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Arnaud Lallement, fils de restaurateurs et enfant des guides

Gastronomie. Quel intérêt cette distinction mondialement reconnue représente-t-elle ? Le triple étoilé Arnaud Lallement répond.

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Photo d'Arnaud Lallement
(Crédit : Audex com)

Patron de l’Assiette Champenoise depuis près de 25 ans, Cinq toques Gault et Millau en 2012, guide qui lui accordera ensuite la note de 19,5/20, reconnu « Cuisinier de l’année » par ses pairs, triple étoilé Guide Michelin depuis 2014, 2e « Meilleur restaurant du monde » en 2015… Arnaud Lallement précise en début d’entretien   : « Je suis fils de restaurateur et enfant des guides gastronomiques. » Et, pour être convainquant, il précise avoir appris à compter avec les étoiles du Michelin et à lire avec le Gault et Millau ! C’est avec l’opinion des guides qu’il a fait évoluer l’Assiette Champenoise depuis près d’un quart de siècle.

Des étoiles, entre honneur et exigences

Conquérir des étoiles et puis les conserver, est-ce la même démarche ?

« Il faut sans cesse reconquérir cette distinction qui nous honore et nous oblige également et le Michelin nous interdit de nous endormir sur l’acquis. »

Quelles conséquences pour l’économie d’un établissement étoilé ?

« Quand nous investissons, c’est pour nos clients et nos collaborateurs et pas pour conserver nos étoiles qui distinguent en premier notre cuisine. » Mais, admet Arnaud Lallement, il est plus facile d’investir quand on est triple étoilé et qu’on reçoit plus de clients et donc, quand le chiffre d’affaires augmente.

L’exigence change de terrain. Plus de remplissage excessif : « Nous avons orienté notre travail différemment et privilégié la qualité d’une quarantaine de couverts au détriment des habitudes passées focalisées sur les groupes ou les séminaires. »

Plus de chiffre d’affaires, plus d’investissements et de dépenses et donc une rentabilité fragile ?

« Si l’on considère la seule activité du restaurant, notre rentabilité est à l’équilibre. C’est notre hôtel qui nous permet d’atteindre une certaine rentabilité et les deux activités sont étroitement liées. » De quoi parvenir à 3 ou 4% de rentabilité totale, précise Arnaud Lallement qui poursuit : « Ce n’est pas la rentabilité qui passionnent tous les étoilés Michelin mais leur cuisine et la satisfaction des clients. »

Des promus mais aussi des déchus, le Guide Michelin fait-il bien son travail ?

« Je ne me permets pas de juger le guide, il appartient à ses inspecteurs de nous juger. C’est parfois dur, c’est la règle du jeu et il faut l’admettre. Le Guide Michelin est tout aussi utile pour les restaurateurs que pour les clients. J’ajoute qu’il contribue à l’excellence de la cuisine, ici en France et à l’étranger dans les pays dans lesquels il est présent et qu’il œuvre largement à l’expansion du tourisme. »

Des projets pour l’avenir ?

« Un projet, me battre encore longtemps pour conserver mes étoiles, mais évidemment, tous les ans, des travaux pour toujours améliorer l’établissement, des travaux nécessaires avec ou sans les guides gastronomiques et qui ne passent pas inaperçus. Nos clients les apprécient et les inspecteurs les jugent, d’une manière ou d’une autre. »

Un étoilé Michelin peut-il être un des moteurs de l’attractivité régionale ?

« La Champagne est depuis longtemps attractive, j’essaie aujourd’hui de lui rendre ce qu’elle m’a donné. Ma priorité est de faire participer les Champenois à l’évolution de notre maison ».

S’il est prématuré de parler de succession – Arnaud Lallement vient de fêter ses 50 ans – Brice Lallement, 25 ans, vient de terminer ses classes et de rejoindre l’Assiette Champenoise, tout un symbole au bord de l’émotion : « Il s’agit beaucoup plus d’une transmission et c’est important parce que je n’ai pas eu cette transmission du vivant de mon père et que lui succéder a été trop brutal. »