Zéro Artificialisation Nette : les prix des friches urbaines s’envolent
Urbanisme. Les perspectives du Zéro Artificialisation Nette pose bien des problèmes aux investisseurs.
Organisée par Châlons-en-Champagne Agglomération, dans le cadre de la 77e Foire de Châlons-en-Champagne, la conférence économique « Peut-on réindustrialiser les territoires avec zéro artificialisation nette ? » a abouti à une conclusion et non des moindres parmi d’autres : le ZAN est une cause majeure du renchérissement des prix des friches urbaines.
Notant que 70% des friches militaires de Châlons-en-Champagne sont réutilisées aujourd’hui, Jacques Jesson, Président de Châlons Agglo, pose la limite des friches vis-à-vis des besoins fonciers : « La réutilisation des friches ne pourra répondre à elle seule au besoin foncier et à la réindustrialisation de notre pays, par ses coûts financiers, par l’urbanisation qui s’est quelques fois rapprochée des zones économiques, générant des conflits d’usage ».
Il n’est pas question d’opposer le ZAN, (Zéro Artificialisation Nette), à la nécessité de réindustrialiser le pays. Bruno Arcadipane, chef d’entreprise châlonnais et Vice-Président national du Medef tranche : « Le ZAN, c’est la loi », avant d’évoquer l’équilibre à trouver entre ce dispositif législatif et le besoin impérieux de développer et de créer des entreprises.
Et, puisqu’il est question de réindustrialisation, Bruno Arcadipane rappelle le retard français en la matière : l’industrie ne représente que 12% du PIB français contre 17% en Europe. Ce secteur recherche 60 000 embauches. Donc : du foncier pour les entreprises et les logements de leurs salariés.
Caractériser les espaces disponibles
Autre exercice d’équilibre, celui proposé par Pascale Gaillot, Présidente de la Commission Environnement du Grand Est : « L’industrie peut être rurale. Des usines dans les champs, mais sans nuire aux besoins alimentaires. Il faut caractériser les hectares disponibles ».
Un exercice aussi de compatibilité, évoqué par Jérôme Mât, premier Vice-président de Châlons Agglo : « Ne pas opposer renaturation des espaces et réindustrialisation. Informer sur les pratiques les moins énergivores. Nous avons besoin de circuits courts, donc d’agriculture au voisinage des villes. Renaturer les villes, c’est bien. La richesse économique aussi. À chaque lieu sa spécificité. Il faut analyser les territoires au cas par cas et récompenser ceux qui depuis longtemps font déjà de la reconversion de friches ».
Côté administratif, Bruno Arcadipane s’en prend à la lenteur des permis de construire, à l’absence d’une planification territoriale :
« Il faut donner de la visibilité aux investisseurs, ou alors, ils iront ailleurs ». Un point de vue relayé par Pascale Gaillot : « Des progrès à faire au plan administratif » et par Jérôme Mât : « Nous rendons des comptes à des tas de gens. Nous allons d’études en études et cela coûte cher. On oublie de récompenser les territoires qui régulent l’artificialisation ».
Le ZAN à l’origine de la guerre du foncier urbain
« L’État aide les entreprises. Nous n’avons pas de gros problèmes d’argent quand il s’agit d’investir. L’exécutif va dans le bon sens. Tous les pays du monde dopent leurs industries ».
Bruno Arcadipane rassure sur ce côté du développement potentiel des entreprises, avant de vraiment mettre les pieds dans le plat : « Avec le ZAN, la guerre arrive. En cause : le prix du foncier. Sur le terrain, la guerre des grands groupes qui ont les moyens de payer des friches à prix d’or. Une situation intenable pour les PME ». Et d’un autre côté, reprenant sa fonction de Président d’Action Logement : « Plus de 2,4 millions de Français sont à la recherche d’un logement social. »
Dans la foulée de ce pessimisme affiché à la tribune de la conférence, Pascale Gaillot, à propos des nouvelles règles imposées par le ZAN, lâche : « On ne sera jamais à zéro ». Une réindustrialisation des villes sous le signe des tours industrielles moins consommatrices d’espaces, fait réagir Bruno Arcadipane : « Cela va être sympathique ».
Mais, guerre du foncier ou pas, le Vice-président du Medef souhaite que le milieu économique soit enfin inviter dans les structures décisionnaires et comme une conclusion à son propos, le ZAN produisant sa clientèle de friches : « Nous irons très certainement au zéro. Les mètres carrés les plus pollués seront tous achetés. Le ZAN va profiter aux grands groupes ».