Collectivités

Plus aucun service de proximité pour 40% des communes du Grand Est

Territoire. En quarante ans, deux communes sur cinq ont perdu des services du quotidien et désormais quatre communes sur cinq sont dépourvues d’un minimum d’équipements. Les services de santé de proximité résistent mieux que les commerces alimentaires et les écoles.

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Photo d'une ancienne charcuterie fermée
Le nombre de communes disposant d’au moins un commerce alimentaire a baissé de 37%, dont 23% pour les boulangeries et 53% pour les boucheries. (Crédit : GD)

Entre 1980 et 2021, le nombre de communes disposant d’au moins un commerce d’alimentation générale a été divisé par 2,5. La situation évolue différemment selon la taille du commerce : -73% lorsqu’il s’agit d’une épicerie ou d’une supérette et +116% pour la présence d’un supermarché ou d’un hypermarché. En trente ans, l’alimentation générale a perdu en nombre et gagné en surface.

Le nombre de communes disposant d’au moins un commerce alimentaire a baissé de 37%, dont 23% pour les boulangeries et 53% pour les boucheries. Globalement, le nombre d’épiceries ou de supérettes a été divisé par 3,7 celui des supermarchés et des hypermarchés a été multiplié par 2,2%.

Ce mouvement de concentration n’a épargné aucune zone du Grand Est. Le nombre de communes pourvues d’un commerce d’alimentation a baissé au minimum de 49% dans le Haut-Rhin et au maximum de 73% dans la Meuse.

Le seuil de population au-dessus duquel toutes les communes sont équipées d’un commerce alimentaire est passé de 2 500 à 6 300 habitants. En 1980, 98% des communes de plus de 1 000 habitants en été équipés, elles ne sont plus que 67% en 2021. Les communes de 300 à 500 habitants ne sont plus que 7% à être équipées d’un commerce alimentaire, huit fois moins en trente ans.

Les déserts scolaires au-dessous de 300 habitants

Dans ce même intervalle de trente ans, les communes disposant d’un équipement de santé de proximité ont progressé de 20% : +12% de médecins généralistes, +15% de chirurgiens-dentistes, +83% de masseurs-kinésithérapeutes, +29% d’infirmiers et +15% de pharmacies. Les communes disposant d’au moins un médecin généraliste sont en progression de 26%, 200 autres ont cependant perdu leur dernier généraliste.

Le nombre de communes disposant d’au moins un équipement scolaire a baissé de 40%, -43% pour les écoles élémentaires complètes et -31% pour les classes de regroupement. Depuis 1963, la création de la carte scolaire vise à regrouper les écoles de faibles effectifs. En 1980, la présence d’une école primaire complète était encore quasi systématique dans les communes de plus de 500 habitants et dans la moitié des communes de plus de 200 habitants.

Actuellement, la suppression des classes à plusieurs niveaux favorisant les regroupements, on assiste à une offre de pôles équipés de cantines, d’activités périscolaires et de garderies. L’école primaire complète n’est désormais plus généralisée qu’au-dessus de 1 000 habitants.

Malgré des baisses dans la Meuse, les Vosges et la Haute-Marne, le nombre de communes accueillant un médecin généraliste dans le Grand Est a augmenté de 12% en trente ans. Les autres services de santé ont renforcé leur présence territoriale. C’est notamment le cas des infirmiers et des masseurs-kinésithérapeutes. La région compte 130 communes disposant d’une maison de santé pluridisciplinaire. Coiffeurs, vétérinaires et crèches sont les services de proximité qui investissent le plus des nouveaux territoires. A contrario, les magasins d’électronique, les librairies, les banques et les postes sont en repli.

78% des communes privées de services de proximité

78% des communes du Grand Est, regroupant 22% de la population, ont perdu leur dernier équipement de proximité (commerce alimentaire, classe d’école primaire, service de santé…). Un tiers de la population régionale habite dans une commune qui ne dispose pas à la fois d’un commerce alimentaire général, d’un médecin généraliste et d’une école primaire complète.

Sont particulièrement touchées par cette désertification la Meuse, le sud de l’Aube, la Marne dans sa partie Argonne et les environs du Parc naturel régional de Lorraine.

L’essor de la voiture éloigne la proximité des services

L’enquête de l’INSEE souligne la démocratisation de la voiture individuelle et l’évolution du rapport aux distances. La voiture a profondément remodelé la répartition de l’habitat et de l’emploi. Le taux de motorisation des ménages était de 28% en 1960, 72% en 1982 et plus de 80% depuis 2008. Depuis 1980, le kilométrage parcouru en voiture individuelle a doublé. En zones périurbaines 91% des ménages sont équipés d’au moins une voiture.

Dans les zones dépourvues de services de proximité, ils sont 94%. Pour autant, la facilitation des déplacements et l’éloignement des emplois n’ont pas dissuadé la population d’occuper l’espace rural, lequel a perdu 14% de ses emplois quand les couronnes des grandes aires de plus de 200 000 habitants en gagnaient 21% (+ 50% autour de Strasbourg et Reims).

Le Grand Est plus touché que la moyenne nationale

Ce sont évidemment les plus petites communes qui souffrent de cette désertification des services. L’INSEE pointe notamment les communes de moins de 500 habitants et elles sont relativement plus nombreuses dans le Grand Est qu’ailleurs. Ces dernières représentent plus de 80% du total des communes dans la Meuse et la Haute-Marne, plus de 70% dans l’Aube, les Ardennes et la Marne. Par comparaison, la France métropolitaine n’en compte que 52%.

Le Grand Est est la troisième région, derrière la Bourgogne-Franche-Comté et la Normandie, pour le nombre d’habitants dans les communes de cette taille. Le nombre de ces communes dites « désertes » a progressé de 32% en région au cours des 30 dernières années. Il a stagné au niveau de la France métropolitaine. Globalement, 12% de la population du Grand Est habitent dans une commune de moins de 500 habitants, contre 6,7% au niveau métropolitain. Si la voiture favorise l’éloignement de l’emploi, la faible démographie repousse les services.