la fonction du Conseil d’État est aussi consultative puisqu’elle concerne les avis de projets de loi, d’ordonnances et les décrets. « Depuis 2015, les avis sur les projets de loi sont rendus public. » Exemple avec celui qui sera rendu « très prochainement » sur le projet de loi sur la fin de vie.
« Une justice de proximité »
La caractéristique de la justice administrative est donc « de juger les relations qui concernent les justiciables, les administrés et les pouvoirs publics ainsi qu’entre les pouvoirs publics, cela arrive. Nous sommes le juge du service public, de l’intérêt général. Nous sommes une justice de proximité », insiste le Vice-Président du Conseil d’État qui souligne « l’indépendance et l’impartialité » des conditions d’exercice. Pour illustrer cette justice de proximité, Alain Poujade, le Président du Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a détaillé tout d’abord quelques chiffres avant d’en venir à quelques exemples d’affaires traitées par le Tribunal.
« Avec une équipe de 14 magistrats et 15 greffiers, le tribunal enregistre chaque année environ 3 000 affaires dont 45% concernent le droit des étrangers, 10% la fonction publique, 7% la police, 7 % les affaires sociales. Le reste se divise entre des affaires concernant le travail, les collectivités, l’urbanisme et l’aménagement ou encore les questions de logement », détaille Alain Poujade.
Ces affaires concernent un territoire d’1,3 million d’habitants et s’étendent sur 4 départements soit 1 900 communes. « 45% des affaires concernent la Marne, 22% l’Aube, 17% les Ardennes et 10% la Haute-Marne. » Plus de 250 affaires en référé ont été enregistrées au cours de l’année 2023 (+29% d’augmentation) et c’est avec de bonnes statistiques concernant les délais, que le Président du tribunal administratif annonce que dans la juridiction de Châlons, les délais qui sont « une préoccupation constante », sont meilleurs qu’au niveau national avec une moyenne d’une année et 13 jours et 6 mois et 27 jours si l’on inclut les référés. Sur les jugements rendus, 25% font l’objet d’un appel, et « 87% des solutions prises par le TA de Châlons sont suivies par la Cour d’appel de Nancy ».
RSA, OQTF, santé, harcèlement scolaire
Sur 2022-2023, 5 800 affaires ont été traités avec des problématiques très variées. « Le Tribunal administratif, c’est le juge du quotidien », souligne Alain Poujade donnant quelques illustrations avec des affaires concernant les remboursements de RSA, les contentieux des permis de conduire… « Les retraits de points, c’est ici que ça se juge », indique-t-il. « Nous sommes dans une région agricole, le contentieux des aides agricoles fait donc partie du volume d’affaires traitées. Celui de la chasse également. »
La taxe foncière, l’impôt sur les sociétés, le contentieux des étrangers avec les OQTF, le contentieux des élections, l’éducation avec des affaires concernant le harcèlement scolaire, la santé avec la responsabilité hospitalière, égraine-t-il aussi. Concernant les référés, le TA est particulièrement réactif puisqu’une affaire concernant une manifestation interdite par le préfet, en décembre devant la cathédrale de Reims – pour laquelle les organisateurs avaient demandé un référé liberté pour obtenir la suspension de cet arrêté – a été jugée en 7h et 26 minutes ! « Pendant des années, on a accusé la juridiction administrative d’être trop longue, et bien en 2023, elle sait rendre une décision en moins de 8 heures ! » assène non sans humour, Alain Poujade.