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« Désengorger la Cour d’Appel », le message fort du Premier Président Christophe Regnard

Justice. L’audience Solennelle de rentrée de la Cour d’appel de Reims a été l’occasion d’évoquer l’activité 2024 comparativement aux dernières années, mais également d’évoquer des pistes d’amélioration de cette juridiction dont le rôle est de réexaminer, à la demande des justiciables, des jugements des tribunaux et des cours du premier degré.

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Photo de la Cour d'Appel
Le Premier Président de la Cour d’Appel a évoqué l’état des effectifs de son ressort : des progrès à Charleville-Mézières, des manques à Châlons-en-Champagne et une vigilance toute particulière pour Troyes. (Crédits : GD)

Pour rappel, le ressort de la Cour d’Appel de Reims comprend les départements des Ardennes, de la Marne et de l’Aube, incluant quinze juridictions : la Cour d’Appel de Reims, les tribunaux judiciaires de Charleville-Mézières, Troyes et Reims et Châlons-en-Champagne, les conseils de prud’hommes de Charleville-Mézières, de Troyes, de Châlons-en-Champagne, Epernay et de Reims, les tribunaux de commerce de Sedan, de Troyes, de Reims et de Châlons-en-Champagne et le tribunal de proximité de Sedan.

Globalement, le bilan de l’activité 2024 de la Cour d’Appel de Reims recense un total de 10 418 dossiers, affaires nouvelles, terminées ou en stock, soit une activité en baisse générale de 5,5% sur un an, contre une hausse de 2,8% en 2023. Dans les trois dernières années, les affaires civiles pèsent en moyenne 63% des dossiers et les affaires pénales 37%. Ces dernières sont proportionnellement en légère hausse.

Sur l’état de l’ensemble des dossiers de la période du 01/12/2023 au 01/12/2024, les nouvelles affaires comptent pour 38%, les affaires terminées pour 39% et les affaires en stock pour 23%. Ainsi en 2024, et comparativement à l’année 2023, la Cour d’Appel de Reims a enregistré 3 916 dossiers nouveaux (-7,5%), en a terminé 4 054 (-1,8%) et dispose d’un stock, affaires en cours, de 2 403 (-7,8%).

Simplifier les procédures et responsabiliser le justiciable

On notera, en matière pénale, une baisse des appels en correctionnel, qu’il s’agisse des affaires nouvelles, terminées ou en stock et une hausse des dossiers pour la chambre spéciale des mineurs : + 30,8% pour les affaires nouvelles, +4% pour les affaires terminées et + 15,6% pour les affaires en stock. Si les affaires en stock sont moindres au niveau de la chambre d’application des peines ou celle de l’instruction, elles dominent les assises (+45% en un an) et la cour criminelle (+115,4%).

Dans son discours de rentrée, le Premier Président de la Cour d’Appel a tout d’abord évoqué l’état des effectifs de son ressort : des progrès à Charleville-Mézières, des manques à Châlons-en-Champagne et une vigilance toute particulière pour Troyes. Sur ce sujet, Christophe Regnard constate : « Seule la résorption des vacances de poste a été en partie comblée ». Pour rappel, la demande formulée l’année dernière, par le Premier Président et par la Procureure Générale, est de 21 postes au siège et au parquet. Pessimisme de rigueur en ce domaine, le Président Regnard conclut ce chapitre : « Nos espoirs d’obtenir satisfaction en 2025 sont minces ».

En termes de simplification des procédures et de responsabilité des justiciables, le Premier Président Regnard s’est montré plutôt disert dans son rôle de force de propositions. En matière pénale tout d’abord, la Cour d’Appel pourrait disposer de ce pouvoir : « Envisager de déclarer l’appel non soutenu et nous contenter d’une décision rendant toute sa force au jugement de première instance ? ». Dans le champ du civil, Christophe Regnard remarque la multiplication des appels perdus d’avance, portés par l’aide juridictionnelle : « Ne devrait-on pas ouvrir la possibilité aux présidents de chambre de déclarer non admis un appel, lorsque manifestement, l’appel, au vu du droit et des arguments avancés, n’a strictement aucune chance de prospérer ? Après tout la Cour de Cassation utilise bien la non admission des pourvois depuis des années ! »

Arrêter de dénigrer la justice, un impératif social

Dans son discours de rentrée solennelle, la Procureure de la République cite Balzac : « Se défier de la magistrature est un commencement de dissolution sociale » et monte au créneau face aux pourfendeurs de la justice, avec cette question ironique : « L’autorité judiciaire serait donc la cause des actes de délinquance… Son laxisme serait en quelque sorte organisé… Une justice clochardisée, voilà ce que nos concitoyens entendent à longueur de temps… »

En réponse à son propre questionnement, Dominique Laurens en appelle à la réalité des chiffres 2024 du ressort de la Cour d’Appel : « 18 955 réponses pénales aux affaires soumises par les services de police, de gendarmerie et des douanes, 10 093 poursuites, 8 762 alternatives aux poursuites réussies, 10 631 personnes jugées, 1 582 années d’emprisonnement et 257 peines d’emprisonnement de plus d’un an ». La Procureure Générale rappelle l’étendue du travail du parquet au travers des grandes priorités : « l’évolution de la pénétration du narcobanditisme, la lutte contre les violences intrafamiliales, contre l’insécurité routière, sans oublier la protection et la préservation du cadre de vie ».

Des décisions confirmées à près de 50%

Selon les statistiques du Ministère de la Justice, 48% des jugements en première instance sont confirmés en Cour d’Appel. 30% bénéficient d’une infirmation partielle et 22% d’une infirmation totale. En 2023, 20% des décisions de première instance ont été frappées d’appel. Avec cette répartition 68% en matière civile et 32% en matière pénale, avec des délais moyens de jugement de 15,5 mois au civil et 5 mois au pénal.