50 M€ d’investissement pour le site L’Oréal de Saint-Quentin
Cosmétique. L’Oréal ouvre les portes de ses sites en région. À Saint-Quentin, l’usine fêtera cette année son soixantième anniversaire. 60 ans d’évolution et de nombreux investissements. Le dernier en date, de 50 millions d’euros, a été réalisé afin de produire une nouvelle ligne de cosmétiques, suite au rachat de la marque américaine CeraVe.

Exit l’image d’une marque parisienne évoluant dans le monde de la mode et du luxe. L’Oréal veut désormais revendiquer son appartenance aux territoires français les plus ruraux, là où se trouvent ses onze sites de production dans l’Hexagone. L’objectif ? Ouvrir les portes de ses usines, mettre en valeur son savoir - faire et rappeler qu’elle fait partie de la filière industrielle cosmétique, deuxième contributeur exportateur à la balance commerciale française.
Historiquement, la marque est née en 1909, dans l’esprit d’un chimiste français, Eugène Schueller, qui a construit son empire en commençant par vendre une formule de teinture pour cheveux non nocive aux professionnels de la coiffure. C’est d’ailleurs en direction de ces derniers que le marché s’est tout d’abord développé, avec une très grande place accordée à la recherche. Ce qui est toujours le cas, puisqu’aujourd’hui, L’Oréal est détenteur de 694 brevets. « Notre ADN est celui de l’innovation. 4 000 chercheurs travaillent pour le groupe et huit centres de recherche sont en France ce qui représente 70% de notre R&D », explique la Directrice des Affaires publiques, Elsa Chantereau.
Quatre grandes divisions
L’Oréal France représente ainsi 50 marques et touche plus de 42 millions de consommateurs. Une stratégie basée sur quatre canaux de distribution : le premier repose sur une diffusion auprès du grand public, une division qui permet « d’universaliser la beauté », comme aime à le souligner le groupe. Les produits distribués le sont ainsi dans des enseignes de grande distribution avec des marques comme L’Oréal Paris, Garnier, Dop, Mixa, Narta, Mennen, Ushuïa, etc. Le deuxième canal est celui du luxe, avec des références comme Yves Saint Laurent, Lancôme, Azzaro, Biotherm, Mugler, etc. « Cette division nous permet d’exporter beaucoup à l’international », précise Elsa Chantereau. Le troisième canal de distribution est celui, historique, des produits destinés aux professionnels. « Un marché BtoB qui permet d’avoir une relation très forte avec les coiffeurs aussi bien en boutique que dans les centres de formation. » Un secteur important pour le groupe donc, avec des marques comme L’Oréal Professionnel Paris, Kerastase, Shu Uemura. Enfin, la dernière division du groupe est celle de la beauté dermatologique, un secteur qui se développe fortement et qui permet de vendre des marques comme Laroche-Posay, Vichy, ou encore la dernière acquisition du groupe, CeraVe, pour laquelle le site de Saint-Quentin s’est fortement transformé. « Nos contacts sont les pharmaciens, mais aussi les dermatologues et les médecins. Ces produits sont souvent vendus sur prescription médicale quand il y a des problèmes d’acné, de psoriasis ou encore des soins de suite liés au cancer », détaille la directrice des Affaires Publiques.
98% des produits vendus en France sont fabriqués sur le territoire. Un pourcentage représentatif du savoir-faire du groupe et qu’il souhaite désormais mettre en valeur. En France, un emploi direct chez L’Oréal génère 5,2 emplois indirects. « Nous avons 12 000 pharmacies partenaires, 35 000 coiffeurs, 1 900 parfumeries et 900 fournisseurs qui contribuent à notre activité. » Le groupe veut donc insister sur l’importance du secteur de la cosmétique dans la dynamique industrielle du pays, « l’hygiène et la beauté sont importants dans une société comme la nôtre. Aussi, il contribue à perpétuer un savoir-faire et un patrimoine industriel. »
Trois technologies de fabrication
Ce qui est le cas de l’usine de Saint-Quentin qui compte 310 collaborateurs et s’apprête à fêter ses 60 ans. Une implantation dans les Hauts-de-France qui vient compléter celle d’un autre site, celui de Caudry. « Cette usine s’est beaucoup transformée au fil des années pour y intégrer plusieurs technologies différentes. On y a fait des shampoings, des parfums, des sticks, des pots et des tubes, et depuis 2013 des aérosols et des roll-on. Aujourd’hui, nous franchissons un nouveau cap, pour intégrer les soins de la peau », explique Guillaume Delaplace, le Directeur du site depuis 2023 (photo).
Le produit phare fabriqué sur place est la laque Elnett, mais l’usine ne cesse de se moderniser et de s’adapter pour produire « de nouvelles recettes ». Et c’est en filant la métaphore culinaire que le directeur d’usine en dit un peu plus sur la méthode de production : « Un peu comme dans une recette de cuisine, nous allons peser les différents ingrédients dont nous allons avoir besoin. Ensuite, intervient la partie ‘‘thermomix’’ où nous mélangeons les ingrédients dans de très grandes cuves. Là, on va chauffer, refroidir et de nouveau mélanger pour avoir la qualité de jus que l’on souhaite. Ensuite, nous allons transférer les mélanges dans la partie de conditionnement que cela soit dans des bouteilles ou des tubes. » Chaque jour, un million d’unité sortent ainsi des 25 lignes de production. 500 formules différentes peuvent y être élaborées à l’aide de 600 matières premières. Des chiffres impressionnants, à la hauteur de la surface du site : 55 000 m2 .
50 millions d’euros d’investissement
Mais l’ambition du groupe pour l’usine ne s’arrête pas à ces chiffres et il voit encore plus grand pour le site de Saint-Quentin puisque L’Oréal vient d’y investir 50 millions d’euros pour installer quatre nouvelles lignes de production et dorénavant, fabriquer les produits de la marque CeraVe, dans le but de produire au plus près de ses marchés. « Le projet a été initié en 2022 avec l’idée de moderniser le site et, surtout, de le doter d’une nouvelle technologie pour le soin de la peau en commençant par CeraVe mais aussi dans l’optique d’y intégrer d’autres marques par la suite. C’est une transformation vraiment forte parce que produire du soin de la peau, c’est très différent de ce que l’on faisait jusqu’à présent », indique Guillaume Delaplace.
Pour cela, trois cuves géantes (appelées Skid) pouvant accueillir jusqu’à 20 tonnes de mélange ont été installées avec tout un réseau de tuyaux amenant « les jus » jusqu’aux lignes de conditionnement. Pour accompagner l’évolution des besoins des consommateurs, notamment dans la catégorie du soin de la peau, de nouvelles technologies de production ont donc été intégrées : extension du site, nouvelles lignes de conditionnement, zones de traitement et unité de refroidissement. « En termes de flux, d’approvisionnement, c’est un changement massif car il a fallu adapter l’outil industriel à l’arrivée de cette nouvelle technologie. Notre station d’épuration a donc été agrandie, le recyclage de l’eau a été mis à jour ; la capacité de production d’autres process a été augmentée quand de nouveaux groupes de chauffage et de refroidissement ont été installés. Enfin, un nouvel atelier de fabrication a vue le jour pour produire ce soin de la peau dans un tout nouveau bâtiment », détaille le directeur de l’usine. La nouvelle production de la marque américaine, acquise en 2017 et auparavant produite sur un autre site, a débuté en février 2025 et sort 80 000 unités de flacons de 500 ml en 24 heures.
Efficacité énergétique

L’usine se distingue aussi par son pôle R&D et son impression de pièces en 3D, pour des prototypes ou de la casse de machines. « Nous sommes capables d’usiner des formes complexes. Là où on mettrait un mois à recevoir la pièce d’un fournisseur, avec nos machines 3D nous pouvons usiner la pièce en une journée et ainsi, éviter l’arrêt prolongé des lignes de production, ce qui démontre notre grande agilité », souligne Guillaume Delaplace. En outre, l’usine s’engage activement dans une démarche de développement durable avec des initiatives concrètes pour l’efficacité énergétique, la réduction d’eau, et la réduction des déchets. Elle a mis en place un projet de méthanisation depuis 2021 en consommant l’intégralité de sa production de gaz vert et depuis 2023, produit plus qu’elle ne consomme. Depuis l’année dernière, le site a également installé une pompe à chaleur afin de réduire de 25% sa consommation de gaz. L’usine a atteint 100% d’énergie renouvelable en 2021.