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Cycles Mercier : le double coup d’arrêt

Industrie. Les espoirs de relocaliser à Revin l’emblématique marque française des Cycles Mercier se sont définitivement envolés.

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Cycles Mercier : le double coup d'arrêt
Les acteurs locaux vont désormais chercher un avenir à la friche Porcher.

Cette fois, le couperet est tombé pour de bon. Le ministère de l’industrie n’étant nullement disposé à revenir sur la décision de désengagement prise le 29 juillet, Jean Rottner a fait savoir le 11 août, après s’être entretenu avec Agnès Pannier-Runacher, que la Région Grand Est qu’il préside, jetait à son tour l’éponge : « Nous sommes sûrs que l’Etat ne reviendra pas en arrière. C’est clair et net. Et moi je n’ai pas la capacité à aller à l’encontre de cette mesure. Ce qui m’intéresse, maintenant, c’est de reconstruire. Je préfère être dans l’action et trouver une autre solution. Nous allons y travailler ». Rattrapé semble-t-il par « des fautes graves », l’investisseur Jean-Marc Seghezzi est désormais complètement isolé.

Lâché par le rétropédalage des deux acteurs majeurs du montage financier, il avait fait rêver les Ardennes et plus particulièrement la Vallée de la Meuse en prévoyant l’embauche de 270 personnes en cinq ans pour fabriquer 500 000 vélos mécaniques et à assistance électrique sur un marché en pleine croissance (2,7 millions d’unités vendues en 2020). Il va devoir désormais trouver un site européen pour mettre en oeuvre son projet.

« Certes, on a pris un gros coup sur la tête mais on ne va pas se décourager pour autant. Il faut s’efforcer de rester positif. »

Car il est désormais considéré persona non grata sur le territoire français. L’Etat (5, 8 millions d’euros) et la Région (2,8 millions d’euros) en se retirant du montage financier ont scellé la fin d’un programme industriel alléchant qui, au grand dam des élus et de la population, n’aura jamais débuté sur le terrain. Après cet incroyable fiasco, Revin gangréné par un taux de chômage de 27% déchante. La friche Porcher et son hangar de 11 000 m2 resteront donc encore quelques temps en déshérence.


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Arrivés à la Bouverie en sprintant, les Cycles Mercier ne seront même pas parvenus sur la ligne de départ fixée en décembre 2021. Le plan « mal géré sur le fond et sur la forme » selon le député LR Pierre Cordier a déraillé avant d’être envoyé dans le décor. Une énorme désillusion pour une commune qui ne s’est jamais remis de la disparition de ses deux poumons : Porcher et Electrolux, ce qui a débouché sur la perte de près de 6 000 habitants.

Vers un bâtiment blanc ?

« Maintenant que c’est mort, il faut malheureusement tourner la page. Je ne vois pas comment il pourrait en être autrement. A partir du moment où l’Etat et la Région ne soutiennent plus le projet, la communauté de commune Ardennes, Rives de Meuse n’allait pas engager de l’argent public dans une opération devenue subitement foireuse alors que jusque-là personne ne contestait sa faisabilité économique », constate avec amertume Bernard Dekens. Le président communautaire, chargé de l’immobilier d’entreprise, pense donc déjà à l’avenir.

« Certes, on a pris un gros coup sur la tête mais on ne va pas se décourager pour autant. Il faut s’efforcer de rester positif et voir ce qu’il est désormais possible de faire avec les six millions d’euros que l’Etat s’est engagé à redéployer afin que les Ardennes en conservent le bénéfice. On souhaite que cela soit suffisant pour attirer de nouveaux investisseurs ici ». Devenue propriétaire de la friche Porcher cet été, Ardennes Rives de Meuse est maintenant penchée vers l’avenir.

« Il faut que, dès la rentrée, nous puissions travailler à la reconversion du bâtiment laissé à l’abandon. »

« Il faut tout de suite avoir une réflexion sur cette friche. Voir si on fait un aménagement basique après avoir dépollué le site ou si on effectue des travaux de réhabilitation en vue d’accueillir un ou des projets. Et on aura alors besoin de tout le monde pour insuffler une nouvelle dynamique à ce territoire ». Le président de la Région, Jean Rottner, s’inscrit déjà dans cette stratégie au point d’en faire un défi personnel.

« Il faut que, dès la rentrée, nous puissions travailler à la reconversion du bâtiment laissé à l’abandon. Nous allons oeuvrer pour faire de la vallée de la Meuse une terre de reconquête d’industrie en préparant en premier lieu, à blanc, le terrain ». Avec l’aide des deux grands opérateurs nationaux, Business France et Bpifrance, chargés par l’Etat d’identifier et d’orienter prioritairement des projets industriels, le site de Revin est en haut de la pile. Jean Rottner en dira sûrement plus lors de la dernière semaine d’août puisqu’il a d’ores et déjà décidé d’effectuer sa rentrée politique dans les Ardennes.