Entreprises

Des robots dans les vignes

Viticulture. Dans le cadre de la journée technique organisée par les Chambres d’agriculture du vignoble champenois et du Comité Champagne, près de 300 viticulteurs ont échangé autour de l’innovation collective. Avec, en point d’orgue, l’utilisation de la robotisation dans les vignes.

Lecture 4 min
Photo du robot électrique et autonome Bakus
Le robot électrique et autonome Bakus, développé par la start-up rémoise Vitibot est un des emblèmes de la robotique en viticulture. (Crédits : BB)

Apparus il y a une bonne dizaine d’années dans les vignes champenoises, les robots ont d’abord enthousiasmé et séduit avant de décevoir à l’usage et de susciter à nouveau l’intérêt grandissant des professionnels. Aujourd’hui de plus en plus perfectionnés, ils n’ont pas encore tout à fait entièrement convaincu, même si la filière s’accorde grandement à voir un bel avenir à ces innovations, sous certaines conditions.

Qu’ils soient autonomes, électriques ou à moteur thermique, pilotables à distance ou programmables… les robots s’avèrent porteurs de promesses et de fantasmes. Mais qu’en est-il vraiment dans la réalité ?

Photo du robot Traxx
Pour son robot Traxx, Tecnoma fait le choix d’un moteur au GNR. (Crédits : BB)

« Les machines robotisées ne représentent que 0,5% du parc de machines champenois, soit 30 machines », souligne Mathieu Liébart, chef de projet viticulture, agroéquipements et robotique au Comité Champagne. « C’est intéressant, ça coche beaucoup de cases mais ça ne prend pas. Pourquoi ? », s’interroge-t-il. Techniquement, cela fonctionne, comme a pu le constater la CUMA « Terre de Meunier » (18 adhérents pour 30 hectares d’engagement) qui a investi 450 000 euros pour faire l’acquisition de deux robots Bakus.

Pour les travaux d’entretien des sols, il a ainsi été constaté une réduction de 54% des émissions de CO2 par rapport à des tracteurs thermiques et une forte baisse de l’utilisation du glyphosate. « Quand on parle avec des viticulteurs, le premier frein, c’est le coût », note Mathieu Liébart, pour qui il faut prendre en compte l’amortissement, les dépenses contraintes (maintenance, assurances...) et les dépenses variables (qui évoluent selon la surface d’exploitation).

Pour une machine à 200 000 euros, soit une immobilisation de 40 000 euros par an sur cinq ans, la surface de l’exploitation est aussi un facteur prépondérant d’aide à la décision et les spécialistes évaluent cet équilibre à un seuil minimum situé entre 7 et 8 hectares d’exploitation.

Le débit de chantier est source d’hésitation, tout comme la nature du travail demandé qui est elle aussi déterminante. « Pour l’entretien des sols, d’un point de vue économique on est à peu près à l’équilibre ». Les robots semblent moins adaptés en pulvérisation sur des grandes surfaces, mais présentent un intérêt certain sur des petites parcelles, dans des zones plus compliquées. « Pour le travail du sol, qui n’a pas un caractère d’urgence, les temps de travaux ne sont pas si différents. Cela évite de sortir un tracteur enjambeur de 140 chevaux et de 5,5 tonnes qui consomme 12 litres à l’heure ».

Quant à la logistique et à la maintenance, elles sont également source d’interrogations, même si, précise Mathieu Liébart, qui a testé les services de dépannage des concessionnaires, « les filières se structurent et les relais de terrain sont assez efficaces ».

Pour le spécialiste, « il n’y a pas de recette miracle, il faut réinventer le modèle et surtout ne pas essayer d’opposer les deux systèmes de conduite, qui sont finalement complémentaires ».

photo du SabiAgri
Les enjambeurs et chenillards 100% électriques SabiAgri (Ravillon) proposent 10h d’autonomie. (Crédits : BB)

S’il existe encore de nombreuses interrogations, notamment réglementaires et normatives pour le développement des robots 100% autonomes, le Comité Champagne travaille à la structuration et à la sécurisation de la filière robotique via l’association RobAgri qui regroupe 97 acteurs (constructeurs, centres de recherches, utilisateurs finaux....). Un développement qui va passer par une montée en puissance de la filière, avec des entreprises de plus en plus solides, adossées à de grands groupes et portées par une réelle logique industrielle. « L’idée sera d’accélérer le mouvement, mais il ne faut pas oublier que c’est une filière qui n’a que dix ans et qui se structure. Tous les espoirs sont permis et je suis plutôt confiant sur le développement à terme de ces technologies ».