« Si rien ne change, il faudra se résoudre à rendre les clés au Préfet »
Ardennes. C’est dans un contexte financier extrêmement compliqué et toujours très flou que le Conseil départemental des Ardennes a débattu des orientations budgétaires.
En tenant compte d’une situation financière de plus en plus tendue, les élus ardennais réunis en amont du vote du budget à l’assemblée nationale (le gouvernement ayant fait l’objet d’une motion de censure depuis, ndlr), ont dégagé les évolutions à prévoir sur le budget 2025.
« Si le projet de loi de Finances en cours d’élaboration venait à être appliqué en l’état, faisant supporter aux départements deux millions d’euros d’économie, ce ne sera pas neutre pour 30 de ces collectivités, dont la nôtre, en très grandes difficultés (*). Car cela impactera fortement notre fonctionnement ». C’est ainsi que Noël Bourgeois a introduit cette séance plénière.
Avant de continuer sur le même ton. « Dans ces conditions, on va essayer de maintenir l’existant, limiter l’épargne nette négative à huit millions d’euros et conserver l’ensemble des crédits d’investissements autour de 40 millions d’euros », a constaté le président. Avant d’épingler l’ancien ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire. « C’est ahurissant d’entendre l’ancien ministre des Finances parler d’une grave erreur technique d’évaluation des recettes pour expliquer l’ampleur du déficit initialement annoncé à dix millions d’euros et passé à 60 millions d’euros ! Nous sommes en train de payer cela en passant à la caisse. C’est tout de même un comble ». Et de conclure : « Aujourd’hui, nous n’avons plus les moyens d’exercer notre mission d’autant que les dotations de l’Etat sont de moins en moins importantes et qu’on subit la hausse de nombreuses charges. Nous n’en pouvons plus et nous sommes arrivés au bout d’un système. Il est temps que l’Etat prenne la mesure du problème et revoit sa copie, car si rien ne change, ça va craquer. Et si on continue de nous asphyxier, il faudra se résoudre à rendre les clés au Préfet. En tout cas, je ne donne pas cher de la pérennité de l’institution départementale ». Noël Bourgeois persiste à réclamer une réelle péréquation, basée sur l’état de pauvreté du territoire.
40 M€ d’investissements malgré tout
En dépit de cette dure réalité, de la crainte du coup de rabot attendu et du reste à charge pour les nouvelles mesures de la politique sociale décidée par l’Etat (19,6 millions d’euros seulement compensés à hauteur de 2 millions d’euros), « la collectivité sans faire d’économie sur le dos de nos concitoyens, va s’atteler à investir 40 millions d’euros et c’est déjà un bel exploit quand l’Etat nous fait ainsi les poches en permanence ». Cette enveloppe sera consacrée à l’entretien du réseau routier et les bâtiments départementaux et en particulier les collèges, le maintien les actions volontaires en direction du sport, de la culture et du monde associatif et éducatif et la poursuite des efforts en direction des EHPAD et de la protection de l’enfance. Tout en assumant les obligations en matière sociale.
Autres opérations à concrétiser : la réhabilitation du collège de Monthermé, la mise en route de la seconde légumerie départementale à Attigny, le renouvellement de l’opération « chéquier culture » pour les élèves de 6e à la rentrée 2025, la mise en place d’un nouveau schéma départemental relatif à l’Accueil et à l’Habitat des Gens du Voyage, la finalisation des trois derniers km du parcours de la voie verte Sud-Ardennes et le lancement du concours d’architecte pour la construction de la nouvelle maison des solidarités de Bogny-sur-Meuse.
Noël Bourgeois a rappelé que que son assemblée allait encore « trinquer » dans les prochains mois avec, entre autres ; la baisse de remboursement de la TVA (de 16,4 à 14,8 %, soit un million d’euros), la fin du financement exceptionnel de l’allocation personnelle d’autonomie, la hausse du SMIC programmée en novembre et la future majoration des cotisations de retraite des agents, laquelle alourdira la masse salariale de 1,3 million d’euros. À quoi s’ajoutent les conséquences du vieillissement de la population, l’augmentation des dépenses liées à la protection de l’Enfance et l’arrivée massive et inédite de mineurs non accompagnés.
(*) Avec un niveau de vie médian annuel de 20 900 €, les Ardennes font partie selon l’INSEE des dix départements métropolitains les plus pauvres de France avec 19,4 % de personnes en situation de pauvreté.