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Baisse des chantiers publics : le BTP ardennais en alerte

Bâtiment. Dans un contexte de baisse d’activité et de hausse des défaillances d’entreprises, la Fédération du BTP ardennais ne compte pas baisser les bras.

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Photo de Samuel Deglaire
Samuel Deglaire, le président du BTP ardennais. (Crédit : PR)

Sans verser dans le pessimisme, Samuel Deglaire le président de la Fédération du BTP ardennais évoque néanmoins des « perspectives assez sombres et négatives pour l’exercice 2024 ». À cause notamment de la crise majeure connue dans le logement neuf « sans que des signes positifs ne viennent nous rassurer ». Si, dans les Ardennes, les autorisations de construire ne subissent qu’une baisse de 10 % sur les douze derniers mois, on observe toutefois un effondrement de la promotion immobilière. « Un chiffre résume cette situation : les ventes de logements neufs sont en chute de 41 % au premier trimestre 2024 ». Les Jeux Olympiques marquent également l’arrêt ou l’absence de lancement de nombreuses opérations en Ile-de-France.

Selon Samuel Deglaire, la hausse du coût de construction, l’augmentation du prix des matériaux qui avait déjà connu une hausse historique en 2002-2023 expliquent aussi cette situation. Pour les professionnels du BTP ardennais, la construction de logements souffre également des conditions d’accès au crédit tout en étant pénalisée par la réforme du Prêt à Taux zéro. « Nous sommes conscients que l’Etat doit trouver des économies, mais ici les ménages sont souvent limités dans leur capacité d’emprunt. Il faudrait instaurer un mécanisme leur permettant de faire construire ».
Samuel Deglaire déplore aussi la chute catastrophique du secteur non-résidentiel neuf, avec -40 % de mise en chantiers de bureaux, commerces, usines, bâtiments administratifs et agricoles. Les surfaces autorisées étant en baisse de 20% dans le département, la situation ne devrait pas s’améliorer au cours des prochains mois.

1 100 salariés perdus en dix ans

Le patron du BTP 08 a aussi regretté la frilosité des collectivités locales qui ne profitent pas toujours des subventions (DETR, DSIL, Fond vert, Plan Ecole) qui leur sont accordées pour entreprendre des travaux. « Ce manque d’engagement est peut-être lié aux difficultés administratives empêchant les mairies et communautés de communes à mener à bien des dossiers qui seraient pourtant autant de chantiers pour les acteurs du BTP ». Constatant qu’en dix ans, la profession a perdu plus de 1000 salariés, soit une baisse de 25 % des effectifs, le président a regretté la concurrence déloyale exercée par les 1 100 micro-entrepreneurs recensés dans les Ardennes. « Un phénomène qui fait mal aux artisans qui ne peuvent s’aligner sur les prix délirants proposés par ces pseudos-professionnels. La colère de nos adhérents est justifiée concernant ce traitement à deux vitesses ».

Dans le même temps, les exigences de l’Etat ne diminuent pas : augmentation des salaires, amélioration des conditions de travail, versement de primes, baisse réglementaire des seuils d’émission de carbone, ex-taxe sur les véhicules de sociétés... Samuel Deglaire milite donc pour la levée des freins juridiques empêchant les bailleurs sociaux de créer du logement intermédiaire. Il réclame aussi la réduction des délais d’instruction des permis de construire et une action sur l’investissement locatif où les innombrables dispositifs (Lois Malraux, Pinel, Denormandie) s’avèrent complexes et onéreux pour l’Etat. Et face à la baisse de l’activité conjoncturelle, il demande le soutien de l’Etat pour placer les salariés en chômage partiel.

« Or les demandes sont systématiquement refusées au prétexte que la crise serait structurelle ». Le président appelle ses adhérents à se préparer aux mutations de demain, comme l’adaptation au vieillissement de la population qui entraine des besoins considérables dans les solutions d’hébergement ou les attentes plus pointues des clients sur les équipements, les performances et les préoccupations environnementales par exemple. L’appétence pour les matériaux bio-sourcés et le développement du réemploi en font partie. « Il y va de notre rentabilité, voire de notre pérennité. Il faut donc se former aux nouveaux matériaux, aux nouvelles techniques de construction et réfléchir aux pratiques environnementales ».