Contrôles des colis chinois : les Douanes sont sur le pont
E-commerce. Après le scandale Shein et à l’approche des fêtes de Noël, les services des Douanes et de la DGCCRF multiplient les contrôles sur la plateforme de l’aéroport marnais de Vatry.
Mercredi 12 novembre, aéroport de Vatry, Marne. Dans les entrepôts, des dizaines de palettes sont en transit. À peine débarqués sur le sol français en provenance de Chine, les milliers de cartons de colis attendent d’être contrôlés par les services des Douanes. Des vérifications qui se sont largement intensifiées depuis quelques semaines. À la suite du scandale des poupées vendues par la marketplace du site Shein, le gouvernement a demandé à ses services aux frontières de renforcer les contrôles sur les colis en provenance de Chine.
Si l’objectif numéro 1 est bien d’empêcher l’importation de produits illégaux (armes, drogues, objets à caractère dangereux ou pédopornographique…) sur le territoire national, les opérations de contrôle vont aujourd’hui encore plus loin. « Des procédures sont actuellement diligentées par le gouvernement à l’encontre d’un certain nombre de plateformes avec cette idée que la vente en numérique n’est pas le Far West, souligne Romain Royet, le préfet de la Marne. Dans l’Union Européenne et en France on a des règles. Ces règles visent d’abord à protéger le consommateur et à éviter que des objets dangereux pour lui consommateur soient importés sur le territoire. Et bien entendu les règles visent aussi à protéger la propriété intellectuelle s’agissant de la contrefaçon. L’objet de ces contrôles est donc de vérifier quels sont les flux qui arrivent, dans quels types de paquets et d’aller chercher des produits dangereux, interdits ou contrefaits voire des produits illégaux comme des armes ou des produit stupéfiants ».
10 millions de colis
En plein pic d’activité des sites de e-commerce à l’approche de Noël, le nombre de colis qui affluent vers la France depuis la Chine est en forte progression. Toutes les plateformes sont concernées par ces contrôles, ceux-ci portant sur tous les produits non-conformes à la réglementation européenne et nationale, comme l’explique Philippe Reynaud directeur régional des Douanes : « Lors des contrôles effectués à Vatry depuis jeudi dernier (6 novembre, NDLR) nous n’avons pas trouvé ce que nous appelons des prohibitions douanières - soit des armes ou des jouets assimilés à de la pédopornographie - mais nous avons plutôt constaté des infractions liées à de la non-conformité. Ce sont surtout des problèmes de normes et de contrefaçons, essentiellement sur des jouets, des produits électriques et électroniques ».
Aujourd’hui, 95% du flux de e-commerce en France transite par Roissy. Et Vatry, avec 10 millions de colis par an, est la deuxième plateforme nationale de délestage représentant environ 3% du flux national. Une situation qui explique l’attention particulière portée aux contrôles, mais qui n’est pas nouvelle : la direction générale des douanes a en effet ouvert un bureau pérenne sur l’aéroport de Vatry depuis l’an dernier pour faire face à cet afflux de marchandises et pour pouvoir le contrôler de la même façon qu’à Roissy. « Ici, nous sommes dans un entrepôt sous douane. En réalité, la douane, c’est le premier acteur à la frontière, car les plateformes de e-commerce sont des frontières numériques. Mais ensuite, ces marchandises peuvent être stockées dans des entrepôts sur le territoire avant d’être redistribuées par un opérateur postal ou autre. Bien évidemment, d’autres services peuvent également effectuer des contrôles comme la DGCCRF par exemple », rappelle le directeur régional des Douanes. En cette fin d’année, une dizaine d’agents des douanes de Vatry et de Reims, venus en renfort, assistés de deux contrôleurs de la DGCCRF procèdent aux opérations de contrôles renforcés, qui peuvent concerner plus de 1 000 colis par jour.
25% de colis non conformes
« Il faut savoir que 100% des colis qui arrivent ici sont contrôlés par notre système d’information et par notre ciblage. Ensuite, ce sont quelques dizaines de colis qui sont ouverts chaque jour », précise Philippe Reynaud. L’intelligence artificielle effectue donc un premier repérage avant de céder la place à la main humaine. « Sur ce contrôle, nous faisons un ciblage très large, mais parfois ce sont aussi des ciblages plus précis en fonction des déclarations effectuées dans le système d’information de la douane. Nous avons une machine qui traite l’ensemble des colis et donc, toutes les données les concernant. Nous pouvons alors décider d’ouvrir des colis qui sont par exemple déclarées comme jouets, mannequins ou poupées, à l’image de ce qui a pu être trouvé ces derniers jours à Roissy. Mais aujourd’hui, ce que nous regardons surtout, à l’approche du Black Friday ou de Noël, ce sont les produits électroniques et les jouets pour faire attention à la santé et à la protection des consommateurs ». Et à ce titre, la pêche effectuée par les agents des Douanes s’avère plutôt fructueuse. Baskets, cartes Pokemon, lunettes de soleil, produits cosmétiques, produits électriques et électroniques, serviettes, jouets sans notice… 25% des colis ouverts sont aujourd’hui non conformes.
Spécialisés et habitués à ouvrir des colis et à contrôler du fret cargo au quotidien depuis des années, les agents sont constamment formés au repérage des produits contrefaits ou non conformes. Imitations grossières, points de colle apparents, absence d’étiquetage... « Nous voyons beaucoup de produits sur lesquels il manque la certification CE, des produits de contrefaçon, avec des risques d’incendie à l’usage, par exemple », explique Cédric Caumont, agent vérificateur et adjoint au bureau des Douanes. Une fois détectés, les produits non conformes sont saisis, détruits mais peuvent aussi faire l’objet d’amendes, de poursuite ou d’analyses en laboratoire et être utilisés pour réaliser des signalement auprès des services enquêteurs dans le cadre d’un démantèlement de réseaux, par exemple. « Ces contrôles renforcés durent plusieurs jours et ensuite, évidemment il faudra continuer à contrôler les arrivages quotidiens et à gérer les procédures de saisie et de destruction des colis qu’on aura retenus pendant ces opérations ».